Rénovation, énergies renouvelables : BP Aura confronte sa « banque de la transition énergétique » à un marché mouvant

La Banque Populaire Auvergne-Rhône-Alpes retombe de l'année 2023 sur ses deux pieds : la première banque des entreprises a conservé sa stabilité, malgré un contexte difficile, avec une « chute » de la production de crédits immobiliers. Pour autant, 2024 s'annonce pour l'heure sans reprise franche du marché immobilier, selon son directeur général Daniel Karyotis, qui reste aussi assez prudent sur le champ de la rénovation énergétique, par ailleurs en fort développement. Un secteur, avec celui des énergies renouvelables, vers lequel BP Aura s'est orientée depuis 2020 avec la création de sa « Banque de la transition énergétique », affichant une nette accélération.
Près de 7.568 projets liés aux énergies renouvelables ont été financés par la Banque de la Transition énergétique (BTE) de la Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes au sein de sa zone d'intervention depuis 2020, dont 3.456 supplémentaires l'année dernière.
Près de 7.568 projets liés aux énergies renouvelables ont été financés par la Banque de la Transition énergétique (BTE) de la Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes au sein de sa zone d'intervention depuis 2020, dont 3.456 supplémentaires l'année dernière. (Crédits : DR)

2023 a bien été, pour mémoire, une année « exceptionnelle » selon Daniel Karyotis, à la tête de la Banque Populaire Auvergne-Rhône-Alpes. Après dix-huit mois d'après-Covid très favorables, cette banque régionale, créée il y a 125 ans, a été remuée comme les autres par la hausse fulgurante des taux directeurs l'année dernière (allant jusqu'à plus de 5 % en décembre).

Une telle augmentation, cumulée à une inflation conséquente, qui ont eu pour effet de limiter le recours à l'emprunt immobilier des ménages et pénaliser tout un secteur. Crise du logement, explosion des défaillances d'entreprises du secteur ; la situation « prendra du temps à se rétablir » selon le directeur, qui a essuyé cette année une « chute » de 55 % (1,4 milliards d'euros) de la production de crédits immobilier dans sa zone géographique (couvrant la région Aura, mais aussi les départements des Hautes-Alpes, des Alpes-de-Haute-Provence et de la Corrèze).

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Mais cette banque coopérative régionale, comptant 350.000 sociétaires et près de 1 million de clients (dont 10 % de professionnels), a tout de même sauvé la mise : « Nous avons anticipé dès 2021 un retournement », détaille Daniel Karyotis à l'occasion de la présentation des résultats annuels de son entité.

Mécanismes financiers d'un côté, et cessions d'actions du fonds Garibaldi Participations de l'autre, ont permis à la banque de garder la tête hors de l'eau. Et d'afficher un produit net bancaire (PNB) « quasiment stable » (-0,5 %), ainsi qu'un résultat net consolidé « affichant une nette progression » (+9,1 %).

Pour autant, ce contexte d'instabilités fait appeler le directeur général de BP Aura à la prudence : « 2024 ne sera assurément pas une année de reprise du marché de l'immobilier. Ce sera compliqué, et je dirais qu'en 2025 également », dépeint Daniel Karyotis, qui pressent « un cycle de deux à trois ans, au minimum ». Car pour l'instant, « l'équation est difficile à résoudre entre les taux et le prix au mètre carré ».

La « Banque de la transition énergétique » en ascendance

Malgré tout, les crédits d'équipements (1,1 milliard d'euros en 2023), jugés plus 
« résilients », pourraient aussi servir de contrepoids, selon le directeur. Autant d'enjeux d'équilibrage, qui se conjuguent également avec ceux du financement de la transition écologique et énergétique, à destination des particuliers comme des entreprises. Secteurs vers lesquels la banque investit notamment depuis 2020 à travers sa « Banque de la transition énergétique » (BTE).

Une structure consistant à la collecte d'épargne et au financement de crédits fléchés vers des projets d'énergies renouvelables ou de rénovation énergétique. Après un lancement inédit à l'échelle des Banques Populaires en 2020, puis une phase de lancement l'année suivante, la BTE Aura affiche aujourd'hui des résultats probants : près de 398 millions d'euros d'encours d'épargne ont été fléchés vers cette structure (+23 % en 2023), pour 460 millions d'euros de crédits accordés (+54 %).

Des financements fléchés vers des projets d'énergies renouvelables (à 28 %), d'efficacité énergétique (30 %), d'écomobilités (26 %), d'économie circulaire (6 %) et d'innovation (10 %), sur le territoire.

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L'objectif affiché ? « Être leader dans l'accompagnement énergétique ». Sur les petits projets aussi, affirme la banque : des unités de méthanisation « pour 30 à 40.000 euros », ou encore la pose de panneaux photovoltaïques « pour 150 ou 200.000 euros ».

Mais aussi l'éolien, dont Laurent Wauquiez a annoncé couper les vivres du fonds régional OSER début mars, recapitalisé à hauteur de 12 millions d'euros au profit notamment du photovoltaïque ? « Le sujet, c'est de savoir exactement ce que veut faire la Région », répond Daniel Karyotis, qui confirme également continuer à financer des projets de parcs éoliens.

« S'il n'y a que du photovoltaïque dans ce fonds, est-ce que cela nécessiterait la recapitalisation annoncée ? Attendons d'abord le projet et ensuite, nous suivrons, ou non ».

Plus de la moitié des projets crédités en 2023

Des activités où les banques jouent depuis peu leur partition : ainsi, près de 7.568 projets ont été crédités par la BTE (BP Aura) dans sa zone d'intervention depuis 2020, dont 3.456 supplémentaires l'année dernière. Une progression qui se dessine pour l'heure en courbe exponentielle, dans des secteurs d'activités pourtant mouvants, car très dépendants des réglementations afin d'assurer leur déploiement et leur modèle économique.

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« Il faut que toute l'entreprise adopte les bons reflexes et le bon niveau d'acculturation des dossiers et de leur technicité », ajoute à ce titre le directeur générale de la BP Aura. « Chose que nous n'avions pas l'habitude de voir, aussi parce que la règlementation bancaire n'est pas très facilitatrice » :

« Il y a une courbe d'apprentissage : aucun de ces dossiers ne ressemble à ceux que nous avons l'habitude de traiter. Par exemple, dans l'hydraulique, tous les chiffres sont dans le rouge. Si vous vous arrêtez aux chiffres, vous pliez. En revanche, si vous regardez les refacturations mécaniques des rachats par EDF, avec des engagements sur trente ans, vous voyez le dossier différemment », ajoute Daniel Karyotis.

Lits froids : « un sujet collectif à porter »

À ce titre, d'autres domaines sont également soumis à fluctuations : évolution des règlementations, désengagement, complexités administratives et coordination des acteurs...

L'exemple de la rénovation énergétique des bâtiments, notamment soutenue par le dispositif Ma prime rénov', dont l'enveloppe budgétaire a finalement été revue à la baisse en début d'année par Bercy (dans le cadre du plan d'économies de 10 milliards d'euros), en est l'illustration.

À ce titre, « il y a une instabilité des règlements », répond à nouveau le directeur de BP Aura. « Je suis toujours très prudent sur les grandes annonces. Derrière certains chiffres stratosphériques, la mécanique administrative ne suit pas toujours ».

Une situation d'autant plus complexe en montagne, où l'enjeu des « lits froids » (ces logements touristiques situés en stations et non occupés à l'année) se veut complexe, car niché au cœur des réflexions autour de la transition des modèles économiques.

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« Il y a un sujet collectif à porter, peut-être avec d'autres banques, ou des collectivités locales », ajoute le dirigeant, se référant d'ailleurs à la Foncière des Alpes, où BP Aura est actionnaire aux côtés de la Caisse des dépôts, des Crédit Agricole des Savoie et Sud Rhône-Alpes, ainsi que de la Caisse d'Epargne Rhône-Alpes. Une entité qui a, en parallèle, également soutenu des projets d'établissements de loisirs neufs ; par exemple celui du complexe haut de gamme du Club Med de La Rosière (Savoie), inauguré en 2020, comme le décrivent nos confrères du Dauphiné Libéré.

« Il y a bien un monde de la montagne à deux vitesses », pointe Daniel Karyotis. Tout en remarquant « le rôle que pourraient jouer les JO d'hiver 2030 dans ces transitions ». Là où BP Aura est déjà partenaire prémium des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024.

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