RER métropolitains : comment la Région prépare la labellisation « SERM » des six candidats auralpins

Cinq mois après la promulgation de la loi sur les « Services express régionaux métropolitains » (SERM), visant à accélérer les projets de « RER » et plus largement de transports en commun dans les grandes agglomérations, le calendrier se précise en Auvergne-Rhône-Alpes, afin de porter six candidatures à la labellisation. Revue des études, réunions techniques, potentielle fusion des projets : d'ici à la fin de l'année, la Région entend « affiner » les dossiers, afin de lancer de premiers grands travaux en 2025.
(Crédits : ER/La Tribune)

Très attendu, le programme de développement des « Services express régionaux métropolitains » (SERM) pourrait-il être bientôt sur de bons rails ? Les lignes commencent en tout cas à bouger en Auvergne-Rhône-Alpes.

En effet, cinq mois après la promulgation de la loi relative aux SERM, les régions commencent à se mettre en ordre de marche avec les services de l'Etat et la SNCF. Le gouvernement déclare en effet avoir reçu une trentaine de déclarations de candidature à la labellisation en France, tandis qu'Emmanuel Macron, lors de ses premières annonces, à l'automne 2022, avait précisé vouloir avancer sur les « dix principaux projets ».

En Auvergne-Rhône-Alpes, six demandes ont émergé : les agglomérations de Lyon, de Saint-Etienne, de Grenoble, de Clermont-Ferrand, de Chambéry, mais aussi de Genève/Annemasse, sont en effet candidates à la labellisation SERM, visant à accélérer le développement des modes de transport collectifs, allant du train à la route.

Cela, afin d'aider à renforcer les offres de transports pour quelque « 6 millions d'habitants, sur les 8 millions d'habitants de la Région », dépeint à La Tribune Frédéric Aguilera, maire de Vichy (Allier) et vice-président aux Transports pour la collectivité présidée par Laurent Wauquiez (LR). Mais comment les autorités entendent-elles procéder ?

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Ce programme s'articule en trois trois temps : une première phase consiste à développer des « services express routiers », sans aménagements, « sur le modèle de l'axe Créon-Bordeaux », illustre l'Etat dans son cahier des charges à destination des collectivités candidates à la « labellisation » de leur projet.

Cela, en attendant l'arrivée d'investissements bien plus conséquents : dans un second temps en effet, les agglomérations labellisées devraient voir leurs offres ferroviaires renforcées, via le développement « de la fréquence (des trains) et de l'amplitude (des réseaux) ».

Ce qui nécessite des investissements conséquents dans les infrastructures existantes. Mais aussi une accélération des procédures selon Frédéric Aguilera : la Société des grands projets (anciennement Société du Grand Paris, SGP) pourrait venir en appui, « sans passer par un système lourd d'appels d'offres », souligne ainsi l'élu régional, délégué aux transports.  

Enfin, une troisième phase, à beaucoup plus long terme, consiste à soutenir des infrastructures neuves sur « certains territoires », en fonction de l'évolution démographique. Mais cette étape ne semble pas encore à l'ordre du jour, tant les besoins restent pour l'instant focalisés sur le renforcement de l'offre existante.

Au mois de juin, les six agglomérations consultées

En Auvergne-Rhône, Alpes, après plusieurs mois d'échanges complexes entre le gouvernement et les collectivités locales, sur fond de négociations sur leurs engagements financiers respectifs, les autorités commencent désormais à entrer dans une phase plus opérationnelle.

Après avoir envoyé des courriers co-signés au gouvernement au printemps, puis s'être réunies lors d'une visioconférence « technique », les six agglomérations s'apprêtent en effet à déposer, dans l'été, leurs « dossiers minute » sur le bureau de l'Etat. Cela, en vue d'une première vague de labellisation annoncée par celui-ci « courant 2024 », et qui pourrait arriver dans les prochaines semaines. Dans la perspective, ensuite, de premiers arrêtés ministériels qui pourraient être publiés à la fin de l'année.

Mais avant cela, des comités de pilotage sont organisés par les services de l'Etat et la Région dans chaque agglomération d'ici à la fin du mois de juin. Cela, aux côté des équipes du Ministère de la Transition écologique, des élus locaux, mais aussi de SNCF Réseau, de SNCF Gares & connexions, ou encore de la SGP.

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Ainsi, une première réunion s'est déroulée le lundi 27 mai dernier à Grenoble : ce premier échange « technique » portait sur le projet de SERM du Dauphiné, initié il y a déjà plusieurs années. Certaines déclinaisons du projet seraient parmi les premières à entrer dans une phase plus opérationnelle à l'échelle régionale et même nationale.

Ce chantier a ainsi été dressé en étendard quelques jours plus tôt par le Premier ministre Gabriel Attal, qui avait d'ailleurs indiqué à nos confrères du Progrès et du Dauphiné Libéré que le RER grenoblois « serait mis en circulation dès 2025 ». Soulevant tout de même l'étonnement et les doutes de certaines collectivités territoriales et associations d'usagers interrogées par La Tribune, remarquant que les premiers éléments ne seraient pas livrés avant 2028.

De même, l'horizon fixé à 2035 pour « une mise en service complète du RER », selon la Métropole, semble s'éloigner, comme l'indiquait le 28 mai, dans Le Dauphiné Libéré, le président du Syndicat mixte des mobilités de l'aire grenobloise.

« Quand on annonce 2025 ce n'est pas faux, 2026 non plus, 2035 également, car tous les ans, nous rajoutons une couche. Ce sont des dossiers en perpétuelle construction », tempère de son côté Frédéric Aguilera, qui joue le rôle de courroie de transmission entre l'Etat et les collectivités.

Car « en 2025, près de Grenoble, des travaux devront être amorcés, notamment en gare de Brignoud » afin de passer à un train tous les quarts d'heure dans le Grésivaudan, illustre l'élu régional, qui rappelle entrer dans une phase technique, où il s'agit désormais « d'affiner les périmètres en termes de trains, de multimodalités ». En plus de « travailler sur la gouvernance et les modes de financement » des six SERM, qui devront également « s'aligner sur le même calendrier, la même temporalité ».

Pour autant, la Fédération nationale des associations des usagers des transports (FNAUT) Auvergne-Rhône-Alpes regrette quant à elle « le manque de cohérence » de ces programmes, en demandant notamment des réponses à « courte échéance » pour les usagers. Citant par exemple le renforcement des compositions (via l'achat de nouvelles rames - la Région en attend 130 supplémentaires pour les douze prochaines années), ou encore le cadencement au minimum à l'heure.

Un SERM lyonnais, ou lyonnais et stéphanois ?

En parallèle, certains points cruciaux resteraient encore en suspens : l'idée de fusionner les SERM de Grenoble et de Chambéry resterait en effet dans les cartons. De même, Frédéric Aguilera ne ferme pas la porte à un SERM commun entre les métropoles de Lyon et de Saint-Etienne.

« Nous avons encore des interrogations sur Lyon : est-ce qu'on considère que c'est un seul SERM Lyon-Saint-Etienne, ou deux SERM ? Les territoires s'interrogent beaucoup là-dessus », nous indique l'élu régional.

Pour le Grand Lyon, la question ne semblait jusqu'alors pas directement sur la table.Le président de la Métropole, Bruno Bernard, s'insurgeait déjà, en mars dernier, du fait que la Région puisse mettre les six dossiers de RER sur le même plan, notamment financier : « La première chose, c'est qu'il faut que la Région affirme que le RER lyonnais est une priorité, alors que sa position reste plutôt de dire que les six projets régionaux (Chambéry, Grenoble, Clermont-Ferrand, etc.) doivent tous être mis au même niveau », indiquait Bruno Bernard.

« Pour moi, c'est incompréhensible, car il existe des enjeux de RER lyonnais qui dépassent très largement la Métropole de Lyon, parce qu'en réalité ils concernent peut-être les trois quarts de la région ».

François Lemaire, vice-président de la Fédération nationale des usagers des transports (Fnaut) Auvergne-Rhône-Alpes, estime pour sa part que « cette opération complète (en fusionnant plusieurs SERM, dont Lyon et Saint-Etienne) pourrait avoir du sens », étant donné que « la liaison Lyon/Saint-Etienne, d'une durée de 45 minutes, est déjà l'une des deux lignes les plus fréquentées d'Auvergne-Rhône-Alpes ». De même, cet habillage permettrait de « ne pas trop multiplier les projets ».

Malgré tout, il reste l'enjeu majeur de la tarification intégrée, entre les RER d'un côté et les forfaits mobilités à l'intérieur des agglomérations de l'autre. Sur ce point, les relations semblent en ce moment gelées entre la Région et le Grand Lyon.

Des « Assises régionales » repoussées à la rentrée

Il faudra encore attendre les « assises régionales » sur les SERM, finalement annoncées après l'été, pour avancer dans le processus. Initialement prévues au printemps, elles ont été repoussées à la rentrée par la Région.

« Partir sur des assises sans avoir eu un minimum de travail technique et de concertation sur les territoires, c'était finalement un peu casse-figure », indique à ce titre Frédéric Aguilera.

Une autre échéance, cette fois nationale, arrivera également en septembre : la conférence des financeurs devrait en effet apporter quelques clés sur la définition du modèle économique (investissements directs, nouvelles taxes, etc). Car après de longs mois de négociations, la question du financement semble encore loin d'être réglée entre la Région, les collectivités et l'Etat.

322 millions d'euros pour les six SERM dans le prochain CPER Mobilités Auvergne-Rhône-Alpes

Comment harmoniser les six projets de SERM ? La première étape consiste, selon la Région, à lancer et à consolider rapidement de nombreuses études techniques. Mais pour cela, qui pour les financer ?

En Auvergne-Rhône-Alpes, ces investissements seraient, pour la plupart, intégrés au Contrat de plan Etat-Région (CPER), en cours de signature.

La Région s'est en effet accordée mi-mai avec l'Etat sur un protocole d'accord, fléchant une enveloppe globale de 322 millions d'euros (dont 147 millions d'euros de l'Etat) pour amorcer les six projets de SERM du territoire.

Mais son montant global resterait encore « décevant » selon la Métropole de Lyon, l'une des six agglomérations concernées. Car les investissements à venir pour le seul SERM lyonnais, à long terme, sont estimés à « plusieurs milliards d'euros » par plusieurs acteurs.

De son côté, l'Etat indique également flécher 800 millions d'euros vers les projets de SERM dans les prochains CPER Mobilités (2023-27) des régions françaises, dont huit sur douze ont à ce jour été signés ou sont en voie de signature. Parmi elles : Auvergne-Rhône-Alpes, Provence-Alpes-Côte d'Azur, Bretagne, Pays de la Loire, Centre-Val de Loire, Île-de-France, Grand-Est et Hauts-de-France.

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