A gauche, le match final. Najat Vallaud Belkacem, ou la renaissance du PS par le social et l'emploi

FACE A FACE (2/2). En Auvergne Rhône-Alpes, l’opposition avance en rangs dispersés face à Laurent Wauquiez, notamment à gauche où socialistes et écologistes défendent chacun leur vision. Une forme de « primaire par les urnes » où, de son côté, l’ex-ministre de l’Education PS Najat Vallaud Belkacem se pose comme la principale « challenger » d’un combat frontal avec Laurent Wauquiez, et veut s’appuyer sur le social et l’emploi pour rebâtir une certaine idée du Parti socialiste.
Si le Parti socialiste de 2021 a entamé sa mue en intégrant (définitivement ?) dans son vocabulaire la question écologique, son ADN dirigé envers les questions sociétales demeure.
Si le Parti socialiste de 2021 a entamé sa mue en intégrant (définitivement ?) dans son vocabulaire la question écologique, son ADN dirigé envers les questions sociétales demeure. (Crédits : DR/l'Alternative 2021)

C'est la dernière ligne droite qu'elle préfère. Celle où « le jeu s'ouvre » selon la candidate, où les combats d'idées entre plusieurs visions apparaissent, même si elle regrette l'absence de débats sur les chaînes télévisées, et plus largement la couverture médiatique de ces élections, qu'elle juge « trop faible » au regard de la nature des enjeux. « On n'a pas assez parlé de la manière dont ces élections peuvent changer la vie quotidienne des gens », dixit Najat Vallaud Belkacem. Il faut dire que le manque d'union au sein de la gauche n'a pas aidé l'opposition à se démarquer.

Pour autant, la candidate PS ne s'avoue pas vaincue : bien que donnée désormais 5e des intentions de vote au premier tour (10%), après le candidat sortant LR Laurent Wauquiez, le RN Andrea Kotarac, mais aussi le LREM Bruno Bonnell et même l'écologiste Fabienne Grébert (à un point près, 11%), l'ex-ministre de l'Education savait que le combat était ardu.

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Elle avait même œuvré durant de longues semaines au sein de la gauche pour présenter une liste commune en vue du premier tour. Mais l'union n'aura finalement pas eu lieu, au regret de la candidate, qui se pose aux commandes d'une liste regroupant le Parti Socialiste, le Parti Radical de Gauche et plusieurs mouvements de gauche.

Cependant, elle estime que le combat n'a pas été perdu : « Toute la démarche engagée avant le premier tour, consistant à chercher le rassemblement, a permis une meilleure connaissance réciproque ainsi que des liens installés de bonne tenue », résume-t-elle. En attendant, elle a choisi la voie de l'attaque face au bilan du président sortant LR Laurent Wauquiez.

D'ailleurs, la candidate socialiste n'a pas hésité à se poser comme sa principale « challenger » au cours du premier et seul débat télévisé en AuRA, organisé par France télévisions.

Elle veut encore croire en une bonne étoile pour la liste PS, et plus largement pour la gauche, dont les intentions de vote cumulées (au maximum à 27%) s'affichent pourtant bien en deçà des chiffres enregistrés en 2015 par l'ex-président, Jean-Jacques Queyranne (avec les 36,84% obtenus au second tour face à Laurent Wauquiez, 40%).

« Mais on voit bien que c'est dans la dernière ligne droite que le jeu s'ouvre dans cette longue campagne. Cette dynamique est donc, par conséquent, difficilement mesurable par les sondages, d'autant plus qu'aujourd'hui, il n'y en a plus à quelques jours du premier tour ».

Et d'ajouter : « Mon sentiment étant que l'on a bien plus de chance d'être entendu au sein des trois derniers jours, qu'au cours des trois derniers mois ».

Ne pas oublier la fibre sociale

Depuis le déconfinement, la candidate a d'ailleurs sillonné les rues, terrasses de café ainsi que les marchés, et prévu, comme ses adversaires, des « meetings grand format » qui espèrent ainsi faire changer la « dynamique » de cette campagne.

Pour autant, lorsqu'on lui parle de l'avenir de la gauche, l'ancienne ministre demeure plus prudente, et mesurée : « On me pose souvent cette question, mais je pense que nous sommes tous trop baignés dans le récit des partis politiques. Alors que ce qui devrait guider la réflexion, c'est moins ce qu'on cherche à faire du Parti socialiste, que ce que l'on veut proposer comme réponse aux gens, après une crise sanitaire comme celle-ci, qui a occasionné un grand nombre d'enjeux et de bouleversements ».

Une façon de faire oublier que depuis les dernières présidentielles et législatives, la gauche a multiplié les déconvenues, jusqu'à être grignotée de toutes parts par LREM et LFI ?

« Je pense que la crise a révélé le fait qu'il nous faut apporter des réponses de gauche, et c'est la raison pour laquelle je ne veux pas laisser disparaître progressivement la gauche du paysage. Mais ce sont ces réponses qu'il faut pousser, plutôt qu'une idée même d'un parti », ajoute Najat Vallaud Belkacem.

Car si le Parti socialiste de 2021 a intégré dans son vocabulaire la question écologique, son ADN dirigé envers les questions sociétales demeure.

« Car après avoir traversé un an et demi de fragilisation extrême surtout avec les plans industriels économiques et sociétaux, on ne peut pas oublier que l'on a vraiment besoin d'un service public fort, comprenant la santé, et il est nécessaire aujourd'hui de traduire cela en actes. Et la Région est un espace pour le faire, afin de mieux protéger les gens et d'instaurer plus de solidarité, en préparant l'avenir ».

Le social, par le retour à l'emploi et la formation

Et dans son programme, la candidate socialiste veut notamment se saisir de la question des déserts médicaux, mais aussi et surtout du retour à l'emploi. Et notamment de l'emploi des jeunes, dont elle veut faire un marqueur de sa vision, avec l'accompagnement de 500.000 jeunes à l'échelle du mandat.

« La question du chômage des jeunes de 18 à 30 ans, qui a significativement augmenté à + 9 % sur la dernière année sur notre territoire, nous préoccupe. Nous souhaitons que la Région garantisse l'accès au premier emploi à tous les jeunes qui n'arrivent pas à en trouver seuls, en utilisant un accompagnement renforcé, et lorsque cela est nécessaire l'accès à la formation professionnelle qualifiante ou à des formations flash, ainsi que la prise en charge du transport ou du logement de ces jeunes, ou de la période d'essai pour une entreprise dont le carnet de commandes est incertain, afin de débloquer la conclusion d'un premier contrat ».

Et ce, en multipliant par cinq le nombre de places en formation professionnelle pour atteindre les 500.000 entrées en formation sur les six années à venir.

Bien que ces questions soient en premier lieu du ressort de Pôle Emploi, la candidate estime que la Région doit se placer comme le chef de file sur ces sujets, « en raison de sa compétence économique, qui lui permet de le lier au soutien de certaines filières où il faut investir comme les énergies renouvelables », mais aussi de « sa fine connaissance du territoire ».

Du côté des entreprises, elle propose l'instauration d'un fonds d'investissement régional doté d'un milliard d'euros (une proposition qui vient concurrencer Laurent Wauquiez, qui porte une volonté similaire) et qui serait chargé de venir en appui aux entreprises de tous secteurs, notamment sous la forme d'une prise de participation en capital.

« Car les entreprises aujourd'hui n'ont pas besoin de prêts ou d'avances remboursables, mais plutôt de fonds qui investissent directement en capital, abondé à la fois par la Région, mais également par des capitaux privés et bancaires ».

Et d'ajouter qu'évidemment, se posera la question que ces mesures s'accompagnent « pas tant d'une forme de conditionnalité au sens propre, mais d'un accompagnement des entreprises vers une production plus soucieuse de leur impact environnemental et sociétal ».

Une volonté d'équité territoriale sur les transports et le numérique

Sa liste annonce par ailleurs un « ambitieux plan pour le transport ferroviaire » ainsi que l'accélération des projets de RER métropolitain pour les villes de Lyon, Grenoble et Chambéry, mais aussi l'amélioration de certaines liaisons TER comme Clermont-Ferrand Lyon ou Montluçon-Lyon.

« Evidemment, nous sommes favorables à la mise en place des accès de Lyon-Turin car cela fait partie d'une logique de renforcement du trafic voyageur pouvons ensuite rayonner sur les réseaux de Lyon, Grenoble, Chambéry, et Annecy », confirme Najat Vallaud Belkacem.

La candidate PS est par ailleurs favorable à l'instauration d'une tarification sociale, voire même d'une gratuité pour les plus précaires, des transports en commun, avec l'objectif de « gommer » les inégalités territoriales pouvant être observées entre les différentes politiques départementales. Ou encore d'une multiplication par dix du budget associatif, qui passerait ainsi de 15 à 150 millions d'euros par an, afin de s'appuyer sur cette compétence partagée par la Région pour contribuer à la lutte contre différentes formes de précarité.

Elle souhaite également que la Région s'engage concernant la couverture des dernières zones blanches qui demeurent à l'échelle régionale, en vue de « pouvoir télétravailler ou même passer un coup de fil ». Tout en souhaitant ne pas opposer cette question avec celle du déploiement de la 5 G, qu'elle juge utile pour certaines applications du médical, de l'industrie ou du numérique.

« On peut très bien avancer sur ce dossier en prenant les précautions nécessaires, et en même temps assurer une bonne couverture numérique de notre territoire ».

Une différence de focus avec EELV dans le « gros » du trait

Finalement, qu'est-ce qui distingue la candidate PS de sa rivale écologiste, avec laquelle elle confirme d'ailleurs que les relations sont, pour cette campagne, bien meilleures que les précédentes ?

« Je pense que ce premier tour aura été l'occasion malgré tout de développer ce qui fait pour chacun notre identité et nos priorités respectives. De mon côté, je dirais que c'est vraiment la focale sur l'emploi et le social, et notamment la notion de protection et de sécurité multidimensionnelle qui en découle et que nous proposons aux habitants ».

Car si la socialiste reconnaît que les Français ont désormais la volonté de se préoccuper des questions environnementales, ils ont également besoin d'avoir accès à des notions de base comme celle d'un logement.

« Je ne suis pas favorable à limiter la construction, au motif qu'il faut avant tout dédensifier, car il me paraît primordial qu'une famille soit bien logée sur une construction thermiquement soutenable », argumente-t-elle.

Même chose du côté des transports, où Najat Vallaud Belkacem assume en effet sa position d'investir à la fois une enveloppe de 500 millions d'euros dans le vélo, mais également de trouver pour chaque territoire les meilleures solutions techniques, tout en soulignant : « On sait très bien que sur certains territoires très enclavés ou éloignés, il n'existe pas de solution de transport collectif. Il ne me paraît donc pas absurde que la Région soutienne à ces endroits des projets de route, comme nous avions déjà pu le faire par le passé en Ardèche. Cela n'empêche pas de réponse agiles et nouvelles comme le fait de proposer du transport à la demande sur certains territoires ».

Des différences de sensibilités qu'une candidature commune de la gauche devra donc prendre en compte dès lundi, tout en incluant, un troisième joueur, qui est la liste commune France Insoumise-Parti Communiste, conduite par la députée ligérienne Cécile Cukierman.

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Commentaires 6
à écrit le 19/06/2021 à 4:24
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Potiche socialiste. Rien a en esperer.

à écrit le 18/06/2021 à 17:21
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' l’ex-ministre de l’Education PS Najat Vallaud Belkacem' Mais aussi comme bien d'autre une Young Leaders ,la fabrique des élites pro-américaines.

à écrit le 18/06/2021 à 14:29
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Nous nous dirigeons vers un monde de sciences,de technologies,de réseaux, d'écologie . Il faut que nos représentants et décisionnaires ,soient de plus en plus issues de ces milieux pour mieux appréhender le monde de demain . Le système politique est...

à écrit le 18/06/2021 à 14:26
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Bref! La féodalité est de retour, l'UE se construit sur de l'ancien!

à écrit le 18/06/2021 à 12:30
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La Najat n'est là qu'au titre de l'égalité des chances. Elle est toxique, nulle et dangereuse si bien que pour l'égalité de ses chances ce sont nos enfants qui ont eu de la malchance du fait des décisions scélérates qu'elle a prise quand elle était e...

le 19/06/2021 à 22:03
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"le secteur privé et la vraie vie" Incompétence, emplois fictifs, bêtise, piston, corruption, réseaux, mafia... Ah ben oui c'est vrai c'est bien ça la vie actuelle ! Bien vu !

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