Mobilités : en Isère, Absolut Hydrogen se lance dans la course à l’hydrogène liquide pour le maritime

Le groupe isérois Absolut vient d’être retenu dans le cadre de l’appel à manifestation d’intérêt Corimer 2023 pour le développement d’un liquéfacteur d’hydrogène destiné au marché maritime, plus spécifiquement pour des bateaux effectuant des rotations régionales. Un projet à 7,5 millions d’euros dont l’enjeu est d’accélérer la décarbonation de ces mobilités lourdes.
Un premier ferry fonctionnant à l'hydrogène liquide a par exemple été mis en service l'année dernière en Norvège. Mais l'isérois Absolut compte aller un cran plus loin avec le développement d'un liquéfacteur d’hydrogène destiné au marché maritime, plus spécifiquement pour des bateaux effectuant des rotations régionales.
Un premier ferry fonctionnant à l'hydrogène liquide a par exemple été mis en service l'année dernière en Norvège. Mais l'isérois Absolut compte aller un cran plus loin avec le développement d'un liquéfacteur d’hydrogène destiné au marché maritime, plus spécifiquement pour des bateaux effectuant des rotations régionales. (Crédits : DR)

50 kilos. C'est la capacité de production quotidienne du premier liquéfacteur d'hydrogène de l'iséroise Absolut Hydrogen, dernière-née (2021) d'Absolut, groupe créé il y a 13 ans par des anciens d'Air Liquide, autour de la technologie de la cryogénie. Plusieurs exemplaires de ce premier liquéfacteur ont été fournis récemment à des laboratoires français, des discussions sont menées actuellement avec des unités de recherche anglaises. La deuxième étape sera un produit à 100 kilos par jour, les essais sont en cours.

Un pallier significatif devrait être franchi d'ici la fin 2025, avec la mise au point d'un gros liquéfacteur capable de fournir une tonne d'hydrogène liquide par jour.

S'ancrer sur le marché du maritime

Ce projet - dont le budget de développement est estimé à 7,5 millions d'euros (dont 50% abondés par des subventions) -, vient d'être retenu par l'État dans le cadre de l'appel à manifestation d'intérêt Corimer 2023, destiné à soutenir l'innovation de la filière des industriels de la mer. Car c'est bien à ce marché (notamment) que va s'adresser ce futur liquéfacteur.

« Une capacité d'une tonne par jour correspond aux besoins d'un ferry ou de l'aviation régionale. L'hydrogène liquide est particulièrement intéressant pour les mobilités dès qu'on a besoin de stocker beaucoup d'hydrogène car il nécessite des réservoirs beaucoup moins lourds que pour la forme gazeuse compressée et prend trois fois moins de place que lorsqu'il est compressé à 350 bars. Sous forme liquide, cryogénisé, il est aussi plus facilement transférable », explique Jérome Lacapere, directeur général d'Absolut Hydrogen, cofondateur du groupe Absolut aux côtés de Julien Tanchon et ex-responsable, pendant dix ans, de la modélisation R&D d'Air Liquide Advanced technologies.

Et d'observer : « Le marché du maritime n'est pas encore mature, mais c'est probablement le segment le plus avancé sur le sujet. Un premier ferry fonctionnant à l'hydrogène liquide a par exemple été mis en service l'année dernière en Norvège (ndlr, le MF Hydra opéré par la compagnie Norled). Mais il est approvisionné par de l'hydrogène liquide allemand livré par camions. Nous voulons nous positionner comme un fournisseur d'hydrogène liquide, produit sur place, de manière durable. Nous ciblons les petites et moyennes capacités, car sur les besoins en grosses capacités, le marché n'est pas du tout mature encore ».

La filiale d'Absolut n'a pas encore généré de chiffre d'affaires, mais elle serait en discussion avec des armateurs, des producteurs d'hydrogène et des ports. Après s'être d'abord imaginé fournisseur d'équipements (de liquéfacteurs), Absolut Hydrogen réfléchit en parallèle à un business model appuyé sur des contrats de fourniture d'hydrogène liquide. « Pour les petites capacités, l'achat de liquéfacteurs semble adapté. Pour les plus grosses capacités, on perçoit que les clients préfèrent rester sur leur cœur de métier et ne pas se charger de la production de l'hydrogène liquide. Nous exploiterions donc nos unités de liquéfaction pour eux ».

Jusqu'à 15 tonnes/jour

En parallèle du maritime, ce liquéfacteur d'une tonne/jour retenu par Corimer 2023 s'adressera aussi au marché de l'aviation régionale. Un secteur sur lequel l'hydrogène liquide commence à pointer son nez. A l'automne dernier, un premier démonstrateur d'avion électrique de H2Fly, propulsé à l'hydrogène liquide, a volé avec succès en Slovénie avec de l'hydrogène liquide et un réservoir fournis par le Français Air Liquide.

Absolut travaille de son côté avec l'anglo-américain ZeroAvia sur une solution de remplissage pour les petits avions.

Lire aussi Absolut Hydrogen et ZeroAvia : un partenariat pour développer l'hydrogène liquide dans l'aéronautique

A terme, Absolut Hydrogen veut monter en capacité pour atteindre des liquéfacteurs pouvant produire 10 à 15 tonnes d'hydrogène liquide par jour. « Mais pas plus, nous voulons nous limiter à des ensembles qu'on peut déplacer ».

Sur ce chemin, Absolut Hydrogen doit contourner plusieurs obstacles au développement du marché de l'hydrogène liquide. En particulier celui de sa compétitivité face aux fuels classiques. Et de la faible densité de l'écosystème global autour de l'hydrogène liquide.

« Il existe aujourd'hui des aides conséquentes attribuées aux acteurs de l'hydrogène par l'État et l'Europe. Mais les prix de production de l'hydrogène sont élevés en raison du coût de l'énergie. Nous travaillons avec l'Etat sur des mécanismes de prix modulés pour les producteurs d'hydrogène », décrypte Emmanuel Bensadoun, responsable expertises pour France Hydrogène, l'association fédérant les acteurs de la filière. L'expert pointe en revanche un atout pour Absolut Hydrogen : le faible nombre d'acteurs présents sur ce segment de l'hydrogène liquide. « La barrière technologique à l'entrée est forte ».

Parmi les acteurs clés du secteur : Air Liquide évidemment ou encore l'Allemand Linde. « Nous nous différencions en adressant les petites et moyennes capacités, avec une production locale. Les offres sont complémentaires », précise Jérôme Lacapere.

Retenu, mi 2023, dans le cadre du programme « Première Usine » de France 2030, le groupe Absolut investit 10 millions d'euros dans sa nouvelle usine. Une partie d'entre elle sera dédiée à l'industrialisation des liquéfacteurs.

En parallèle, Absolut Hydrogen envisage la création d'un site d'essai à Toulouse afin de conforter ses relations avec l'écosystème aéronautique, moins présent en Auvergne Rhône-Alpes.

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