Batteries électriques : Verkor, la pépite iséroise qui a déjà levé 3 milliards d'euros

DECRYPTAGE. C'est en présence du premier ministre Gabriel Attal à Matignon que l'isérois Verkor a signé vendredi soir le dernier accord de financement pour sa gigafactory, en chantier à Dunkerque (Hauts-de-France). Avec à la clé : une nouvelle étape très attendue de 1,38 milliard d'euros, qui vient abonder l'enveloppe de 2 milliards déjà conclue en septembre dernier, cette fois auprès de 19 banques, dont trois publiques. De quoi confirmer la livraison de sa méga-usine, attendue pour le second semestre 2025, tout en ouvrant la porte à d'autres projets dans les cartons.
En cours de construction de sa première gigafactory à Dunkerque, la jeune pousse iséroise Verkor fait office de licorne cachée : d'un naturel discret, elle vient pourtant de boucler une seconde tranche qui  la porte à 3 milliards d'euros de financement récoltés depuis deux ans.
En cours de construction de sa première gigafactory à Dunkerque, la jeune pousse iséroise Verkor fait office de "licorne cachée" : d'un naturel discret, elle vient pourtant de boucler une seconde tranche qui la porte à 3 milliards d'euros de financement récoltés depuis deux ans. (Crédits : DR/Verkor)

Dès sa création en 2020, il se voyait déjà comme le « Northvolt tricolore » des batteries... Quatre ans plus tard, l'isérois Verkor vient enfin de compléter un financement particulièrement capitalistique : car au total, ce sont près de trois milliards d'euros que la jeune pousse aura levé, en l'espace de deux ans, pour construire sa grande usine de batteries, dont la fabrication en série est attendue dès l'été 2025.

Lire aussi Voitures électriques : à Grenoble, Verkor est un symbole de la réindustrialisation

Avec pour rappel, une capacité totale de 16 GWh (soit un volume permettant d'équiper 200.000 à 300.000 véhicules) d'ici à 2027, et un premier contrat d'envergure déjà signé avec le constructeur français Renault, devenu son actionnaire dès 2021, et qui s'est engagé à lui réserver les deux tiers de sa production (12 GWh), à travers un contrat de partenariat de long terme. Ces batteries équiperont notamment le futur Crossover 100 % électrique d'Alpine dès 2025, ainsi que le véhicule utilitaire électrique, issu du partenariat entre Renault, CMA CGM et Volvo, dès 2026.

Et c'est l'un des arguments qui aura pesé tout particulièrement auprès des banques, en vue de débloquer ce nouveau financement de 1,38 milliard d'euros, qui résonnait pour la jeune pousse comme l'ultime étape à franchir avant de pouvoir pleinement se lancer dans ses opérations.

19 banques pour 1,38 millions d'euros

Ce vendredi, c'est bien un pool « XXL » de 19 banques, dont trois publiques, qui se sont engagées à mettre la main au portefeuille : avec, dans le détail, une première enveloppe de 961 millions de prêt vert dit « senior », dont environ un tiers bénéficie de la garantie des projets stratégiques (GPS) amenée par l'Etat français.

Un second prêt de 150 millions d'euros de la Caisse des Dépôts abonde le montage, tandis que la Banque européenne d'investissement (BEI) confirme à cette occasion son aide de 400 millions (répartie entre 270 millions de prêt direct et 130 millions intermédiés aux banques commerciales participantes), et dont le principe avait déjà été annoncé en septembre dernier.

Le tour de table inclut d'une part, côté tricolore, La Banque Postale, les Caisses d'Epargne Hauts-de-France et Rhône-Alpes, Natixis et la Société Générale tandis que des banques étrangères complètent également le dispositif (ABN Amro, Banco Santander, ING France).

Lire aussi Batteries électriques : Verkor sécurise 2 milliards d'euros pour créer sa gigafactory de Dunkerque

Une étape particulièrement cruciale pour la jeune pousse, qui avait dû s'accommoder d'un climat économique assombri par la hausse des taux d'intérêts, couplé à un fort ralentissement des ventes du marché des véhicules électriques en France, ayant conduit certains constructeurs à revoir leurs scénarios d'investissements à la baisse.

« Il est certain que le contexte de financement n'est pas le même aujourd'hui qu'en 2019 voire 2021, nous assistons peut-être à un moment de normalisation dans le secteur de l'électromobilité, mais notre projet est bien construit, avec le soutien d'un groupe comme Renault, une garantie de l'Etat français, et avec face à nous, des besoins d'électrification qui demeurent très élevés », rappelle à La Tribune Benoit Lemaignan, co-fondateur et président de Verkor.

Son coeur d'activité, positionné dans le secteur émergeant des batteries, constituait en effet un défi de plus pour convaincre les investisseurs, et pour lequel la garantie amenée par l'Etat aura joué :

« Le fait de bâtir un financement qui repose sur une technologie industrielle émergeante en Europe nécessitait un niveau de technicité contractuel important, contrairement à d'autres secteurs comme les panneaux solaires par exemple, où les technologies sont déjà connues. D'autant plus que nous ne sommes qu'une poignée d'acteurs, comme Northvolt, à être dans cette situation en Europe », abonde Benoit Lemaignan.

Lire aussi Automobile : le gouvernement veut multiplier par quatre les ventes de voitures électriques d'ici à 2027

Pour rappel, le précédent tour de table bouclé en septembre dernier à 2 milliards d'euros avait signé l'arrivée de l'industriel australien Macquarie - devenu ainsi son premier actionnaire -, le fonds Meridiam, ainsi que le Fonds stratégique de participations (FSP), qui regroupe sept compagnies d'assurance françaises dédiées à l'accompagnement des entreprises industrielles et technologiques.

Des travaux à poursuivre et un second projet dans les cartons

Avec ses 3 milliards d'euros désormais en poche, Verkor peut donc officiellement « boucler » le financement de sa gigafactory de Dunkerque, dont les travaux avaient déjà démarré, pour une mise en service prévue au second semestre 2025.

Avec pour rappel, un budget de construction toujours établi à 1,5 milliard d'euros, mais auquel il lui fallait également ajouter des coûts annexes, tels que l'achat des équipements nécessaires ou encore la facture énergétique d'une industrie, qui se positionne comme électrointensive.

Son plan de développement prévoit 1.200 emplois directs d'ici 2025 et jusqu'à 5.000 emplois indirects sur son site du Grand Port Maritime de Dunkerque, qui bénéficie lui-même du programme des sites « clé en main » de la part de l'Etat.

Après avoir finalisé les travaux de génie civil, les travaux de construction des « salles sèches » (qui se posent comme les équivalents des salles blanches pour l'industrie de la batterie, ndlr) vont pouvoir débuter, suivies de la livraison des premières machines, attendues à compter de cet été. « Nous sommes aujourd'hui 570 salariés, dont une centaine à Dunkerque, et nous serons le double en fin d'année », ajoute Benoit Lemaignan, pour lequel la montée en puissance ne fait que démarrer, alors que des formations au futur processus de production sont déjà en cours dans son Verkor innovation center (VIC) de Grenoble.

Tous les yeux sont désormais tournés vers un autre objectif, préalablement annoncé par le pépite iséroise, qui ressemble de plus en plus à une licorne cachée. Car dès 2020, celle-ci envisageait d'atteindre une production annuelle de 50 GWh par an. Si Dunkerque lui permettra de monter « jusqu'à 20 GWh maximum », le reste pourrait être à l'agenda d'une nouvelle usine, qui semble désormais à portée de main. Pour autant, Benoit Lemaignan ne se précipite pas :

« Le financement que nous venons de boucler ne concerne que la gigafactory de Dunkerque. Nous avons ensuite des discussions avec beaucoup d'acteurs, afin de voir comment nous élargir à un panel de clients avec potentiellement, de nouvelles capacités. Mais à ce sujet, nous sommes encore en phase d'exploration », tempère-t-il.

D'autant que Verkor a déjà un objectif concret : celui d'atteindre les 1 milliard d'euros de chiffre d'affaires d'ici à 2027, pour transformer les promesses en livraisons. Un travail que la jeune pousse iséroise a déjà commencé à baliser, depuis son site de Grenoble, où des kits de batteries s'envolent déjà pour des allers-retours chez son partenaire Renault.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 10
à écrit le 03/06/2024 à 21:46
Signaler
Toute la question est désormais : Est-ce que la France va enfin se doter d'une capacité de production de batteries LFP (Lithium Fer Phosphate). ??? Personnellement, je n'achètera jamais de véhicule à batterie NMC. Durée de vie trop courte, Problèmes...

à écrit le 02/06/2024 à 11:23
Signaler
C'est pour cela France doit nettoyer la Nouvelle-Caledonie des terroristes avec de frapes aériennes de Charles de Gaulle.France peut pas produire ses propres batteries sans des resourses aux prix bas.

le 03/06/2024 à 21:41
Signaler
C'est une plaisanterie ? Vous êtes surmené.

à écrit le 27/05/2024 à 18:54
Signaler
A Dunkerque, il y aura assez de logements disponibles pour le personnel (& leurs familles) qui va y migrer suite aux annonces d'emploi chez France Travail ? Parfois les logements vacants sont rares, faut-il y aller en caravane (en attendant) ? Quand ...

le 27/05/2024 à 22:12
Signaler
La population de Dunkerque baissait depuis de nombreuses années.

à écrit le 27/05/2024 à 17:52
Signaler
Les fondateurs de Verkor garderont quelles parts de la société? Quelle quelles technologies sont envisagés pour les batteries?

à écrit le 27/05/2024 à 16:38
Signaler
Sans être méchant ka seule lecture de la structure financière à priori laisse baba...ça sent le mélange entre la magouille et le flop

le 27/05/2024 à 20:34
Signaler
Bien d'accord , j'attends surtout de voir comment cette société va s'y prendre pour d'approvisionnement en matières premières inexistantes en Europe pour la plupart d'entre elles. Tout cela sent la magouille.

le 27/05/2024 à 20:34
Signaler
Bien d'accord , j'attends surtout de voir comment cette société va s'y prendre pour d'approvisionnement en matières premières inexistantes en Europe pour la plupart d'entre elles. Tout cela sent la magouille.

le 27/05/2024 à 22:03
Signaler
Je déments avoir signé avec un faux pseudo le commentaire précédent !

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.