En pleine conquête, Railcoop veut lever jusqu'à 1 million pour lancer (entre autres) sa ligne Lyon-Bordeaux

Depuis sa création officielle il y a un an et demi, Railcoop n’a pas chômé, et veut franchir un nouveau pas de taille. La première coopérative ferroviaire française vient en effet d’annoncer une levée de fonds citoyenne sur la plateforme européenne LITA.co. Après avoir recueilli à ce jour près de 2,4 millions d'euros, elle se fixe un nouvel objectif allant jusqu'à un million d'euros d'ici la fin juillet. Avec toujours, l'ambition de relier Lyon à Bordeaux dès juin 2022. Dans cette logique, elle mène un tour de France virtuel pour convaincre de futurs investisseurs, en commençant par le Rhône, où elle dispose déjà de 662 sociétaires.
Se saisissant de l'ouverture à la concurrence actée fin 2020, la première coopérative ferroviaire de France Railcoop ambitionne de lancer une première liaison de fret ferroviaire d'ici la fin de l'année, avant d'embarquer, à compter de juin 2022, de premiers passagers entre Bordeaux et Lyon, en desservant également des villes moyennes du centre de la France.
Se saisissant de l'ouverture à la concurrence actée fin 2020, la première coopérative ferroviaire de France Railcoop ambitionne de lancer une première liaison de fret ferroviaire d'ici la fin de l'année, avant d'embarquer, à compter de juin 2022, de premiers passagers entre Bordeaux et Lyon, en desservant également des villes moyennes du centre de la France. (Crédits : DR)

Son projet ambitieux avait fait le buz : ressusciter de « vieilles » liaisons ferroviaires comme la ligne Bordeaux-Lyon (abandonnée par la SNCF en 2014), et plus largement, « désenclaver les territoires ruraux », tout en proposant une alternative plus écologique à la voiture.

A l'origine du projet Railcoop, se trouve en réalité un collectif composé de plusieurs acteurs de l'ESS comme Enercoop, mais aussi du secteur ferroviaire, ainsi que de citoyens, tous originaires du Lot à l'origine. C'est pourquoi la structure avait d'abord choisi de s'installer au sein de la pépinière d'entreprises du Grand-Figeac (Lot), Calfatech.

Le projet a ensuite fait le choix de la coopérative afin d'impliquer à la fois des particuliers, des entreprises et des collectivités. Une première en France pour le secteur du ferroviaire, et même en Europe.

« Notre mission est de développer le mode de transport par train sur tout le territoire. Et pour cela, nous comptons réinvestir nos bénéfices dans cette idée », confiait déjà Nicolas Debaisieux, le directeur général de Railcoop à La Tribune.

Et depuis sa création en novembre 2019, Railcoop a déjà franchi un premier cap puisqu'elle dénombre plus de 8.278 sociétaires issus des quatre coins de l'Hexagone (au 25 juin dernier). Une mobilisation qui lui a déjà permis de récolter capital social de 550.000 euros au démarrage, mais surtout d'atteindre à ce jour les 2,4 millions d'euros en termes de capital souscrit.

Le tout, grâce uniquement pour l'heure à la participation de ses sociétaires, presque tous des personnes physiques ayant acheté une ou plusieurs parts sociales de 100 euros. Ces parts ainsi souscrites viennent d'ailleurs d'obtenir le label Finansol, qui distingue notamment les produits d'épargne solidaire des autres produits d'épargnes.

Répondre à la demande et aller chercher un million d'euros supplémentaire

Si cette somme devrait lui permettre d'obtenir une licence d'entreprise ferroviaire pour le transport de voyageurs, elle ne sera pas suffisante pour lancer son projet de ligne Bordeaux-Lyon, car la coopérative a évalué l'enveloppe nécessaire à cinq millions d'euros.

En attendant, la coopérative vient d'annoncer il y a quelques jours le lancement d'une première grande campagne de financement participatif d'un million d'euros, appelée à se clôturer fin juillet. Pour cela, elle a choisi la plateforme européenne LITA.co, afin de s'ouvrir également aux participations des citoyens ou des entreprises qui souhaiteraient apporter leur pierre à l'édifice. Et ce, à partir d'une participation de 100 euros. Près de 500 nouveaux sociétaires auraient d'ailleurs souscrit à ce nouvel appel.

"Cette nouvelle levée correspond en réalité à une nouvelle étape, car jusqu'ici, nous gérions en direct les prises de participation. Mais face aux très nombreuses demandes, nous avons choisi de nous appuyer sur un partenaire comme Lita pour poursuivre et amplifier la collecte", ajoute désormais à La Tribune Nicolas Debaisieux, directeur général de Railcoop.

Cette somme lui servira à la fois à solidifier son capital social et à engager des discussions avec ses partenaires bancaires en vue de boucler son budget global, mais également à financer l'achat de matériel roulant ainsi que d'aménagements nécessaires.

C'est d'ailleurs pour faire connaître à la fois son projet, mais aussi sa campagne, que son équipe a entamé un tour de France virtuel cette semaine, qui passait bien entendu par le Rhône. Car la capitale des Gaules serait notamment l'un des deux points de départs de son projet de ligne à grande vitesse Lyon-Bordeaux, avec laquelle Railcoop souhaiterait débuter son exploitation, toujours dès juin 2022.

Un projet qui permettrait à la fois de relier plus directement l'est à l'ouest de l'Hexagone en 7 heures 30 de trajet, mais aussi de relier au passage des communes comme Roanne, Saint Germain des Fossé, Gannat, Montluçon, etc... Soit une partie des villes moyennes du Massif central, délaissées jusqu'ici par le maillage du TGV.

La partie située d'ailleurs entre Montluçon-Lyon intéresse d'ailleurs tout particulièrement les voyageurs, abandonnée depuis 2014 faute de rentabilité. Selon une première étude menée avant la Covid, Railcoop avait estimé le potentiel de la ligne Lyon-Bordeaux à 690.000 voyageurs par an, espérant ainsi attirer près de 80% des voyageurs qui prenaient jusqu'ici la voiture.

"Nous avons d'ailleurs lancé une nouvelle étude, plus complète, dont les conclusions devrait être connues à la rentrée. Et l'on sait déjà que selon les estimations réalisées par l'État dans le cadre du rapport sur les Trains d'Équilibre du Territoire (TET), le potentiel des voyageurs inter-régionaux sur cette ligne était estimé plutôt à 900.000 voyageurs par an", confie le dg de Railcoop.

Les collectivités sollicitées, mais...

De quoi susciter par ailleurs une aide de la Région, compte-tenu de sa compétence originelle sur la partie de la desserte intra-régionale ? La question n'a toujours pas été formellement tranchée par le président de Région LR réélu, Laurent Wauquiez.

Car à ce jour, seuls des départements comme l'Allier ou la Creuse font partie des sociétaires de Railcoop, ainsi que des petites et moyennes communes sur sa trajectoire, comme Louroux-de-Bouble (Allier), Montluçon (Allier) ou Libourne (Gironde). Pour l'heure, pas de grande métropole comme Lyon ou Roanne, ni de Régions comme Auvergne Rhône-Alpes ou Nouvelle-Aquitaine. D'ailleurs, près de 80% des 2,4 millions d'euros récoltés sous forme de capital proviennent de prises de participations citoyens.

Cependant, la Région Auvergne Rhône Alpes a proposé son aide au printemps dernier, sous une autre forme, celle de la cession à « un prix très compétitif », de neuf rames bi-caisses automotrices diesel X72500 inscrites au parc SNCF de sa région. Précisant au passage que « ces rames auront besoin d'être rénovées, et pourront l'être grâce au travail des ACC (Ateliers de Construction du Centre), à Clermont-Ferrand ».

Pour Nicolas Debaisieux, il s'agissait là d'un enjeu appelé à devenir rapidement critique pour le développement de l'offre de la coopérative ferroviaire. "Car l'ouverture à la concurrence par l'État n'a pas été pensée dans le cadre d'un possible développement du réseau et à une ouverture en réalité à des petits acteurs comme nous, mais plutôt comme un partage du gâteau de la SNCF entre de gros acteurs existants qui avaient déjà leur propre matériel", regrette-t-il.

"Il n'existe pas de dispositif d'aide à l'investissement dans le matériel ferroviaire à ce jour, comme on peut en voir dans d'autres secteurs".

Résultat ? Si les rames neuves ou d'occasion font figure de denrée rare sur le marché français, des discussions sont en cours avec la Région AURA et devraient déboucher sur l'achat de huit rames d'occasion par Railcoop. Un nombre qui lui permettrait d'assurer l'exploitation complète de la ligne Lyon-Bordeaux dès juin 2022, "et même d'avoir un peu de réserve", précise son dg, qui note toutefois que pour la suite, la question demeurera un enjeu en vue du développement de nouvelles lignes.

Près de 10 projets de ligne dans le viseur de Railcoop

Depuis début juin, on sait même que l'équipe de Railcoop étudierait au total 10 projets de création de lignes, qu'elle a soumises pour information à l'Autorité de Régulation des Transports (ART).

Plusieurs d'entre elles concernant la Région AURA : soit des liaisons Grenoble/Thionville et Saint-Etienne/Thionville, mais aussi Strasbourg/Clermont Ferrand ou encore Annecy/Marseille. D'autres projets à l'échelle de l'Hexagone sont également mentionnés, comme l'axe Toulouse/Caen, Lille/Nantes, Brest/Bordeaux ou encore le Croisic/Mulhouse/Bâle.

Elles pourraient être opérées progressivement, sur une période s'échelonnant entre 2023 et 2026 en fonction des conclusions attendues par l'ART ainsi que de l'affinage et la priorisation des projets par les sociétaires eux-mêmes.

Pour autant, la coopérative insiste sur le fait que ces projets ne visent pas à s'inscrire directement en concurrence frontale avec la SNCF : « Notre objectif n'est pas d'aller sur des lignes subventionnées mais plutôt sur des marchés viables pour réinvestir les bénéfices par la suite, c'est tout l'intérêt de la coopérative. Nous voulons récupérer des marchés inexploités et donc laissés à la voiture pour le moment », affiche déjà le directeur général.

D'ailleurs, Railcoop a déjà calculé que pour assurer un modèle économique rentable reposant principalement sur la vente des billets, elle aurait notamment besoin de commercialiser ses billets aux alentours de 38 euros pour arriver à un équilibre financier. Même si dans les faits, ce tarif est encore discuté et pourrait faire l'objet de réductions et autres modulations de tarifs à l'égard de certains publics, comme ses sociétaires.

La coopérative veut d'ailleurs faire ses premiers pas dans le concret des opérations dès novembre prochain, mais en commençant d'abord par le fret. Elle a ainsi annoncé le lancement d'un service de transport de marchandises entre Figeac et Toulouse-Saint Jory, après lancement des opérations de recrutement de ses conducteurs et opérateurs en juin dernier.

Et pour cause : seulement 500.000 euros de capital seraient nécessaires pour ce type de licence, dont elle a déjà obtenu l'autorisation d'exploitation. Avec, dans un premier temps, un modèle envisagé plutôt vers la location du matériel roulant sur ce volet.

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