Comment Gérard Collomb a marqué Lyon de son empreinte

Gérard Collomb, ancien maire de Lyon de 2001 à 2017, puis de 2018 à 2020, est décédé samedi 25 novembre, à l'âge de 76 ans. Pendant ses mandats, il a marqué fortement la ville de son empreinte. Maire bâtisseur, il a été à l'origine de plusieurs grandes réalisations urbanistiques : le développement de la fameuse « skyline lyonnaise » à la Part-Dieu, de l'écoquartier Confluence, mais aussi la réhabilitation des berges du Rhône et le déploiement des premiers vélos en libre-service.
Gérard Collomb, ancien maire de Lyon, de sa Métropole et ministre de l'Intérieur en 2017, est décédé samedi 25 novembre 2023, à l'âge de 76 ans.
Gérard Collomb, ancien maire de Lyon, de sa Métropole et ministre de l'Intérieur en 2017, est décédé samedi 25 novembre 2023, à l'âge de 76 ans. (Crédits : Pascal Rossignol)

Gérard Collomb s'en est allé samedi dernier et les Lyonnais sont en deuil. Le cercueil de l'ancien maire, indissociable de Lyon, est exposé depuis ce lundi midi au sein de l'hôtel de ville où l'édile a exercé pendant presque vingt années non consécutives, de 2001 à 2017, puis de 2018 à 2020 - il était entre temps ministre de l'Intérieur auprès du gouvernement d'Edouard Philippe. Ses obsèques se dérouleront mercredi 29 novembre, à 11 heures, en la cathédrale Saint-Jean, au cœur du quartier historique du Vieux-Lyon (5e arrondissement). Le Président de la République Emmanuel Macron sera présent, ainsi que son prédécesseur François Hollande.

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L'élu PS, agrégé de lettres classiques, a longtemps bataillé dans l'opposition avant d'incarner sa ville. Puis de connaître une fin de parcours délicate marquée par sa défaite aux municipales de 2020.

« Cette ville, j'ai mis vingt ans à la conquérir, vingt ans à la transformer, on ne la quitte pas comme ça », déclarait-il en 2020 pendant cette campagne électorale marquée par son alliance avec la droite entre les deux tours. En s'effaçant derrière le candidat LR à la métropole, il évoquait à la fois « un déchirement » et « une libération ».

Depuis, son successeur écologiste, Grégory Doucet, a pris la suite de celui qui était notamment surnommé « le baron ». Instigateur et premier président de la Métropole de Lyon en 2015, Gérard Collomb a en effet marqué la ville et l'agglomération du Rhône par son implication dans l'ouverture économique et culturelle de la capitale des Gaules. Il « est et restera intimement lié à l'histoire de Lyon », a ainsi déclaré samedi soir Bruno Bernard, actuel président de la Métropole. Pour Georges Képénékian, son premier adjoint à partir de 2014, « Gérard a dédié sa vie et son action à Lyon qu'il aimait tant. Exigeant et sensible aux autres, avec son énergie, sa vision et sa passion de notre cité, il a transformé la ville ». A commencer par de grands projets urbanistiques, lui qui portait l'ambition et le rayonnement d'une ville, au-delà des frontières.

« Nous perdons un grand développeur de sa ville, un visionnaire, qui a su fédérer et rapprocher public et privé pour faire de Lyon une grande Métropole. Gérard Collomb fut un Maire bâtisseur dans toute la noblesse du terme, proche du terrain et de tous les acteurs de la construction, du dirigeant d'entreprise au compagnon qu'il croisait sur un chantier », déclare de son côté déclaré Philippe Layec, le Président de la Fédération des Promoteurs Immobiliers de la Région Lyonnaise.

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Berges du Rhône, Vélov' : le réveil d'une ville

Le socialiste a pris ses fonctions d'édile après trente années dans les rangs de l'opposition. Le temps de mûrir sa place dans l'écosystème lyonnais. « N'en déplaise à ce pauvre Gérard Collomb, il ne sera jamais maire », lui avait en effet lancé Michel Noir (maire entre 1989 et 1995), lors d'un débat télévisé en 1983. L'intéressé fulmine : « ça va venir ». Battu cette année-là, puis en 1989 et 1995, il parvient à ses fins six ans plus tard, lorsque le centriste Raymond Barre lui apporte son soutien pour contrer le très droitier Charles Millon.

Il entre ainsi dans la bataille en 2001 avec, comme fer de lance, une nouvelle vision urbanistique de la ville. A commencer par les berges du Rhône. Ce plan de rénovation et de végétalisation des ces anciens parking (2.000 places en 2000), consistant en des quais accessibles aux piétons, rendus aux Lyonnais, a été l'un de ses premiers actes en direction d'une réouverture de la ville vers son fleuve. Projet décliné ensuite le long des quais de la Saône.

« Le vrai mouvement déclenchant le réaménagement des berges est à mettre au compte de Gérard Collomb, maire de Lyon depuis 2001 et président du Grand Lyon. Ancrées dans les grands projets de rénovation de la ville de Lyon, les berges apparaissent comme un élément fondamental et stratégique aux yeux de Collomb afin de « disposer d'un espace de liberté, retrouver un équilibre entre ville et nature, renouer le contact avec le fleuve... », notait en 2007 l'Institut d'urbanisme de Lyon, en précisant que « ce projet est stratégique pour l'image de la ville, mais s'inscrit également de manière précise dans le mandat de Gérard Collomb puisque le projet doit se finir en 2006, quelques mois avant les élections municipales ».

Et d'ajouter : « Les grandes lignes sont une réappropriation des berges par les Lyonnais, la création d'un lieu de détente et de loisir, la suppression des places de stationnement, la réduction de l'utilisation de la voiture et la participation à une embellie générale de la ville de Lyon afin de rayonner internationalement (les réaménagements se situeront entre des lieux économiquement importants, comme la Cité Internationale et Confluence) ».

Dans le même esprit, Lyon a été la première ville française dotée de vélos en libre service, dès 2005 : les Vélov', opérés par la société Jean-Claude Decaux grâce à un modèle économique soutenu par les revenus publicitaires. L'esprit « libre » de la démarche a tout de suite pris : le service, alors tout à fait émergent en France - avant les Vélib' parisiens - comptait 50.000 abonnés en moins d'un an. Les Lyonnais se sont appropriés ces vélos rouges, marqueurs de son premier mandat, tourné vers l'ouverture de la troisième ville de France.

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L'apogée des années 2010

Aux élections municipales de 2008 et de 2014, Gérard Collomb triomphe. Trop, selon certains qui le jugent efficace mais autocrate, parfois chaleureux mais souvent cassant. Toujours plus à droite, aussi, raillent ses détracteurs. Lui se dit alors « social-réformiste ».

C'est dans cet esprit qu'il participe à la conception et à la réalisation du nouveau Confluence, à la jonction entre Rhône et Saône, dès le début des années 2000. « Son projet le plus audacieux », dépeint aujourd'hui Bruno Bernard. Un projet de vingt ans, où les friches industrielles laissent place aux logements, aux institutions et aux implantations secondaires comme tertiaires : le musée Confluence, l'hôtel de région, le centre-commercial, l'incubateur et accélérateur H7. Le festival Les Nuits Sonores, lancé en 2003, se déroule également au bout de la presqu'île, qui accueille aussi la Biennale d'Art Contemporain, de danse. Cette vaste transformation, qui a couru jusqu'à la fin des années 2010, formait l'un des premiers « éco-quartiers » français, appuyé sur une démarche de production d'énergie locale et positive. Mais Lyon se souciait, en parallèle, de la question du développement de son quartier d'affaires, façonné plus de trente ans plus tôt : La Part-Dieu.

« Gérard Collomb pensait l'alliance de l'urbanisme et de l'humain au service du développement et du progrès social », déclare Louis Pelaez, conseiller métropolitain, membre du groupe centriste Inventer la Métropole de demain, dont faisait partie Gérard Collomb. L'élu le définit « non seulement comme un homme d'Etat, mais aussi un homme de rue, un homme populaire ».

Le projet Part-Dieu et la « skyline à la lyonnaise »

« Gérard Collomb a toujours eu le souci de la trace qu'il laissera dans l'Histoire, de la transmission », souligne un ancien proche à l'Agence France Presse. Le maire ne pouvait pas battre le record d'Édouard Herriot, son modèle qui régna sur Lyon près d'un demi-siècle. Mais il aura presque égalé la longévité de Louis Pradel, le maire bâtisseur du quartier de La Part-Dieu, en continuant d'y édifier des tours. « Il voulait faire de Lyon l'une des grandes métropoles européennes. Il y est parvenu », ajoute son ami et allié politique, Louis Pelaez.

Les mandats de Gérard Collomb sont en effet indissociables du grand projet qu'il portait pour le 3e arrondissement de Lyon, au rythme d'un nouveau building par mandat : la tour Oxygène d'abord, puis Incity et enfin To-Lyon, dont s'emparent les premières entreprises en cette fin d'année 2023. C'est l'époque où l'enjeu d'expansion économique - ou plutôt d'extension, en hauteur - de cette grande place tertiaire pointait dans l'esprit de la majorité, afin de conforter le rang de deuxième quartier d'affaires derrière celui de La Défense, à Paris.

« Ce fut un Maire bâtisseur dans toute la noblesse du terme, proche du terrain et de tous les acteurs de la construction, du dirigeant d'entreprise au compagnon qu'il croisait sur un chantier. Même en retrait, il continuait à porter une attention à nos métiers, aux chiffres du logement et de l'immobilier d'entreprise et aux difficultés rencontrées par la promotion immobilière », indique la Fédération des promoteurs immobiliers de la région lyonnaise.

Le quartier a poursuivi sa croissance en direction de l'immobilier tertiaire. En 2012, Lyon était placée en tête du classement des villes les plus attractives pour les jeunes cadres, selon un sondage de l'Association pour l'emploi des cadres (Apec). Désormais, la majorité écologiste (anciennement dans l'opposition) vient rompre avec la ligne du duo Collomb-Kimelfeld jusqu'en 2020 : plus aucune tour ne sera érigée à Lyon. Bruno Bernard et Grégory Doucet veulent faire de La Part-Dieu « un quartier où vivre ». L'inauguration prochaine, en juin 20204, du dernier grand édifice de l'ère Collomb, la tour « To-Lyon », marquera à coup sûr un nouveau et dernier grand coup de projecteur sur leur prédécesseur, en tant que maire-bâtisseur. Mais l'édile ne se résume pas à cela.

Adepte de Saint-Simon, fondateur de la fondation Jean-Jaurès, ses proches soulignent non seulement sa pugnacité, mais aussi sa vision « sociale » de la politique de la ville. « Il n'était pas seulement le maire-bâtisseur. Il était le maire protecteur, toujours dans le souci de rassembler au-delà des postures partisanes. Il a redonné confiance aux Lyonnais », dépeint David Kimelfeld, son bras droit puis adversaire lors des élections municipales de 2020. Pour Louis Pelaez, Gérard Collomb « était convaincu que c'est en créant de la richesse qu'on pouvait mieux la partager ». La création du quartier Carré de Soie, à Villeurbanne, en est une autre illustration. Sa main tendue, non sans fermeté, au secteur privé était pour lui un « levier » en direction des grands projets, du développement économique.

L'homme laisse une empreinte kaléidoscopique. Pas une rue sans son apport (le Vieux-Lyon, La Duchère, son quartier de cœur dans le 9e arrondissement, la rue Garibaldi). Pas un emblème sans son empreinte (Le Groupama Stadium). C'est « une part de Lyon », répètent plusieurs élus, et une époque qui désormais, s'envolent, mais continuent à forger l'identité.

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Commentaires 2
à écrit le 30/11/2023 à 11:25
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bonjour pour moi le plus important ce ne sont pas que toutes ces réalisation il a été le seul président de métropole à donner à la métropole de Lyon un statut juridique digne d'une grande métropole Une métropole bien intégré dans le paysage départ...

à écrit le 29/11/2023 à 9:51
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Décidément on a la mémoire courte ! G Collomb a certainement fait de bonnes choses pour Lyon. Mais sa mort ne doit pas tout faire oublier, notamment lorsqu’il faisait passer son intérêt, ou celui de sa famille politique, avant celui de ses concitoye...

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