Résilience énergétique : les SATT et l’Ademe sonnent la mobilisation générale du monde de la recherche

Face à l’urgence climatique et aux enjeux de sobriété énergétique amenés par la guerre en Ukraine, le président de la SATT iséroise Linksium, François Hédé, dévoile en avant-première à La Tribune les ressorts de l'Appel à Manifestation d’Intérêt (A.M.I) conduit par le réseau des 13 SATT nationales et l’Ademe. Objectif : adresser un appel, comme cela a déjà pu être le cas lors du Covid dans le domaine de la santé, à une forme de « mobilisation générale » afin de détecter des solutions technologiques issues de la recherche publique, capables de contribuer à la résilience énergétique avant 2030.
L'ambition de cet appel à manifestation d'intérêt est de croiser les champs de cinq stratégies nationales d'accélération françaises, à savoir la décarbonation de l'industrie, l'hydrogène décarboné, la digitalisation et la décarbonation des mobilités, ainsi que la thématique des villes durables et des bâtiments innovants et enfin les technologies avancées pour les systèmes énergétiques.
L'ambition de cet appel à manifestation d'intérêt est de croiser les champs de cinq stratégies nationales d'accélération françaises, à savoir la décarbonation de l'industrie, l'hydrogène décarboné, la digitalisation et la décarbonation des mobilités, ainsi que la thématique des villes durables et des bâtiments innovants et enfin les technologies avancées pour les systèmes énergétiques. (Crédits : DR)

On l'a vu au cours des dernières semaines, l'enjeu est désormais double pour l'Hexagone sur le plan énergétique et consiste à la fois à sécuriser l'approvisionnement énergétique de la France, tout en accélérant la sortie des énergies fossiles.

Et depuis cette semaine, le réseau des 13 Sociétés d'Accélération du Transfert de Technologies (SATT) s'est également saisi de l'enjeu, et s'apprête à sonner « la mobilisation générale » : car pour François Hédé, président de la SATT iséroise Linksium et co-porteur de l'initiative à l'échelle nationale (aux côtés de la SATT du Nord de la France) qui se confie en avant-première à La Tribune, il était devenu urgent d'agir :

« En plus de l'urgence climatique à laquelle nous faisons face, et des cibles de réduction que l'on s'est fixés concernant notre consommation des énergies fossiles, il y a aussi les engagements que l'on doit aux générations futures et qui nécessitent d'agir dès à présent, sans compter les enjeux de résilience énergétiques amenés par la guerre en Ukraine ».

C'est donc pour accélérer les cycles de transfert des innovations issues de la recherche publique que le réseau des 13 SATT française s'est associé, pour la première fois, à l'Ademe afin de porter un nouvel appel à manifestation d'intérêts (AMI) à destination des chercheurs, communiqué le 30 août. Objectif : appeler à une forme de « mobilisation générale » afin de détecter des solutions technologiques issues de la recherche publique et qui sont capables de contribuer à la résilience énergétique avant 2030.

« Nous ne l'avions pas pensé ainsi à l'origine, mais il est vrai qu'à l'image de la période Covid où le domaine de la santé avait produit ce type d'initiatives, nous avons besoin d'un choc pour réagir et se mettre en ordre de bataille pour engager la résilience énergétique », admet François Hédé.

Croiser les champs des stratégies nationales d'accélération françaises

Car à travers leur réseau établi sur l'ensemble du territoire, les SATT couvrent déjà près de 80% des travaux de la recherche publique française, et ont déjà des projets dans les cartons.

« L'enjeu de cet appel n'est pas tant d'accélérer le temps de la recherche lui-même, mais celui du transfert des technologies qui sont issues de la recherche française afin d'apporter des solutions aux enjeux actuels », souligne le co-porteur de cet AMI.

« Nous n'avons pas encore trouvé la solution miraculeuse pour ne plus produire de GES à l'horizon 2030, mais la prise de conscience est désormais actée et se décline même déjà au sein des programmes et équipements de recherche prioritaires (PEPR), qui sont eux-mêmes complétés par des stratégies nationales d'accélération (pour lesquelles l'Etat mobilise 12,5 milliards d'euros sur 5 ans à travers le PIA, dont une partie dans le cadre du plan de relance, ndlr) », ajoute-t-il.

L'ambition de cet appel à manifestation d'intérêt est bel et bien de croiser les champs de cinq stratégies nationales d'accélération françaises, à savoir la décarbonation de l'industrie, l'hydrogène décarboné, la digitalisation et la décarbonation des mobilités, ainsi que la thématique des villes durables et des bâtiments innovants et enfin les technologies avancées pour les systèmes énergétiques.

Avec, parmi les pistes avancées, la production d'hydrogène par électrolyse, la production de froid ou de chaud par pompe à chaleur ou encore la production d'électricité à partir de biogaz, hydrogène ou par cogénération, mais également le développement voire l'optimisation de procédés de production d'énergies renouvelables (hydrogène décarboné, éolien, photovoltaïque, biogaz...)

« La sobriété énergétique a clairement constitué un virage, non seulement au niveau du gouvernement mais également au sein des laboratoires, où l'on voit de plus en plus de chercheurs qui se demandent comment contribuer et diminuer les émissions de gaz à effet de serre. C'est un enjeu qui se pose désormais dans l'ensemble des filières jusqu'ici généralistes, qui peuvent ainsi orienter leurs travaux vers des pistes capables de contribuer à cet effort », témoigne le patron de la SATT Linksium.

Un objectif national, pour des projets issus des territoires

Si le réseau des SATT ne se fixe pas encore de cibles précises côté chiffres, il espère tout de même être en capacité d'accélérer le développement « de bien plus qu'une dizaine de projets » (soit de facto, plus d'un lauréat pour chaque territoire couvert par une SATT, ndlr). Pour pouvoir candidater, ces projets devront être issus de la recherche publique uniquement et se trouver dans un stade de maturité suffisant en vue de pouvoir initier un accompagnement.

« C'est un appel qui est bien porté à l'échelle nationale, ce qui signifie que même si le recueil et l'étude des dossiers se fera au niveau local, nous prendrons ensuite les meilleurs projets et nous n'hésiterons pas à suggérer des rapprochements ou des synergies entre deux projets qui pourraient se situer sur le même champs, afin d'en accélérer le transfert », souligne le président de Linksium.

Pour autant, la terre d'accueil de Francois Hédé, l'Isère, part déjà elle-même bien positionnée dans cette course puisqu'elle devrait pouvoir compter sur ses propres forces, à savoir celles de « l'Université Grenoble Alpes qui mène des recherches pointues sur les thématiques de la ville durable, des bâtiments innovants, et de la décarbonation des mobilités, du CEA de Grenoble qui a développé un important programme en matière d'hydrogène décarboné, du CNRS qui travaille également sur la question des batteries, ainsi que l'Université de Savoie qui s'est spécialisée dans le domaine du solaire, la décarbonation de l'industrie touristique et l'optimisation des systèmes énergétiques ».

Sans oublier l'INRIA, « qui se spécialise certes, dans le champ du logiciel, mais qui a beaucoup de choses à apporter du côté de l'optimisation de l'industrie et de ses modes de production, avec la gestion des grilles énergétiques ».

Un effet espéré dès les 12 à 24 mois

Côté budget, l'initiative sera financée par la mise en commun du budget de l'ensemble des SATT elles-mêmes et reviendrait à une enveloppe de financement comprise entre 200.000 à 500.000 euros par projet.

Celle-ci prendra la forme, non pas d'une aide financière, mais d'un accompagnement renforcé, reposant sur la conjugaison des programmes de maturation proposés par les SATT et des programmes de recherche de l'Ademe, qui pourrait à son tour s'appuyer également sur les appels à projets qu'elle initie dans le cadre de France 2030 pour accompagner l'industrialisation des technologies.

« Nous avons souhaité nous associer pour la première fois sur cet AMI à l'Ademe, qui est une institution très reconnue et sur laquelle nous allons pouvoir nous appuyer, notamment sur le champ de son expertise économique. Nous allons pouvoir réaliser ensemble la sélection des projets et nous éviter ainsi de partir vers des voies qui ne seraient par exemple pas industrialisables », glisse François Hédé.

Le co-porteur de cet AMI espère que cet appel puisse provoquer un effet rapide, et soit visible dès les 12 à 24 prochains mois. « Le fait que les SATT soient positionnées en aval de la recherche et ne cherchent pas à l'initier, mais à accélérer au contraire des projets déjà mis en œuvre dans des laboratoires, fait que l'on s'attend à pouvoir fournir, à l'échelle nationale, des solutions dans un temps relativement rapide ».

Côté calendrier, un premier webinaire de présentation est déjà prévu le 8 septembre prochain tandis que le dépôt des candidatures est fixé au 15 octobre. Des comités territoriaux de sélection se réuniront ensuite, tandis qu'une annonce des lauréats est prévue en début décembre.

L'objectif affiché étant de pouvoir ensuite enclencher, dès le début d'année, des conventions d'accompagnement de 12 à 30 mois, qui pourraient déboucher ensuite sur « une montée en maturité des projets lauréats dérisqués, qui atteignent non pas un stade d'industrialisation, mais un couple marché-produits qui puisse ensuite être soit transféré à un industriel, soit orienté vers la création d'une startup ».

« Les années du greenwashing sont passées, nous sommes vraiment dans la phase suivante, en direction d'une économie dont les ressorts vont être différents. Tout l'enjeu est désormais de bâtir non pas des gadgets mais des produits high-tech qui sont tous quasiment issus du champs de la deeptech, et qui doivent être compétitifs dès aujourd'hui en prévision d'une économie qui va encore évoluer d'ici 5 à 6 ans. Nous sommes dans un changement total de paradigme », atteste François Hédé.

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Commentaire 1
à écrit le 01/09/2022 à 16:55
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Si la France était à zéro émission de Co2, quel serait l'impact sur le climat de la planète ?

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