Electrification. Avec son nouveau campus européen à Lyon, RTE prépare les réseaux du futur

Avec 9.500 salariés en France dont 1.150 en Auvergne Rhône-Alpes, le gestionnaire du réseau de transport d'électricité RTE vient de passer à une autre étape puisque son fief de Lyon Jonage accueille désormais le Campus Transfo, qui se pose comme « le plus grand campus européen de formation du système électrique ». Avec la volonté de mieux outiller aussi l'ensemble de la filière électrique européenne, face à la montée des enjeux d’électrification amenés par la transition énergétique, mais aussi ses salariés, aux manettes de 675 millions d'euros de projets d'investissements au sein des réseaux d'ici 2025.
Parmi ses projets en lien avec la transition énergétique, l'énergéticien travaille par exemple à la mise en service, d'ici 2022, d'une nouvelle liaison entre la France et l'Italie, démarrant de la commune de Chambéry (Savoie), qui se posera comme « la plus longue liaison électrique en courant en continu » et permettra d'augmenter de 40 % les échanges entre la France et l'Italie.
Parmi ses projets en lien avec la transition énergétique, l'énergéticien travaille par exemple à la mise en service, d'ici 2022, d'une nouvelle liaison entre la France et l'Italie, démarrant de la commune de Chambéry (Savoie), qui se posera comme « la plus longue liaison électrique en courant en continu » et permettra d'augmenter de 40 % les échanges entre la France et l'Italie. (Crédits : DR/Alban Pernet)

Il comptait déjà sept grands sites implantés en Auvergne Rhône-Alpes pour 1.150 collaborateurs. Mais depuis quelques jours, le gestionnaire du réseau de transport d'électricité français RTE (4,8 milliards d'euros de chiffre d'affaires l'an dernier) a encore renforcé son assise lyonnaise en inaugurant un nouveau campus de formation, destiné aux réseaux du futur. Objectif affiché : se préparer à répondre aux évolutions de la demande générées par la transition énergétique (contrôle-commande, courant continu haute-tension, systèmes d'information, etc.)

Car « RTE a plus largement trois missions importantes, qui sont d'éclairer le débat public à travers ses rapports le futur énergétique, d'opérer les infrastructures afin d'assurer l'équilibre entre l'offre et la demande à l'important comme à l'export, mais aussi d'optimiser la transition énergétique de l'accompagner », résume son délégué régional, François Chaumont.

Et c'est notamment dans le cadre de celles-ci que le gestionnaire français a bâti ce projet de campus à rayonnement européen, dont le budget assumé en propre est évalué à 76 millions d'euros.

« La transition énergétique va se traduire par une vraie révolution en matière de consommation, mais également, pour l'ensemble de notre profession. C'est une grande aventure technologique et industrielle, qui nécessitait de rassembler en un même endroit des compétences pour préparer les enjeux de demain », explique François Chaumont.

Une "Equipe de France" du courant continu

Résultat ? RTE envisage d'accueillir sur son nouveau site près de 10.000 personnes par an à travers différents types de formations, en partageant ses compétences avec les gestionnaires des réseaux d'infrastructures européennes.

Un campus qui se veut donc ouvert sur l'extérieur, et notamment sur le monde universitaire et industriel. Le choix de la région Auvergne Rhône-Alpes n'est d'ailleurs pas dû au hasard, puisque RTE compte bien s'appuyer sur des partenaires comme SuperGrid, un Institut pour la Transition Energétique (ITE) créé en 2014, qui incarne différentes expertises dans les réseaux haute tension.

La métropole de Lyon comprend aussi plus largement près de 600 laboratoires et 19 établissements d'enseignement supérieurs. « Cela nous permettra de fonder une sorte d'Equipe de France du courant continu, directement basée en AURA », estime le délégué régional de RTE.

Campus RTE Transfo

De quoi préparer aussi la relève puisque chaque année, RTE recrute près de 400 nouveaux collaborateurs à l'échelle nationale, dont une trentaine en Auvergne Rhône-Alpes. Et tout porte à croire que ce chiffre pourrait se renforcer avec les prévisions liées à l'accélération de l'électrification des réseaux.

D'autant plus que les 30.000 m2 que comprendront ce nouveau Campus Transfo se veulent aussi comme un pôle d'expertise unique sur le courant continu, une technologie placée au cœur de la transition énergétique, car indispensable pour le raccordement de parcs éoliens offshore ou encore le développement des interconnexions entre les pays.

« Pour atteindre les objectifs de neutralité carbone fixés d'ici 2050, l'électricité (qui représentait jusqu'ici 25 % de la consommation énergétique) va basculer à plus de 50 % de la consommation finale, en raison d'une électrification massive des usages liés à la fois la mobilité, au bâtiment, au transport, et aux activités industrielles décarbonées », contextualise François Chaumont.

Des investissements nécessaires pour muscler le réseau

Or, en abandonnant les énergies fossiles, « les études démontrent que quels que soient les scénarios envisagés, on devra multiplier au moins 2 fois et demi la production générée par l'oélien terrestre, et par 7 celle du parc photovoltaique, encore installer à minima 20 gigawatt (GW) d'éolien offshore d'ici 2050... »

Un mix bouleversé, qui conduira le réseau électrique et se transformer lui-même. « Tout l'enjeu sera de transporter l'énergie sur de longues distances, y compris entre des pays entre eux, ou en raccordant des parcs éoliens offshores. C'est dans ce cadre que les liaisons de courant continu, par opposition aux liaisons de courant alternatif plus anciennes, sont intéressantes », glisse le délégué régional de RTE.

Pour alimenter cette transition énergétique, RTE a déjà prévu une large enveloppe d'investissements, qui a été soumise à l'échelle nationale et notamment à la Commission de régulation de l'énergie (CRE), jouant un rôle de régulateur sur le marché de l'énergie à l'échelle française.

« L'an dernier, nous avions déjà investi 135 millions d'euros en Auvergne Rhône-Alpes et l'on prévoit de réinjecter encore jusqu'à 675 millions d'ici 2025. Cela permet de faire vivre l'activité économique et de soutenir 11.700 emplois indirects en Auvergne Rhône-Alpes ».

Une montée en puissance des ENR en Auvergne Rhône-Alpes

Avec comme particularité, le fait que le tissu régional s'apprête à accueillir également, selon son nouveau schéma directeur d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET) près de 6.500 mégawatts de panneaux solaires d'ici 2030, alors que l'on compte seulement 1.200 aujourd'hui. Mais aussi 2.500 mégawatts d'éolien, contre 600 actuellement.

« RTE a donc préparé un schéma d'adaptation de ce réseau, afin de pouvoir accueillir ces nouvelles capacités en Auvergne Rhône-Alpes, qui doit encore faire l'objet d'une validation technique de la part du préfet d'ici l'an prochain », annonce François Chaumont.

Une montée en puissance qui se traduira par des optimisations de réseaux existants, à travers l'utilisation de nouveaux automates et outils numériques, ainsi que des transformations visant à augmenter parfois la capacité des lignes aériennes. Avec parfois, en dernier recours, la construction de nouveaux ouvrages et postes électriques.

Dès 2022, l'énergéticien mettra par exemple en service une nouvelle liaison entre la France et l'Italie de 190 kms, en démarrant de la commune de Chambéry (Savoie) : « il s'agira de la liaison électrique la plus longue en courant en continu, 100% enterrée, et qui va permettre d'augmenter de 40 % les échanges entre la France et l'Italie, afin de faire bénéficier par exemple des productions générées par le soleil ou le vent, d'une part ou de l'autre ».

Un projet de près d'un milliard d'euros, financé par RTE et TERNA, le gestionnaire de réseau Italien, et qui nécessitera d'installer de part et d'autres des stations de convertisseurs, nécessitant également un pilotage spécifique.

Quid du risque de black-out ?

Face à une telle montée en puissance des usages en matière électrique, doit-on pour autant craindre un risque de "black-out" ?

RTE se réfère à ce sujet au rapport d'étape sur l'évolution du système électrique intitulée « Futurs énergétiques 2050 », qu'il coordonne, et dont la sortie est prévue pour cet automne. Il y sera notamment question du « mix énergétique qui sera nécessaire pour garantir la sûreté la sécurité de ce réseau ».

Concernant l'impact des nouvelles mobilités et notamment de l'essor des véhicules électriques, RTE avait déjà sorti un autre document l'an dernier expliquant par exemple que d'ici 2035, le cap des 16 millions de véhicules électriques pourrait être franchi.

« Pour autant, cette annonce n'est pas appelée à poser de problème en matière de consommation d'énergie, car moyennant un message de décalage concernant les phénomènes de pointes instantanées, à travers l'instauration de nouveaux systèmes de pilotage, il n'y aura pas de problème de consommation électrique », indique déjà François Chaumont.

En effet, RTE avait également évalué, dans une autre étude réalisée en mai 2019 avec l'AVERE, que la consommation d'énergie liée au développement du véhicule électrique ne devrait pas excéder 48 TWh, soit 10% de la consommation française.

« Ce niveau de consommation n'impacte pas la sécurité d'approvisionnement en électricité de la France », rappelait l'étude, estimant que « les périodes de forts déplacements, comme les vacances scolaires ou les départs en week-end, ne constituent pas un motif d'inquiétude » tandis que « les pointes de consommation en électricité du soir peuvent, quant à elles, être atténuées grâce à la mise en place solutions simples de pilotage. »

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