Le "béton de bois", cette innovation développée par l'Isérois CCB Greentech pour décarboner la construction

Le groupe Lafarge vient de faire son entrée au capital de la startup iséroise CCB Greentech. Celle-ci a mis au point le premier béton de bois structurel, destiné à la construction. Ce produit, dont elle lance la commercialisation après avoir investi massivement ces derniers mois dans ses capacités de production, doit participer à la décarbonation d'une filière, en recherche de solutions efficaces face aux nouvelles réglementations comme la RE2020.
Dans le béton traditionnel, se trouvent habituellement du ciment, du sable, du gravier et de l'eau. Dans le béton de bois, le bois vient remplacer le gravier et le sable avec un additif secret qui vient asseoir la qualité de ce béton et son intérêt écologique.
Dans le béton traditionnel, se trouvent habituellement du ciment, du sable, du gravier et de l'eau. Dans le béton de bois, le bois vient remplacer le gravier et le sable avec un "additif secret" qui vient asseoir la qualité de ce béton et son intérêt écologique. (Crédits : DR)

Le béton de bois existe depuis plusieurs années. De nombreux murs antibruit, réalisés à partir de ce matériau, sont ainsi installés le long des autoroutes. En revanche, construire des maisons ou des édifices à partir de béton de bois, ça c'est nouveau ! Il s'agit même d'une véritable "innovation de rupture", assure Cédrik Longin, directeur exécutif de l'entreprise iséroise CCB Greentech.

Créée en 2006 sur l'intuition d'un bucheron reconverti avec succès à la scierie (François Cochet) rejoint par un ingénieur Arts et Métiers (Laurent Noca), la startup a mené 15 ans de recherche et développement, déposé dix brevets et déjà fourni les matériaux pour construire une soixantaine de bâtiments (principalement en Auvergne-Rhône-Alpes) afin de valider sa preuve de concept.

Lafarge entre au capital de la start-up

Prête techniquement, CCB Greentech a investi "plusieurs millions" en début d'année, selon les termes volontairement évasifs de son directeur exécutif, dans une nouvelle usine de production, toujours en Isère.

Objectif : accompagner le décollage commercial. L'usine est calibrée pour produire annuellement quelque 1,2 millions de m² de murs ou de dalles. D'autres investissements, massifs, sont déjà au programme de 2022.

Dans cette montée en puissance, l'entreprise est soutenue par Bpifrance ainsi que par le programme France Relance. Elle peut également désormais compter sur le soutien d'un géant du secteur de la construction, le groupe cimentier et bétonnier Lafarge France. Celui-ci a fait son entrée, début novembre, au capital de CCB Greentech.

"Avec de gros investissements devant nous, nous avions besoin de renforcer nos fonds propres, nous avons été approchés par plusieurs groupes européens et français, nous avons choisi Lafarge", précise Cédrik Longin.

Le montant de la prise de participation reste confidentiel mais elle assure une rentrée d'argent conséquente pour l'entreprise tout en maintenant en position majoritaire les associés historiques.

Au-delà du rapprochement capitalistique entre les deux entreprises, des synergies industrielles et commerciales sont annoncées comme l'assure François Petry, directeur général de Lafarge France : "la technologie de CCB Greentech associée à notre savoir-faire offre des synergies enthousiasmantes, que nous avons hâte de développer ensemble pour offrir à nos clients des solutions constructives biosourcées et bas carbone". Lafarge s'engage ainsi, par exemple, à mettre à disposition le savoir-faire technique de ses équipes ainsi que son réseau commercial national.

CCB est donc aujourd'hui fin prête pour commercialiser à grande échelle sa solution de béton de bois. Elle vise d'ici six ans un chiffre d'affaires de 50 millions d'euros pour des constructions jusqu'en R+7, et une cinquantaine de salariés d'ici moins de deux ans.

Un bilan carbone négatif

Quel est le principe du béton de bois de CCB ? Voici la réponse, limpide, de Cédrik Longin, pour une technologie en réalité très complexe :

" Dans du béton traditionnel, se trouvent habituellement du ciment, du sable, du gravier et de l'eau. Dans notre formule, le bois vient remplacer le gravier et le sable".

A ce bois, 90% de la composition totale du produit, est ajouté un additif qui vient asseoir la qualité de ce béton et son intérêt écologique.

" Notre béton est finalement à bilan carbone négatif. Nous utilisons du bois de trituration (bois non qualifié pour la construction, ndlr) issu de forêts de la région AuRA pour l'essentiel et labellisées PEFC. Ces arbres ont emmagasiné du CO2 pendant leur vie. Au lieu d'être relâchés dans l'atmosphère lors de la dégradation de ces bois, les gaz sont au contraire emmagasinés sur le très long terme dans nos bétons, ce qui permet un bilan carbone total négatif".

Un atout de taille pour une filière de la construction désormais soumise à la nouvelle réglementation environnementale RE2020, qui consiste entre autres à diminuer l'impact carbone des bâtiments neufs, en comptabilisant les émissions générées sur l'ensemble de son cycle de vie, de la construction à la déconstruction.

En parallèle de cette décarbonation de la filière construction, le béton de bois de CCB présente d'autres avantages, notamment sa mise en œuvre. Le béton est en effet mis en place dans des panneaux fabriqués en usine. Sur le chantier, l'assemblage des panneaux se fait en quelques heures, limitant ainsi les nuisances pour les riverains et facilitant les opérations de mise en œuvre dans un contexte de pénurie de main d'œuvre.

"Pour l'utilisateur final, notre solution présente également plusieurs atouts : une isolation thermique et acoustique très intéressante et une respirabilité améliorée par rapport aux matériaux traditionnels". Selon Cédrik Longin, le prix final se situe dans les prix marchés, entre construction traditionnelle et construction bois.

Pour le commercialiser, CCB Greentech a bâti son business model sur un process en plusieurs étapes jusqu'au client final : l'entreprise iséroise vend les granulats de bois et licencie son savoir-faire auprès de pré-fabricants, qui se chargent de produire les panneaux à partir de ce béton de bois. Eux-mêmes les commercialisent ensuite auprès des constructeurs.

Exemple régional très récent de schéma : la construction en cours de plusieurs dizaines de logements sociaux à Bonson dans la Loire pour le bailleur Le Toit Forezien, à partir de béton de bois. CCB a vendu son granulat à l'entreprise Préfa du Léman qui a produit les panneaux et les a fournis au constructeur IDM Construction.

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