Quel impact des perfluorés sur la population ? La Métropole de Lyon veut lancer une étude pour comprendre

Dans l'eau, l'air, le sol, les poissons, les œufs, le lait maternel... Dans le Sud de Lyon, les perfluorés (polluant éternel cancérigène, utilisé dans l'industrie) semblent être partout. Depuis les révélations du reportage Vert de Rage en mai dernier, les analyses s'enchaînent. Hier, la Métropole de Lyon a annoncé qu'elle allait financer une vaste étude de quatre ans pour comprendre l'impact sur la population et l'environnement.
(Crédits : DR Métropole de Lyon)

Tout a commencé le 12 mai dernier, le reportage « Vert de rage » de  France 2 réalisé en collaboration avec Envoyé spécial avait révélé la présence de perfluorés (PFAS) dans les environs de plusieurs sites industriels de Pierre-Bénite (Rhône) dans l'eau, l'air et le sol.

Depuis, la Préfecture du Rhône, des associations environnementales et de riverains, les collectivités, l'ARS (agence régionale de santé), et médias locaux se sont emparés du dossier et n'ont cessé de démontrer la concentration anormalement élevée de ces polluants éternels, cancérigènes et potentiellement perturbateurs endocriniens.

Une étude de quatre ans

Le 16 mars, la Métropole de Lyon a annoncé qu'elle allait apporter sa pierre à l'édifice en lançant et finançant une étude sur quatre ans, menée par l'Institut scientifique éco- citoyen de Fos-sur-Mer. « En complément du suivi engagé par la DREAL (Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement) et l'ARS sur la pollution aux PFAS, la Métropole de Lyon souhaite mettre en place une stratégie d'amélioration de la connaissance, de suivi de la pollution en PFAS, de prévention et de protection de la population », explique la collectivité, dans un communiqué.

Il s'agit donc de mener une étude environnementale et une étude sanitaire pour « mieux comprendre les causes et les impacts de ces pollutions sur l'environnement et les populations » et de faire « connaître les niveaux d'imprégnation des populations exposées et mieux comprendre la relation entre l'environnement et l'organisme humain ». L'Institut de Fos-sur-Mer pourra s'appuyer sur les associations locales mais aussi sur des professionnels de la santé, comme le Canceropôle Lyon Auvergne-Rhône-Alpes (CLARA).

Cette décision reste néanmoins soumise au vote du prochain conseil métropolitain, le 27 mars prochain.

La Métropole de Lyon, qui a récupéré la gestion de l'eau en régie publique en début d'année, assure aussi qu'elle va travailler plus généralement sur les questions d'assainissement, d'accompagnement des industriels pour limiter leurs rejets et de communication avec agriculteurs ainsi qu'avec les communes et les habitants concernés par ces pollutions.

 « Nous travaillons aussi avec les syndicats des eaux des territoires voisins pour étudier des solutions de traitement et d'interconnexions possibles entre le réseau du Syndicat Rhône-Sud (qui concerne dans la Métropole les communes de Givors, Grigny, Solaize) impacté par des taux importants de PFAS et le champ captant de Crépieux-Charmy afin de sécuriser ainsi l'ensemble de nos réseaux d'eau potable », affirme Anne Grosperrin, vice-présidente au cycle de l'eau, dans un communiqué.

 Une série d'analyses depuis mai dernier

« Vert de Rage » a dévoilé que, dans l'air, le taux de PFOA (un perfluoré de la famille des PFAS) serait ainsi 8 fois supérieur aux valeurs de l'ONU, tandis que dans les sols, ils dépasseraient de 83 fois les normes néerlandaises, en l'absence de référence français. La moyenne de PFAS présente dans le lait maternel s'avère également deux fois plus importante que les taux constatés au Pays-Bas (160,7 nanogrammes par litre et par kilo, contre 70,7 ng/kg).

En juin, l'ONG "Notre Affaire à Tous" a dévoilé ses propres travaux montrant que, dans la Vallée de la Chimie, les industriels Arkema et Elkem Silicones dépassent les seuils de pollution autorisés par la réglementation des Installation classée pour la protection de l'environnement (ICPE). L'association a attaqué les deux industriels en justice.

En septembre, la préfecture du Rhône a pris deux arrêtés pour réaliser des analyses quotidiennes sur les sites d'Arkema et de Daikin, sommés d'arrêter d'utiliser des PFAS d'ici fin 2024.

Début octobre, une étude de la DREAL et de la Fédération de Pêche du Rhône révélait que tous les poissons du Rhône et du Garon en aval de Pierre-Bénite contenaient des PFAS. Dans la foulée, l'ARS (agence régionale de santé) recommandait de ne pas les consommer.

Puis, en janvier de cette année, une nouvelle série d'analyses, réalisées par la Préfecture, sur des œufs prélevés dans les poulaillers de particuliers résidant sur les communes de Pierre-Bénite et d'Oullins, relève à nouveau des seuils dépassant jusqu'à 13 fois (soit 1,70 μg/kg de poids à l'état frais) la valeur réglementaire consommable à Pierre-Bénite et même jusqu'à 16 fois à Oullins (avec un taux de perfluorés qui atteint 28,30 μg/kg). L'ARS conseillait donc de ne pas consommer ces œufs et la chair des volailles sur ces deux communes.

Malgré la succession d'alertes émanant des scientifiques concernant leurs effets (cancers, perturbations du système endocrinien, augmentation du taux de cholestérol, baisse de la fertilité ou de l'immunité, etc), il n'existe toujours pas à ce jour de réglementation précise en France pour les interdire. Un premier règlement européen, pour réguler la présence de 20 PFAS au sein de l'eau potable, n'entrera en vigueur qu'en 2026.

Par ailleurs, le 10 mars, l'assemblée plénière du conseil régional a adopté un vœu demandant transparence et action à l'État sur les perfluorés.

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