A l'aube de la présidentielle, agriculteurs, BTP et transporteurs prêts à se remobiliser devant la raffinerie Total

Ils avaient déjà initié une mobilisation contre la hausse des prix des matières premières et du gasoil le 21 mars dernier ayant réuni une cinquantaine de personnes devant la raffinerie Total de Feyzin (Rhône), avant de se disperser dans le calme à la demande de la Préfecture du Rhône. Des agriculteurs, acteurs du BTP et transporteurs indépendants ont désormais monté un collectif en Auvergne Rhône-Alpes et prévoient de mener une nouvelle action symbolique mercredi prochain. Avec dans le viseur, des revendications à porter au sommet de l'Etat, à quelques jours de la présidentielle.
Les représentants de ce collectif attendent des mesures fortes de la part de l'Etat pour limiter les spéculations entourant les prix du carburant, sous peine de venir mettre un sujet explosif au centre de la table, dans la dernière ligne droite avant les élections présidentielles.
Les représentants de ce collectif attendent des mesures fortes de la part de l'Etat pour limiter les spéculations entourant les prix du carburant, sous peine de venir mettre un sujet explosif au centre de la table, dans la dernière ligne droite avant les élections présidentielles. (Crédits : Reuters)

Le 1er avril devait être placé sous le signe de la désescalade des prix, avec une baisse du prix des carburants allant jusqu'à 18 centimes, annoncée par le gouvernement français à compter de ce vendredi.

Mais en Auvergne Rhône-Alpes, la mesure est loin d'avoir convaincu les professionnels.

Du côté des artisans déjà, les 13 présidents des Chambres de Métiers et de l'Artisanat en Auvergne-Rhône-Alpes ont publié, ce vendredi, une lettre ouverte à l'attention des députés et sénateurs pour alerter sur "des situations inédites de hausse des coûts des matières premières et de pénurie", en raison de l'instabilité des marchés liée à la guerre en Ukraine. Ils appellent notamment les pouvoirs publics à "aller plus loin et limiter ou encadrer ces hausses", en les incluant notamment "dans des mesures d'accompagnement complémentaires, en particulier dans le plan de résilience économique et social qui sera prochainement annoncé".

Mais l'inquiétude semble avoir franchi un autre cap du coté des agriculteurs, professionnels du BTP et transporteurs, où un collectif s'est formé à la suite du blocage de la raffinerie de Feyzin (Rhône), qui avait alors rassemblé, le 21 mars dernier, une cinquantaine de personnes.

On y retrouverait notamment des "transporteurs routiers, transporteurs du bois, professionnels du BTP, paysagistes, mais aussi des agriculteurs issus notamment de la Confédération paysanne Auvergne Rhône-Alpes et de la Coordination rurale Auvergne Rhône-Alpes", avec notamment un "noyau dur" composé d'une vingtaine de professionnels.

Réunis mercredi soir à Valencin (Nord Isère), ils ont décidé de lancer un appel à une nouvelle mobilisation mercredi 6 avril, et appellent professionnels à les rejoindre à nouveau, route de Chasse sur Rhône, près de l'entrée de la raffinerie Total de Feyzin (Rhône).

Un rassemblement annoncé

Contactée, la Préfecture du Rhône confirme qu'aucune autorisation n'a été demandée aux services de l'Etat pour organiser un tel rassemblement. Même chose le 21 mars dernier, où les manifestants s'étaient présentés dès 4h du matin aux portes de la raffinerie.

Une position toutefois assumée par les membres de ce collectif, qui ne cachent pas leur volonté de faire pression et d'occuper "plus longuement si nécessaire" le terrain, et notamment, si leurs revendications ne sont pas entendues jusqu'au sommet de l'Etat.

"Nous nous étions réunis une première fois devant la raffinerie de Feyzin pour nous faire entendre, et nous nous sommes dispersés après avoir été entendus par le préfet de police, qui nous a assuré que nos revendications remonteraient au plus haut sommet de l'Etat. Nous attendons désormais des réponses", affirme à La Tribune Manuel Arandel, l'un des cofondateurs de ce collectif, par ailleurs secrétaire de la Confédération paysanne de Savoie.

Une action tournée principalement vers l'Etat

L'annonce de cette action se veut hautement symbolique, à quelques jours du premier tour de la présidentielle, et qui vise en premier lieu à dénoncer la hausse des prix du gasoil et des matières premières, dont les cours ont flambés à nouveau depuis le démarrage de la guerre en Ukraine.

"L'insuffisance" des mesures du plan Résilience, présentées il y a quelques semaines par Jean Castex, revient parmi les motivations brandies par ce collectif de professionnels indépendants.

Cette mobilisation annoncée serait donc principalement tournée vers l'Etat, même si le groupe Total semble également ciblé par les revendications de ce collectif de professionnels, qui fustige "les profits engrangés par le groupe au cours des derniers mois".

Car pour Manuel Arandel, le compte n'y est pas : "nous allons avoir, en gros, 1.000 euros d'aides mensuelles pour acheter des aliments à nos animaux, alors que les augmentations continuent, et que nous aurons en parallèle près de 2.000 euros de charges en plus tous les mois".

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Même chose du coté du transporteur isérois Christophe Ogier, à la tête de la société SOS Transport, qui était déjà présent lui aussi devant la raffinerie Total le 21 mars dernier. Il évoque quant à lui un impact chiffré à "près de 2.000 euros de charges supplémentaires par camion", rien que sur les frais de carburant, un montant qu'il rapporterait même à 5.000 euros lorsqu'il prend en charge "l'ensemble des postes de coûts (pneumatiques, etc)".

"Nous ne pouvons pas répercuter ces hausses auprès de nos clients, nos entreprises sont prises à la gorge. C'est pourquoi nous demandons aujourd'hui un gel des prix pour les professionnels, afin que l'on retombe à un tarif de 1 euro pour les carburants et de 50 centimes pour le GNR".

Un mouvement proche des Gilets Jaunes ?

A noter que l'activité de la raffinerie Total est actuellement en régime réduit, puisque son site a été placé partiellement à l'arrêt à compter du 23 mars, en raison d'une chantier de rénovation de 63 millions d'euros. La reprise de ses activités complètes n'est pas attendue avant le 26 mai.

Pour autant, ce mouvement pourrait être scruté de près par l'exécutif, à seulement quelques jours du scrutin du 10 avril.

Avec le spectre du mouvement des Gilets jaunes, né en novembre 2018 sur fonds de revendications sociales concernant à l'époque la hausse des taxes sur les carburants, qui demeure encore dans les esprits. Or, c'est désormais une inflation plus globale, alimentée par la hausse des coûts des carburants, qui cristallise cette fois en premier lieu le mécontentement des professionnels.

Reste que pour Manuel Arandel, la genèse du mouvement serait la même :

"Nous en avons parlé au sein du collectif et on se sent proches des revendications des Gilets jaunes lors du démarrage de leur mouvement, à savoir la hausse des prix du gasoil et des coûts de la vie".

Pour Michaël Ogier, "c'est avant tout la question du pouvoir d'achat qui réunit les membres de ce collectif. Nous lançons vraiment une alerte, à la fois pour les professionnels qui risquent de déposer le bilan après avoir grignoté toute leur trésorerie et les économies de plusieurs années, mais aussi pour les particuliers, qui n'arrivent plus à remplir leur caddies tellement les prix des matières premières ont flambé et continuent de le faire".

Ses représentants attendent des mesures fortes de la part de l'Etat pour limiter les spéculations entourant les prix du carburant, sous peine de venir mettre au centre de la table un sujet explosif, dans la dernière ligne droite avant les élections présidentielles.

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