« La livraison du dernier kilomètre est un maillon que nous cherchons continuellement à améliorer, confie Jean-Luc Defrance, directeur du centre de services mutualisés systèmes d'information et numérique à la Poste. Nous réfléchissons à des nouveaux services pour satisfaire nos clients finaux : points relais, développement de la consigne automatique ...».
Et depuis 10 ans, l'un de ces axes de réflexion porte sur la « livraison par le moyen aérien », c'est-à-dire, par drone. Un mode de transport qui répond à des situations et surtout des géographies précises, appuie Jean-Luc Defrance puisqu'il vise surtout des « zones sensibles où les trajets, effectués sur des routes parfois dangereuses en hiver, sont longs, pour, au final, livrer peu de colis ».
De la vallée aux villages de montagne
La première expérimentation, réalisée à partir de 2016 avec un drone de la société Atechsys, est menée dans le Var, un terrain qui ne représente aucune complexité particulière et permet à La Poste d'obtenir « la première autorisation de la DGAC (direction générale de l'aviation civile) pour effectuer ce type de vol et surtout traverser une autoroute », pointe Jean-Luc Defrance.
Suite à de premiers résultats encourageants, le logisticien cible des espaces plus escarpés avec le test opérationnel d'une deuxième ligne dans le massif de la Chartreuse (Isère), dès 2019. Et depuis janvier 2024, c'est un peu plus au sud de la métropole grenobloise, dans le massif du Vercors (Isère), que la Poste opère une nouvelle ligne de livraison.
« L'objectif de ces tests est vraiment d'engranger de l'expérience sur la gestion de l'interface avec les chauffeurs, les assistants, etc » , insiste Jean-Luc Defrance. C'est exactement ce qu'ont permis les deux premières lignes, qui cumulent 2.400 vols pour 40.000 kilomètres parcourus, soit l'équivalent d'un tour du monde.
Fortes des résultats obtenues, les deux entités que sont La Poste et Atechsys, ont pu augmenter la capacité de transport du drone, pour atteindre les 10 kilos, sur une distance de 10 kilomètres, mais aussi rendre la solution simple d'usage pour les chauffeurs.
Un service.« sans couture »
L'objectif est en effet d'intégrer ce service dans la tournée classique du chauffeur.
« Notre chauffeur va avoir 200 colis à livrer, mais seulement une vingtaine par drone. Il organisera une tournée mixte, avec un moment d'arrêt au terminal de départ du drone pour l'alimenter et envoyer les colis », développe Jean-Luc Defrance.
« L'assistant du livreur », un nouveau dispositif breveté par le groupe La Poste et Atechsys, est intégré au véhicule de livraison. Ce système permet le déploiement du drone pour le décollage et l'atterrissage en toute sécurité.
Le chauffeur place le colis dans le terminal qui est chargé par un robot interne dans le drone. Ce dernier effectue ensuite son vol de manière autonome et automatique grâce au GPS intégré qu'il possède et atterrit dans un terminal fixe. Ce qui permet à la fois de sécuriser la livraison, mais aussi d'éviter d'éventuelles manipulations du drone.
Chaque vol dure quelques minutes et peut être facilement rechargé, puisqu'il dispose d'une motorisation électrique. Seule contrainte, il doit rester au sol lors d'orage, de vents violents ou de tempête de neige et en dessous d'une température de -5°C. Cette dernière mesure influe, en effet, sur la durée de charge de la batterie.
Les colis sont réceptionnés dans un compartiment les protégeant des intempéries. Ceux-ci sont ensuite récupérés par le gérant du relais poste de Corrençon-en-Vercors, le café Le Carré d'As, afin d'être mis à disposition de chaque destinataire.
Le chauffeur ne s'implique donc pas dans le vol, « la Poste n'étant pas opérateur de drone », rappelle Jean-Luc Defrance. Mais « la législation nous oblige à mettre en place une double ou triple sécurité avec un pilote [de la société Atechsys, ndlr] qui a un retour visuel du vol et peut reprendre le contrôle en cas de difficulté.»
Un élargissement du périmètre
L'expérimentation qui a récemment débuté dans le Vercors pourrait s'étendre à d'autres villages.
« A terme, l'ambition est de distribuer quatre autres communes du plateau du Vercors et de livrer en moins d'une heure, au lieu de deux heures par transport routier, soit plus de 65 kilomètres de route de montagne évités », détaille la Poste sur son site.
Deux opérateurs, filiales de GeoPost, pourront utiliser ce service, DPD France et Chronopost, à leur convenance. Les clients ne pourront donc pas choisir eux-mêmes ce type de livraison pour le moment.
Le coût, non communiqué aujourd'hui, ne devrait pas être excessif, assure le directeur général Geopost des SI.
Un drone aux caractéristiques renforcées Suite aux deux premières expérimentations menées dans le Var et le Massif central, le dernier modèle, actuellement utilisé dans le Vercors, voit ses capacités opérationnelles dopées. Son rayon d'action couvre en effet jusqu'à 20 kilomètres (soit environ 40 minutes de vol), pour une charge utile pouvant transporter jusqu'à huit colis (soit 10 kg, contre 2 kg pour les modèles précédents). La masse de l'appareil à vide est estimée à 15 kg, pour une vitesse de croisière atteignant les 40 km/h.
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