Armes de petit calibre : le Banc National d’épreuve se tient prêt pour la résurrection d’une filière française

Unique en France, le Banc National d’épreuve de Saint-Etienne a la prérogative exclusive de tester chaque arme civile fabriquée ou dédouanée en France pour le marché européen. En charge également de l’homologation des munitions, il est dans les starting blocks pour la potentielle re-création d’une filière française de munitions d’armes de petit calibre, actuellement étudiée par le gouvernement.
Fruit de l'histoire armurière de Saint-Etienne, le banc national d'épreuve (BNE) a la charge de tester l'intégralité des armes à feu à usage civil, fabriquées en France ainsi que celles importées par les pays européens et dédouanées en France.
Fruit de l'histoire armurière de Saint-Etienne, le banc national d'épreuve (BNE) a la charge de tester l'intégralité des armes à feu à usage civil, fabriquées en France ainsi que celles importées par les pays européens et dédouanées en France. (Crédits : Stéphanie Gallo Triouleyre)

L'institution est unique en France, elle est le fruit de l'histoire armurière de Saint-Etienne. Créée en 1782 sur ordonnance royale, le Banc National d'Epreuve (BNE) est aujourd'hui géré par la Chambre de Commerce et d'Industrie de Lyon Métropole Saint-Etienne Roanne, sous tutelle du ministère de l'Intérieur. Avec 38 salariés pour un chiffre d'affaires de 2,93 millions d'euros en 2023, il a la charge de tester l'intégralité des armes à feu à usage civil fabriquées en France ainsi que celles importées par les pays européens et dédouanées en France. Soit 60.000 armes éprouvées environ en 2023 pour le compte de fabricants français et étrangers.

« Aucune arme civile fabriquée en France ou dédouanée en France ne peut être commercialisée sans avoir passé l'épreuve du banc national d'épreuve de Saint-Etienne », confirme Irène Breuil, la présidente de la délégation stéphanoise de la chambre métropolitaine.

Les armes militaires suivent elles d'autres circuits d'homologation, le BNE n'est donc pas au premier rang de l'accélération internationale de la production d'armes destinées à l'Ukraine. En revanche, l'organisme stéphanois pourrait bien, dans les prochains mois, jouer un rôle significatif dans la réorganisation de la BITD (Base Industrielle et Technologique de Défense) qu'Emmanuel Macron et son ministre des Armées, Sébastien Lecornu, disent vouloir mener au pas de charge.

Homologation des munitions

En effet, parmi les prérogatives exclusives du Banc National d'Épreuve figure l'homologation des (rares) munitions fabriquées en France pour les armes de petit calibre. La filière est aujourd'hui disloquée sur le territoire national mais dans un contexte géopolitique instable menaçant les approvisionnements français, l'Etat planche sur la recréation d'une filière nationale de munitions pour les armes de petit calibre.

«  La DGA travaille sur l'identification de toute la chaîne de production : production de la poudre, fabrication des cartouches et bien sûr, homologation. Sur ce dernier point, nous aurons évidemment notre rôle à jouer, nous nous tenons prêts pour accompagner cette démarche, investir et recruter si nécessaire », lance Nicolas Bonnet, directeur général de la CCI Lyon Saint-Etienne Roanne.

Test des blindages

Sans attendre cette potentielle nouvelle filière, le BNE voit d'ores et déjà son niveau d'activité impacté par la guerre en Ukraine et la montée en cadence de la production de matériels militaires, notamment de chars. Depuis les années 90, le BNE est en effet une référence européenne en matière de laboratoire de résistance balistique des matériaux.

« Pour le secteur militaire, cela se matérialise par des tests de résistance des véhicules blindés (pour Nexter notamment), des aéronefs, des gilets pare-balles, des visières, des casques etc. Nous disposons de munitions venues de plusieurs pays afin de s'assurer de la résistance des matériaux et au début de la guerre en Ukraine, nous avons été sollicités pour éprouver la résistance des équipements occidentaux face aux munitions russes. A présent, nous constatons les effets de la dernière loi de programmation militaire, avec ses 413 milliards d'euros : les demandes de tests de résistance de la part des fabricants et de leurs fournisseurs est en hausse significative », précise Nicolas Bonnet.

Face à cette nouvelle donne, le Banc National d'épreuve vise un chiffre d'affaires de cinq millions d'euros d'ici trois ans. Avec une croissance certes alimentée par la montée en puissance de la BITD française mais aussi par le développement d'autres activités. Par exemple, la destruction et la neutralisation des armes de petit et gros calibre (pour les collectionneurs, pour l'État à des fins d'expositions ou de formation par exemple, etc).

« Nous avons initié un rapprochement plus étroit avec le ministère de l'Intérieur. Par exemple, dans le cadre de l'opération « Dépose tes armes » qui visait à récupérer des armes chez les particuliers, nous en avons détruit 50.000. Nous avons aussi été habilités tout récemment à accompagner et former certains pays des Balkans, notamment le Kosovo, dans la destruction des armes. Nous allons avancer sur ces activités en nous appuyant sur notre savoir-faire historique », dévoile la présidente de la CCI.

Et puis, dans la ligne de mire du banc d'épreuve, les fabricants étrangers d'armes civiles (représentant l'essentiel des armes utilisées en France). L'organisme souhaite se mettre plus en avant afin de les inciter à venir éprouver leurs armes destinées au marché européen sur le banc stéphanois plutôt que sur le banc italien ou allemand par exemple.

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Commentaires 2
à écrit le 10/04/2024 à 20:01
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Si la CCI gère ce Banc National d’épreuve comme elle a géré l'aéroport de St Etienne, moribond, le musée des tissus, revendu 1€ à la région, ou encore comme elle était gérée elle-même, reprise en catastrophe par la CCI de Lyon au bord du gouffre, alo...

à écrit le 10/04/2024 à 6:46
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Bonjour, encore un article pour nous rappeler que certains organismes publiques existent et qu'ils ne faut pas qu'ils perdent certain marché d'état... La nécessité de créé une une nouvelle usine de production de petit calibre me semble important... ...

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