Numérique : en Auvergne-Rhône-Alpes, les logiciels par abonnement poursuivent leur dynamique

Les logiciels par abonnement, s'appuyant sur un modèle « Software as a service » (SaaS), ou « logiciel en tant que service », se sont à nouveau particulièrement démarqués en 2022 dans les carnets de commande des 33 éditeurs de la région Auvergne-Rhône-Alpes sondés par le cabinet de conseil EY. Ceux-ci comptent désormais pour 60 % de leurs chiffres d'affaires, soit l'aboutissement d'une « bascule ».
En trois ans, la part du chiffre d'affaires moyen réalisé en SaaS par 33 sociétés éditrices de logiciels en Auvergne-Rhône-Alpes est passée de 47 % (en 2020) à 60 % (en 2022).
En trois ans, la part du chiffre d'affaires moyen réalisé en SaaS par 33 sociétés éditrices de logiciels en Auvergne-Rhône-Alpes est passée de 47 % (en 2020) à 60 % (en 2022). (Crédits : DR)

Les éditeurs de logiciels de la région Auvergne-Rhône-Alpes sont-ils arrivés en haut de la vague du modèle par abonnement en SaaS (Software-as-a-service) ? C'est, en creux, l'une des questions soulevées par le cabinet de conseil EY, qui a publié en décembre dernier son 13e panorama des 250 entreprises du secteur en France, dont 33 ont été sondées en Auvergne-Rhône-Alpes.

Car l'année 2022 a marqué « la bascule » du chiffre d'affaires des entreprises vers ce marché : dans la région, près de 60 % de celui-ci, qui s'est élevé à 2,7 milliards d'euros, était fléché vers l'édition de logiciels SaaS, ou « logiciel en tant que service », contre 55 % en 2021 et 47 % en 2020. Soit le « franchissement du seuil historique » de la part des revenus selon EY, qui en dit long sur les pratiques des clients, en quête de souplesse dans un marché dynamique où la concurrence se fait chaque année plus rude. Mais aussi sur la croissance des entreprises du secteur (+12,8 % entre 2021 et 2022), désormais soutenue par une activité solide et récurrente.

Le numérique représente 3 % de l'emploi privé en Auvergne-Rhône-Alpes

Ce changement de paradigme, qui s'est fait progressivement, accompagne en effet la structuration des sociétés éditrices de logiciels selon Boris Mathieux, délégué éditeurs et plateformes au sein de l'organisation professionnelle Numeum :

« C'est un mouvement qui a été entamé il y a un peu plus de quinze ans. Certains diraient qu'il est déjà derrière nous. Mais ce n'est pas tout à fait le cas. Désormais, depuis 2022, la majorité du chiffre d'affaires des éditeurs se fait en SaaS. Cela permet aussi la robustesse de ce secteur, avec un chiffre d'affaires récurrent qui a permis de bien encaisser la période de crise sanitaire ».

D'autant plus en Auvergne-Rhône-Alpes, qui possède quelques points d'avance sur la moyenne nationale (56 % du chiffre d'affaires en SaaS), notamment grâce à « l'anticipation » de son écosystème et de ses poids lourds : « Nous avons des champions dans le domaine de l'édition logicielle, ajoute en effet Daniel Baudry, délégué général du cluster d'entreprises du numérique Digital League (plus de 450 adhérents, le 2e de France), basé en Auvergne-Rhône-Alpes. Le grand public ne les connaît peut-être pas, mais ce sont des entreprises très solides comme Esker, Cegid, Hardis Group, ou encore Akanea ».

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Un chiffre d'affaires en SaaS, porté par de grands acteurs

Pour autant, gare à un biais d'interprétation : « l'entreprise Esker pèse beaucoup dans les 2,7 milliards d'euros de chiffre d'affaires en Auvergne-Rhône-Alpes », pointe Hélène Thibert, senior manager audit pour EY, à Lyon. En effet, près de 83 % du chiffre d'affaires réalisé par la société lyonnaise au premier semestre 2023 venait du SaaS.

Spécialisée dans la conception et le développement de logiciels administratifs, Esker s'oriente notamment vers la facturation électronique des entreprises, qui pourrait devenir obligatoire, mais aussi l'affacturage inversé, ou encore la comptabilité carbone.

« Nous avons aussi un second acteur, Cegid, qui a réalisé une transition très rapide vers le SaaS sur les trois dernières années, ajoute Hélène Thibert. Cela explique aussi la forte progression de la part du SaaS dans le chiffre d'affaires régional, passé de 47 % du chiffre d'affaires moyen des entreprises en 2020 à 60 % en 2022 ».

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En effet, d'autres grands acteurs régionaux du secteur numérique ne font pas encore appel à ce genre de modèle. C'est notamment le cas de Stormshield, filiale d'Airbus Defense & Space Cyber, spécialisée en cybersécurité, qui entame seulement son virage vers des solutions SaaS. Noël Chazotte, manager produits, détaille les raisons structurelles expliquant aussi l'inertie du phénomène : « Il n'est pas évident d'amener la stratégie d'entreprise vers le SaaS. Nous avons en effet des clients étatiques, importants, qui privilégient un travail sur site. Nous sommes nativement ancrés sur site. Aujourd'hui, nous avons amorcé un mouvement en interne et aurons des offres SaaS. Mais c'est presque anachronique ».

Pour autant, les perspectives restent ouvertes, selon Daniel Baudry, qui donne quelques chiffres : les entreprises du numérique, éditrices de logiciels, représentent 3 % de l'emploi privé en Auvergne-Rhône-Alpes, indique en effet Digital League. De même, elles créent depuis plusieurs années « à peu près 9 % des nouveaux emplois par an », ajoute Daniel Baudry, qui estime qu'il demeure encore de belles marges de croissance en SaaS, notamment à l'international : « Au niveau mondial, le SaaS n'est pas encore tout à fait passé devant les autres activités. Mais cela arrive ».

L'export, un « enjeu encore difficile à relever » selon EY

Si 46 % du chiffre d'affaires des éditeurs de la région AURA est réalisé à l'international, ce chiffre reste « très dépendant de la taille des entreprises », ajoute le cabinet. Aussi, la grande majorité est généré en Europe (hors France), au Moyen-Orient et en Afrique (pour 41 % des 27 sociétés répondantes), tandis que seul 4 % des entreprises disposent de marchés sur le continent Américain, et 1 % en Asie-Pacifique. Le reste, à savoir 54 % du chiffre d'affaires moyen des éditeurs, est réalisé en France.

Pour Cécile Arnaud, directrice du développement international et marketing de Hardis Group, qui possède des filiales aux Pays-Bas, en Espagne, mais aussi en Pologne, la question d'une ouverture vers les Etats-Unis « se pose », mais constitue bien « une autre marche à passer », dans un secteur hyperconcurrentiel.

De même, selon Noël Chazotte, de la société Stormshield (filiale d'Airbus Defense & Space Cyber) : « Nous travaillons notamment avec la Pologne, qui est très friande de contre-propositions européennes aux produits américains. En revanche, nous nous sommes un peu brûlés les ailes en Amérique du Nord. Je pense qu'il faut une forte présence sur place pour développer des marchés, et cela représente un pas important ».

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