ZFE : confirmée dans l'interdiction des Crit'Air 3, comment Lyon compte doubler son réseau de bornes de recharge

Alors que la Métropole de Lyon vient d'être confirmée comme l'une des deux seules villes, avec Paris, à devoir se conformer à un calendrier plus strict de sorties des véhicules Crit'Air 3 en janvier 2025, la collectivité a justement voté la semaine dernière son premier schéma directeur relatif aux bornes de recharge pour véhicules électriques. L'objectif : planifier l'action publique et privée dans l'idée de doubler le nombre de points de recharge publics d'ici à fin 2026. Car les défis demeurent : malgré sa deuxième place à l'échelle nationale après l'Île-de-France, l'évolution du nombre de bornes en Auvergne-Rhône-Alpes ne suit pas celle des nouveaux véhicules, notamment en zones urbaines. Décryptage.
La Métropole de Lyon vient d'adopter son Schéma directeur pour les infrastructures de recharge pour véhicules électriques, visant à multiplier par deux le nombre de bornes en trois ans.
La Métropole de Lyon vient d'adopter son Schéma directeur pour les infrastructures de recharge pour véhicules électriques, visant à multiplier par deux le nombre de bornes en trois ans. (Crédits : DR/ML)

Alors que le gouvernement a annoncé hier retirer les métropoles de Marseille, de Strasbourg et de Rouen de la prochaine étape du dispositif de Zones à faibles émissions (ZFE) pour les véhicules classés « Crit'Air 3 », visant à les interdire à la circulation afin d'améliorer la qualité de l'air, la Métropole de Lyon a quant à elle vu son calendrier confirmé.

Après la sortie des Crit'Air 5 puis 4 cette année, elle interdira à partir du 1er janvier 2025 la circulation des véhicules diesel de plus de 14 ans et essence de plus de 19 ans (Crit'Air 3) dans certaines parties du Grand Lyon. Une prochaine étape dans le projet de décarbonation porté par l'exécutif écologiste, qui entend par ailleurs accélérer sur l'électrification des véhicules, via le vote, la semaine dernière, de son premier schéma directeur pour les infrastructures de recharge pour véhicules électriques (SDIRVE).

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Ce document-cadre, déjà adopté par d'autres entités, dont le SYDER (Syndicat départemental d'énergies du Rhône) pour le reste du département depuis 2021, entend mieux coordonner le déploiement de ces points de recharge. Avec, inscrit dans ses objectifs, le doublement du nombre de bornes à horizon fin 2026.

Cela, en passant de 1.200 points de recharges aujourd'hui dans les 59 communes du territoire, à 2.000 fin 2024. Et à près de 3.500 dans deux ans et demi, ambitionne la collectivité, qui projette environ 63.000 véhicules électrifiés en circulation à cet horizon, contre 33.000 aujourd'hui (18.000 électriques et 15.000 hybrides rechargeables).

Une multiplication par deux du nombre de véhicules circulant autour de la capitale des Gaules en trois ans, qui s'articule avec l'entrée en vigueur progressive de sa Zone à faibles émissions (ZFE). Une stratégie nécessitant, de fait, un maillage important de points de recharges électriques.

Pour cela, le Grand Lyon entend s'adresser à plusieurs échelons, au regard d'un constat : « si l'essentiel de la recharge des véhicules électrifiés se fait à domicile ou en entreprise, encore plus de 40 % des ménages ne disposent pas de stationnement privatif sur le territoire métropolitain et les longs trajets nécessitent des recharges hors domicile ou entreprise ».

Pour y remédier, l'exécutif souhaite déployer 40 % de ces quelque 1.500 nouvelles bornes sur le domaine public (stations, parcs de stationnement en ouvrage) et 60 % sur le domaine privé (stations-service, supermarchés).

Ce, notamment grâce à des portages public-privés, comme c'est déjà le cas avec Izivia (filiale d'EDF), Lyon Parc Auto (LPA) et la Compagnie nationale du Rhône (CNR) depuis 2020. Ces sociétés comptent finaliser cette année le déploiement de près de 770 points de recharge dans 200 stations situées dans l'aire métropolitaine, en s'appuyant notamment sur l'ancien réseau Bluely.

En AuRA, des disparités entre les départements

Pour autant, en Auvergne-Rhône-Alpes comme à l'échelle nationale, la situation reste contrastée : car initialement, le déploiement des bornes de recharge électrique accessibles au public, qui ont dépassé en 2023 l'objectif des 100.000 points de charge fixé par le gouvernement sur tout le territoire, visait à suivre celui du nombre de nouveaux véhicules électriques en circulation (+ 25,7 % d'immatriculations électriques en un an, selon l'Association nationale pour le développement de la mobilité électrique, l'Avere-France).

Le tout, afin d'inciter les conducteurs à franchir le pas de la motorisation électrique en remplacement des véhicules thermiques.

Mais si la région figure à la deuxième place française en nombre de points de charge, avec près 14.500 bornes dans plus de 5.000 stations, elle fait tout de même face à de nombreuses disparités, comme l'observe Mathias Laffont, délégué général adjoint de l'Union française de l'électricité (UFE), association professionnelle du secteur :

« La région Auvergne-Rhône-Alpes est, dans l'absolu, plutôt en retard, car c'est la deuxième région française avec le plus mauvais ratio entre le nombre de véhicules et le nombre de bornes, après l'Île-de-France ».

Lyon et le département du Rhône sont particulièrement concernés, là où l'augmentation du nombre de bornes ne suit pas encore la croissance du nombre de véhicules. En effet, le département du Rhône reste accroché « à 21 véhicules par borne », tandis que la communauté européenne recommande un maillage de dix véhicules par point de recharge.

« Au niveau national, nous sommes à peu près à 14 véhicules électriques par point de charge aujourd'hui. En AuRA, nous sommes plutôt autour de 16,4 véhicules électriques par borne », complète Mathias Laffont.

Rattraper un écart qui se creuse

La situation s'est même « légèrement dégradée ces douze derniers mois », précise le délégué : « la région était à 15 véhicules par points de charge il y a un an. Il y a donc un retrait, avec de très grandes disparités entre les départements. A l'inverse du Rhône, ou encore de l'Isère, certains sont bien placés, avec un ratio inférieur à la moyenne nationale, comme la Drôme, la Loire, l'Allier, la Savoie, ainsi que le Puy-de-Dôme ».

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Des différences de déploiement qui tiennent parfois à la croissance moins importante du nombre de nouveaux véhicules électriques en circulation dans certains territoires. Mais pas seulement. « La région la mieux équipée est l'Occitanie, suivie du Centre-Val-de-Loire et des Hauts de France », complète Mathias Laffont.

« L'Occitanie a toujours eu un très bon ratio et a été capable de le maintenir, malgré un fort dynamisme au niveau des ventes, puisqu'elle est aussi située entre la troisième et la quatrième place des régions dans lesquelles il y a le plus de nouveaux véhicules électriques. Pour autant, elle aussi voit son ratio se dégrader, car le rythme à tenir est très conséquent ».

Tout l'enjeu, selon ce représentant de l'UFE, reste donc de porter de telles initiatives à une échelle plus large que les métropoles concernées et de coordonner les politiques, à l'image de ce que propose le Grand Lyon, qui « donne une impulsion, un cap, décrit Mathias Laffont. Et derrière permet de la visibilité pour les acteurs privés ou pour les utilisateurs ».

Pour autant, ces questions concernent aussi le niveau « supra », estime ce représentant de la filière : « Les Lyonnais ne circulent pas qu'à Lyon. Il paraît important que ces plans s'intègrent dans une vision plus large, départementale, voire régionale ».

Des contrastes entre les régions

Des plans similaires sont ainsi portés par les syndicats départementaux d'énergie, compétents en la matière, à l'image du SYDER dans le Rhône, qui a déjà installé 90 bornes de charge et en prévoit 130 supplémentaires.

Entités qui ont reçu des aides de la Région Auvergne-Rhône-Alpes, en 2021 et 2022, afin de mailler des sites touristiques emblématiques. Mais depuis, la collectivité ne finance plus aucune borne électrique au titre de sa politique environnementale et de transition énergétique, qu'elle consacre à l'hydrogène, notamment via le programme Zéro Emission Valley.

Une situation qui contraste également avec certaines autres collectivités : les régions Normandie et Grand-Est flèchent en partie certaines aides vers les infrastructures de recharge de véhicule électrique (IRVE) . Mais les politiques régionales sur la question restent globalement hétérogènes.

 « Il y a un sujet au niveau national, qui est de recréer une dynamique claire, ajoute Mathias Lafont pour le secteur. Il faut une vision cohérente et d'ensemble, pour traduire des objectifs nationaux en objectifs territoriaux ».

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Car la part de marché des véhicules hybrides rechargeables et électriques (23,1 % selon l'Avere-France) a très légèrement diminué depuis fin depuis fin 2023. En cause, notamment : le nouveau bonus écologique, moins avantageux vis à vis des ménages les plus aisés et des entreprises. Un marché fluctuant, mais globalement « positif » depuis cinq ans selon Clément Molizon, délégué général de l'Avere-France. Avec, cette année, de nouvelles perspectives, selon les syndicats professionnels, avec les politiques de leasing social.

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