HRS : la pépite grenobloise qui déboule en Bourse sur un marché explosif

LA CONQUETE HYDROGENE, épisode 5. Sous le feu des projecteurs avec le plan de relance et son volet dédié à l’hydrogène, l’hydrogène ne manque pas de pépites, notamment en région Auvergne Rhône-Alpes, qui concentre auprès de 80 % des entreprises de cette filière d’avenir. Et le grenoblois HRS en est une autre illustration : il clôture ce jeudi son entrée en Bourse avec une semaine d’avance et un objectif de 70 millions dépassé sur Euronext Growth Paris.
La pépite industrielle grenobloise HRS vient de sécuriser un financement de 70 millions sur les marchés financiers pour multiplier ses capacités de production de stations hydrogène, près de Grenoble.
La pépite industrielle grenobloise HRS vient de sécuriser un financement de 70 millions sur les marchés financiers pour multiplier ses capacités de production de stations hydrogène, près de Grenoble. (Crédits : DR/Samuel Moraud)

C'est l'histoire d'une société plutôt industrielle de 34 salariés, axée à l'origine dans la tuyauterie industrielle. HRS, pour Hydrogen-Refueling-Solutions, n'a pas l'image d'une startup classique. Et pourtant, c'est en travaillant aux côtés du groupe Air Liquide que ce grenoblois, créée en 2004, a pris un virage inattendu vers l'hydrogène.

« HRS était à l'origine d'une société d'ingénierie et de tuyauterie industrielle, travaillant dans les environnements critiques du nucléaire, des semiconducteurs, etc. Nous avions été contactés en 2009 par Air Liquide pour fabriquer des stations hydrogène avec eux, car ces stations sont composées de différents tuyaux et d'un savoir-faire lié à la chaudronnerie », résume Philippe Bottu, directeur général délégué de HRS, qui n'est autre qu'un ancien dirigeant d'Air Liquide.

Désormais en plein boom, la filière hydrogène était un prolongement « naturel » pour la société : « la tuyauterie industrielle est une vraie brique technologique des stations hydrogène, qui comprennent près de 200 mètres de tuyauterie. C'est comme cela que nous avons mis le pied à l'étrier ».

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La même année, HRS livrera ainsi 34 stations hydrogène pour le compte de son client Air Liquide. Avec l'idée de développer ce nouveau marché et de devenir un bureau d'études et de développement de sa propre marque. « « A
partir de 2019, nous avons ainsi internalisé l'ensemble des services nécessaires allant jusqu'au design à la certification sous haute pression des stations
 », explique-t-il. Avec l'objectif de proposer, dès 2020, des stations hydrogène sous marque propriétaire.

Un carnet de commandes allant jusqu'à 4,3 millions d'euros

HRS disposerait d'ailleurs désormais d'un carnet de commandes colossal, qui atteindrait les 4,3 millions d'euros... Sans compter une enveloppe de près de 17,4 millions d'euros de négociation en cours.

De quoi nourrir des ambitions de développement rapide, et sauter le pas d'entrée en Bourse fin janvier. Car pour honorer de tels contrats, la pépite doit s'équiper et renforcer son outil : elle prévoit de construire notamment une nouvelle usine de production à côté de son siège de Champs sur Drac à Champagnier, deux communes proches de Grenoble (Isère).

« Notre atelier a aujourd'hui une capacité de soudure à l'assemblage de 4.000 m², pour une production annuelle de 60 stations. Et avec notre nouveau centre d'essai, nous pourrons aller jusqu'à 120 stations produites annuellement », affirme Philippe Bottu. Et ce, pour un prix moyen unité de 1,5 millions d'euros à l'achat par unité produite...

70 millions (et plus) sécurisés en quelques jours

C'est pourquoi la société a choisi d'entrer, fin janvier, sur les marchés financiers avec un objectif de récolter jusqu'à 70 millions d'euros. Et une semaine avant sa clôture prévue à l'origine le 10 février, elle vient d'annoncer ce jeudi soir avoir dépassé son objectif, avec près de 84,6 millions d'euros enregistrés, qui pourraient encore être portés à 97,3 millions d'euros selon une clause de surallocation, exerçable jusqu'au 8 mars prochain. Cette opération aurait notamment rencontré "le soutien d'investisseurs institutionnels français et internationaux de premier rang", précise HRS, qui ajoute que son fondateur, Hassen Rachedi, demeure largement majoritaire (77,9%).

« Ces fonds vont nous permettre de fabriquer et de stocker des sous-ensembles de stations en vue d'être plus rapides, mais également de construire un fablab hydrogène et notre centre d'essais estimé à 15 millions d'euros, qui sera équipé d'un électrolyseur », traduisait quelques jours plus tôt à La Tribune Philippe Bottu.

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Le reste de l'enveloppe permettra d'assurer des recrutements alimentant cette croissance, et d'envisager de futures croissances externes sur des briques technologiques clés pour le développement. Mais aussi de financer le déploiement d'un réseau de distributeurs à l'étranger, puisque le fabricant de stations isérois souhaite se lancer dès 2022 sur le marché européen, puis aux États-Unis à compter de l'année suivante.

« Notre entrée en Bourse était une bonne stratégie en vue d'assurer une certaine transparence et un audit des comptes externes. Cela nous permet également de réserver 2 % des actions aux salariés de l'entreprise, afin de fidéliser les talents et de partager notre stratégie avec l'équipe », ajoute Philippe Bottu.

Un potentiel de croissance exponentiel

« Le potentiel de ce marché est exponentiel, car les usages de l'hydrogène sont à la fois du côté de la décarbonation des transports, mais également de l'industrie, pour laquelle l'hydrogène permettrait de transformer les rejets de CO2 en méthane, énergie qui serait ensuite réinjectée dans les productions selon un cycle vertueux ». Un objectif qui raisonne particulièrement avec la loi Climat et les objectifs de réduction des émissions de GES avancés par l'Accord de Paris.

A ce titre, HRS travaille avec Michelin sur le projet Hygo (rassemblant aussi Engie et Morbihan Énergies) visant à décarboner son processus industriel. Il entrevoit également des débouchés dans le domaine du stockage des ENR, jusqu'ici difficile à assurer par d'autres technologies.

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« On estime que la part de l'hydrogène au sein du mix énergétique doit passer de 2 à 15 % sur les 30 prochaines années en Europe. Et on dénombre, au total, près de 35 milliards d'investissements annoncés en Europe, rien qu'au cours des six derniers mois », rapporte Philippe Bottu.

De quoi passer d'environ 180 stations hydrogène implantées à l'heure actuelle en Europe (dont une quarantaine en France), à près de 15.000 stations d'ici 2040, selon les plans annoncés par les différents états et acteurs de la filière, évalue-t-il.

Le grenoblois a d'ailleurs déjà séduit deux grands comptes comme Michelin ou Ikea, qui ont installé une station au sein de leurs établissements, ainsi que les taxis Hype à Paris, qui se sont également équipés de deux stations.

Le grenoblois vient de signer par ailleurs un partenariat avec le groupe Engie, en vue de collaborer à une quinzaine de projets, ensemble, d'ici 2025. Soit autant de nouvelles stations potentielles à livrer, voir même plus, en fonction de la typologie des sites impliqués. HRS fait également partie du groupement ZEV, qui lui a attribué la livraison de trois nouvelles stations d'ici 2023 à travers la société Hympulsion, et regarde de près la stratégie du groupe Total, qui s'intéresse lui aussi à l'hydrogène, avec un potentiel de conversion de tout ou partie de son réseau de 3.700 stations.

« Nous n'avons pas encore démarré réellement la prospection, c'est un marché qui peut aller très vite », glisse le dg. D'ailleurs, la pépite industrielle estime qu'elle devrait être ne mesure de multiplier son chiffre d'affaires annuel par huit d'ici 2025, pour atteindre 85 millions (contre 10 millions d'euros projetés cette année).

La montée en puissance presse donc : c'est pourquoi le centre d'essais de HRS devrait sortir de terre d'ici la fin de l'année, pour une mise en service prévue d'ici la mi-2023, le temps d'obtenir les autorisations nécessaires à son démarrage.

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Commentaire 1
à écrit le 05/02/2021 à 9:04
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Bonjour, Ils ont été contactés en 2009 par Air Liquide, pas 2019. La société a 11 années d’expérience dans les stations hydrogène. Merci de corriger

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