Absolut Hydrogen et ZeroAvia : un partenariat pour développer l'hydrogène liquide dans l'aéronautique

Absolut Hydrogen et l'anglo-américain ZeroAvia travaillent ensemble sur une solution de remplissage pour les petits avions à l'hydrogène liquide. Un moyen aussi de faire avancer l'écosystème et la réglementation concernant l'utilisation de l'hydrogène liquide dans l’aéronautique.
Pour la filière aéronautique, l'hydrogène liquide est plus avantageux que l'hydrogène gazeux à plusieurs égards.
Pour la filière aéronautique, l'hydrogène liquide est plus avantageux que l'hydrogène gazeux à plusieurs égards. (Crédits : DR Absolut Hydrogen et ZeroAvia)

Le Grenoblois Absolut Hydrogen s'est allié au développeur anglo-américain d'avions électriques à hydrogène, ZeroAvia, pour travailler sur l'alimentation en hydrogène liquide dans l'aéronautique. Un partenariat qui va permettre à l'Isérois, filiale du groupe Absolut et spécialiste de l'hydrogène liquide, de se positionner sur ce marché.

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« Ça renforce nos liens dans le domaine aéronautique, parce que c'est un domaine ou nous ne sommes pas : nous sommes des industriels », confirme Jérôme Lacapère, PDG d'Absolut Hydrogen. « Ce type de partenariat permet de voir exactement quels sont les besoins de ces entités [les avions électriques à hydrogène, ndlr] et de pouvoir y répondre. Mais aussi de les anticiper et de savoir comment ils se projettent dans deux ans ou en 2030 en nombre d'avions, d'aéroports concernés et de quantité d'hydrogène dont ils vont avoir besoin. Ce sont des choses qu'il faut prévoir en amont pour pouvoir fabriquer des machines, les développer et les livrer à temps », détaille-t-il.

L'hydrogène liquide plus avantageux

Pour la filière aéronautique, l'hydrogène liquide est plus avantageux que l'hydrogène gazeux à plusieurs égards. L'hydrogène gazeux est, en effet, difficile à stocker et demande d'être compressé « soit à 350 bars, soit 700 bars », explique Jérôme Lacapère. Ce qui prend une certaine place.

« Un petit avion du type de ZeroAvia va avoir besoin à bord de 300 voire 500 kilos d'hydrogène. Aujourd'hui, c'est compliqué de les mettre sous forme gazeuse parce que ça prend énormément de place et c'est difficile à transférer entre l'aéroport et l'avion. Alors que si on utilise la version liquide, on a les mêmes 500 kilos, mais on les a cryogénisés et ça prend environ trois fois moins de place que s'il était stocké à 350 bars. Le temps de transfert aussi est facilité », poursuit-il.

Cela permet donc d'alléger les systèmes de stockage, mais il reste un « bémol » : pour stocker de l'hydrogène liquide, il faut des réservoirs très bien isolés. « Or, cela représente quand même une masse non-négligeable. Il y a donc pas mal de R&D sur ce sujet », précise encore Jérôme Lacapère. Absolut Hydrogen ne va toutefois pas travailler sur cet aspect, mais va se concentrer avec ZeroAvia sur le développement en commun des solutions de remplissage.

« On se complète bien »

« Nous sommes un fournisseur d'infrastructure et d'hydrogène liquide et ZeroAvia se place au niveau de la chaîne de propulsion de l'avion. Entre les deux, il y a des chaînons manquants pour pouvoir remplir le réservoir d'hydrogène à bord de l'avion. Il y a des systèmes assez spécifiques : il faut monter de l'hydrogène liquide et l'envoyer dans un réservoir de l'avion. Il faut aussi récupérer les vapeurs d'hydrogène et les retraiter. Ce sont des choses qu'on va faire en commun. On ne connaît pas l'environnement aéronautique et, eux, ont moins de connaissances en cryogénie. On se complète donc bien », avance le PDG d'Absolut Hydrogen

De son côté, ZeroAvia a déjà des premiers moteurs certifiés pour des avions jusqu'à 19 places alimentés par de l'hydrogène gazeux, le ZA2000. Mais la startup travaille sur « un groupe moteur modulaire de 2 à 5,4 mégawatts (MG) pour des avions de 40 à 80 places », dont la mise en service, prévue pour 2027, nécessitera de l'hydrogène liquide.

Avancer avec la réglementation

Avec ce partenariat, Absolut Hydrogen souhaite aussi se positionner et s'accorder avec la réglementation naissante concernant l'usage de l'hydrogène dans l'aéronautique. « La réglementation des aéroports est spécifique. Il faut développer de nouveaux standards et de nouveaux processus de remplissages et ça, on ne peut pas le faire seul », précise Jérôme Lacapère.

Cela permet aussi à la filiale iséroise de connaître les besoins actuels et leurs croissances pour adapter ses infrastructures. « C'est aussi un domaine qui n'a pas trop évolué, où il n'y pas eu de révolution depuis de nombreuses années. Mais le fait de changer et de mettre de l'hydrogène, c'est vraiment une révolution. Toutes les infrastructures et tout le système à bord vont être modifiés, donc tout est à faire au niveau des réglementations et certifications. En tant que fournisseurs de machines pour liquéfier, nous serons installés proche d'un aéroport, voire dans un aéroport. Il nous faut donc connaître les contraintes associées à cela, au remplissage et au cycle de vie des avions », analyse le dirigeant.

La question de l'évolution de la réglementation et de l'écosystème est d'ailleurs cruciale pour le développement de la filière. Fin 2022, Airbus avait menacé de reporter la mise en service de son avion hydrogène si l'écosystème n'évoluait pas.

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« À notre niveau, c'est plus modeste. Airbus a, par exemple, une approche différente et envisage une très grosse production d'ici 2035-2050. [...] En attendant, ils constatent qu'il n'y a pas grand-chose qui se passe. C'est le fameux problème de la poule et de l'œuf. Nous essayons donc justement de prendre le problème à l'envers en tentant de répondre à la demande actuelle », ajoute encore Jérôme Lacapère.

« Outre le développement de nos connaissances internes en matière d'hydrogène liquide au cours des derniers mois, il a été essentiel d'établir des partenariats pour commencer à construire l'écosystème capable de fournir de l'hydrogène liquide pour des avions plus grands, dans des aéroports plus importants », abonde Arnab Chatterjee, vice-président Infrastructure de ZeroAvia, cité dans un communiqué. 

De son côté, la région Auvergne-Rhône-Alpes soutient aussi la filière hydrogène, mais avec un « budget poussé sur les stations de remplissage de véhicules terrestres » plutôt que vers l'aéronautique. « Il n'y a pas grand chose de notre côté pour pousser vers le maritime ou l'aéronautique. Ça se fait plus en Occitanie et nous sommes justement en train de voir si ça ne serait pas judicieux pour nous de s'implanter à Francazal, vers les technocampus d'hydrogène », explique Jérôme Lacapère.

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Répondre aux besoins plus modestes

« ZeroAvia a des besoins qui sont modestes, de quelques centaines de kilos par jour pour pouvoir faire des premiers essais, voir comment ça se passe avec des petits avions et monter ensuite en gamme. C'est donc vers là que nous devons aller pour répondre à ce besoin qui existe aujourd'hui de petites quantités d'hydrogène liquide dans l'aéronautique », résume-t-il.

Un moyen d'avancer, à plus petite échelle, sur la technologie et les leviers  réglementaires tout en travaillant avec une production d'énergie locale. Une stratégie complémentaire avec de gros projets comme, par exemple, celui que nourrit Vinci avec Air Liquide et Airbus, à Lyon.

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Aujourd'hui Absolut Hydrogen peut produire de 7 à 50 kilos d'hydrogène liquide par jour pour des essais et dispose aussi d'un produit qui peut produire 100 kilos. D'ici deux ans « on aura un système qui va liquéfier une tonne par jour », affirme Jérôme Lacapère. Absolut Hydrogen nourrit aussi des ambitions similaires avec le maritime et mène en ce moment des discussions avec des acteurs du secteur.

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