Massif du Sancy : les stations de ski se diversifient face au manque de neige

Avec des pistes situées entre 1.200 et 1.850 mètres d’altitude, les stations de Super-Besse et du Mont-Dore, dans le Puy-de-Dôme, sont contraintes de se réinventer comme beaucoup d’autres domaines de moyenne montagne. Face au changement climatique, le massif du Sancy adapte son fonctionnement et investit massivement pour se diversifier vers des activités hors ski, tout au long de l’année.
La station Super-Besse vient d'investir 3,4 millions d’euros pour la construction d'une luge sur rails, opérationnelle dès février et qui fonctionnera été comme hiver.
La station Super-Besse vient d'investir 3,4 millions d’euros pour la construction d'une luge sur rails, opérationnelle dès février et qui fonctionnera été comme hiver. (Crédits : DR Office du Tourisme du Sancy)

Les premiers flocons sont tombés cette semaine sur le Massif du Sancy, à une cinquantaine de kilomètres de Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme). Surtout le froid s'est installé. « Une bonne nouvelle » pour les exploitants des trois stations de ski, Super-Besse, Mont-Dore et la plus petite, Chastreix-Sancy. Avec le changement climatique, ces domaines de moyenne montagne font de plus en plus face à des problèmes d'enneigement. « Nous avons commencé à produire de la neige de culture ce week-end. Cela va permettre de faire une sous-couche », détaille Luc Stelly, directeur de l'Office de tourisme du Sancy.

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À Super-Besse, dont les pistes sont situées entre 1.350 et 1.850 mètres d'altitude, d'autres canons à neige fonctionnent même depuis début novembre. Des machines spécifiques, achetées il y a deux ans, qui permettent de réaliser de la neige même quand les températures extérieures sont positives. Cette poudre blanche, stockée sous d'immenses bâches, servira pour la piste « grand débutant ».

 « C'est primordial pour nous d'enneiger cette piste car nous avons une clientèle familiale et de débutants. Ces canons nous permettent d'assurer les vacances de Noël et notamment les cours de ski. Nous sommes une montagne d'apprentissage. C'est stratégique pour notre économie de garantir cela », commente Luc Stelly.

Pour produire cette neige artificielle, l'eau est puisée dans le lac de Super-Besse et dans une rivière du massif. Mais la facture est salée côté électricité. Pour Super-Besse, la note a été multipliée par deux avec la flambée des prix de l'énergie, passant à 2 millions d'euros soit près de 20% du chiffre d'affaires de la station (entre 8 et 9 millions selon les années). Pour compenser en partie cette hausse, les forfaits de ski augmenteront de 5% cette année. Au Mont-Dore, même problématique. La station va débourser 500.000 euros cette année pour l'électricité. « Sans compter que les pièces détachées pour les remontées mécaniques coûtent 30% plus cher qu'il y a un an et demi. Mais nous devons respecter le planning de maintenance, » complète Christophe Boivin, le directeur de la station qui compte 35 kilomètres de piste.

Réduction de 10 à 15% de la consommation électrique

La situation de ces domaines reste cependant viable. Pour ne pas entamer le modèle économique, elles ont réduit leur consommation d'électricité de 10 à 15% sans que cela impacte fortement les skieurs.

« Nous réduisons nos nocturnes. Nous fermerons à 20h et non plus 21h. Et puis hors vacances scolaires, nous nous passerons de certaines remontées mécaniques qui sont redondantes. Nous avons aussi équipé nos dameuses de GPS pour identifier les tracés, optimiser les passages et repérer là où il est vraiment nécessaire de rajouter de la neige de culture, » indique Lionel Gay, le maire de Besse (dont dépend Super-Besse) et président du Saeml Pavin Sancy, gestionnaire de la station.

Au Mont-Dore, c'est la vitesse des télésièges qui est réduite quand la fréquentation est plus faible. « Nous pouvons diminuer de 20 à 40% la vitesse de rotation. Le skieur attend 20 secondes de plus pour pouvoir s'asseoir et la montée dure 14 minutes au lieu de 10, » précise Christophe Boivin.

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Diversification des activités, 15% des recettes hors-neige

Au-delà de la sécurisation de la partie « neige », les stations visent aussi la diversification.

« Les climatologues nous disent que nous avons encore 30 ans de ski devant nous dans le Massif du Sancy, mais qu'il y aura des hivers compliqués, peu enneigés. Il faut donc anticiper », rapporte le directeur de la station du Mont-Dore.

Depuis une dizaine d'années, les stations du Sancy investissent donc massivement pour développer d'autres activités en dehors du ski. Ainsi, Super-Besse et Mont-Dore ont chacune installé une tyrolienne, qui fonctionne été comme hiver. La station de Super-Besse va même plus loin avec une luge sur rails, un « rollercoaster » qui sera opérationnel dès février. Un projet à 3,4 millions d'euros pour 1.300 mètres de descente entre tunnels et virages (rentabilité attendue dans les 8 à 9 ans). Cette activité à sensations fortes sera complétée dès la saison 2024-2025 par une autre série d'équipements. Le centre aqualudique sera agrandi avec un mur d'escalade, un simulateur de golf, un laser game et un parcours de trampoline. Le tout pour un montant de 2,6 millions d'euros.

« Petit à petit, nous transformons nos stations. Dans le Sancy, nous avons une longueur d'avance sur cette complémentarité avec le ski. Aujourd'hui, 15% de nos recettes sont hors-neige alors que les stations alpines sont à 4 ou 5% », précise Lionel Gay.

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Et ces activités sont plébiscitées par les vacanciers qui ne skient pas la totalité de leur temps, même quand la neige est au rendez-vous. D'ailleurs, à Super-Besse, les forfaits les plus vendus ne sont pas ceux de six jours, mais bien de 4 heures.

« Ne pas être dépendant de la neige »

Le maître mot est de développer des activités qui peuvent se pratiquer aussi bien en hiver qu'en été. Le Massif du Sancy ne veut plus cloisonner les saisons. Le meilleur moyen de ne pas être dépendant du ski et surtout de la neige.

« Nous préparons cette indépendance », remarque Luc Stelly, qui tient quand même à préciser que ces investissements ne sont possibles que grâce aux recettes liées au ski. « C'est l'activité la plus rémunératrice pour l'instant. Peut-être que dans dix ans le ski sera accessoire, mais aujourd'hui il nous permet de financer les autres activités ».

Économiquement, le ski reste primordial complète Christophe Boivin. « Au Mont-Dore, le ski représente 120 emplois directs et 400 à 500 emplois indirects, que ce soit les restaurateurs, les commerces. Finalement, les deux choses qui font vivre notre vallée, c'est le ski et le Saint-Nectaire. Mais sans le ski, il n'y a pas de touristes pour acheter notre fromage. »

Fréquentation stable pour Noël

À moins d'un mois des vacances de Noël, les réservations s'accélèrent. Pour les congés de fin d'année, le taux de remplissage dans le Sancy est déjà de 30 à 40%. Chiffre similaire à l'année dernière. Le massif propose 37.000 lits, que ce soit dans les hôtels, les gîtes et même les campings. En Auvergne, les vacances de Noël représentent 20% du chiffre d'affaires des stations (13 millions d'euros en 2022 pour les trois stations). Les vacances d'hiver (février-mars) représentent, elles, 60% du chiffre d'affaires.

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