Promotion immobilière : les ventes dégringolent en Auvergne depuis le début de l’année

Remontée des taux d’intérêt, flambée des prix des matières premières, nouvelles réglementations… Autant de facteurs qui déstabilisent le marché de l’immobilier ces derniers mois. En Auvergne, la situation est même « catastrophique » selon les professionnels de la promotion qui enregistrent une chute des ventes d’appartements dans le neuf sur un an.
Aumoine Promotion vient de livrer cet immeuble de 30 logements à Chamalières, dans l'agglomération clermontoise, mais rencontre désormais des difficultés pour vendre des logements neufs.
Aumoine Promotion vient de livrer cet immeuble de 30 logements à Chamalières, dans l'agglomération clermontoise, mais rencontre désormais des difficultés pour vendre des logements neufs. (Crédits : DR Aumoine Promotion)

Les chiffres parlent d'eux même. Au troisième trimestre, le marché enregistre une chute de 57 %, sur un an, des ventes d'appartements neufs, selon l'Observatoire évolutif de l'immobilier local (OEIL) Auvergne. L'organisme rassemble les statistiques des vingt plus gros promoteurs nationaux et régionaux (Bouygues Immobilier, Nexity, Kaufman and Broad, Eiffage Immobilier etc.) sur les quatre départements de l'ancienne région Auvergne (Allier, Cantal, Haute-Loire, Puy-de-Dôme). Sur ce territoire, 334 ventes ont été réalisées seulement sur les neuf premiers mois de l'année. En Haute-Loire, le chiffre est même alarmant. Trois appartement neufs ont été vendus depuis janvier (contre 39 l'an dernier).

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« C'est une conjonction de facteurs. Les taux immobiliers ont été multipliés par quatre en 18 mois ce qui freine les ménages, les matériaux ont augmenté de 20 % ce qui alourdit la facture, tout comme les contraintes réglementaires liées à des enjeux environnementaux qui renchérissent les coûts, » précise Cédric Serre, président d'Œil Auvergne.

Et pour ce professionnel, lui-même promoteur, la tendance va être la même en cette fin d'année. « Dans le Puy-de-Dôme, nous avons vendu 307 logements. Nous pensons que nous arriverons à 400-420 d'ici la fin de l'année. Or lors d'une année classique, nous sommes plutôt aux alentours de 900 à 1.000 ventes d'appartements neufs. C'est catastrophique », détaille Cédric Serre.

« Un appel par semaine »

Une triste analyse que partage Stéphane Aumoine. Ce promoteur auvergnat a lancé, en juin, la commercialisation de deux projets de 12 et 35 logements. Mais il n'a jamais rencontré autant de difficultés pour vendre les appartements.

« Cela ne mord pas. En septembre 2022, nous avions cinq à six appels par jour, aujourd'hui nous sommes à un par semaine. Pour l'immeuble de douze logements, situé en plein coeur de Clermont-Ferrand, je n'ai vendu que quatre appartements représentant 20 % de la surface. Si nous étions en 2021, j'aurais déjà tout vendu », se désole ce chef d'entreprise.

Résultat, impossible pour lui de lancer la construction, car il lui doit avoir vendu 50 % des logements comme l'exige sa banque. « Si je ne démarre pas de projets, je ne rentre pas d'argent », explique Stéphane Aumoine qui a réalisé 7 millions d'euros de chiffre d'affaires entre septembre 2022 et septembre 2023. Si la situation perdure, cet entrepreneur, qui emploie 5 personnes, craint que l'an prochain cela avoisine plutôt les 2 millions d'euros.

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Désistements en forte hausse

Autre résultat marquant de l'étude menée par l'OEIL : le taux de désistement des acquéreurs, en continuelle hausse également.

« Dans la métropole clermontoise, nous avons eu 179 désistements depuis le début de l'année, alors que dans le même temps 273 logements neufs ont été vendus. Il y a plusieurs cas de figure. Les acquéreurs n'ont, soit pas obtenu leur financement ou soit ils ont eu peur de maintenir leur achat dans un contexte anxiogène. Il y a aussi ceux qui ont abandonné leur projet car ils n'ont pas accepté un report de livraison de leur appartement. Certains promoteurs sont en effet contraints de différer le lancement des travaux, n'ayant pas vendu assez d'appartements. »

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Pire, certains programmes sont même tout simplement annulés, faute de clients. Ainsi au troisième trimestre, ce sont 133 appartements qui ont été retirés de la commercialisation dans la Métropole Clermont Auvergne. Contre cinq à quinze d'habitude chaque trimestre. « C'est assez significatif de ce qui est en train de se passer en cette fin d'année. Ces chiffres sont historiques », alerte Cédric Serre.

« Choc financier et social »

Face à ce constat, le secteur craint que tout un pan de l'économie ne soit à l'arrêt très prochainement. Notamment les maçons ou les artisans du « second œuvre » (électriciens, plombiers etc.) qui travaillent pour ces programmes immobiliers.

« Les prochains mois vont être violents. Cela va être un choc financier et social sans précédent. Des entreprises pourraient disparaître. Sans compter qu'il y aura une crise du logement. On n'en produira pas assez. La rénovation ou l'ancien ne suffiront pas », analyse le président d'Œil Auvergne qui s'inquiète aussi de la fin du dispositif Pinel dans les prochains mois.

Et l'Auvergne n'est évidemment pas le seul territoire concerné. Dans un rapport parlementaire, publié à la mi-novembre, le député Horizons François Jolivet indiquait craindre la destruction de 180.000 emplois dans la filière immobilière en France en 2024. La Fédération française du bâtiment, elle, table sur 150.000 emplois menacés d'ici à 2025. Plutôt 300.000 s'alarme de son côté la FPI, la Fédération des promoteurs immobiliers. Cette dernière réclame une aide « d'urgence », pouvant prendre la forme d'une exonération de droits de succession sur l'achat de logements neufs, et des incitations financières à la construction pour les communes.

Auvergne : chute des ventes dans l'ancien également

Selon le réseau FNAIM, qui représentent 180 agences en Auvergne, les ventes de logements anciens sont en baisse de 10 % sur les douze derniers mois. Plus de 22.600 biens (appartements et maisons) ont été vendus dans les quatre départements auvergnats. C'est un peu mieux que la partie Rhône-Alpes qui, elle, accuse une chute de 14,8 % des transactions. Et tous les types de biens sont concernés : de la maison à l'appartement, de la zone urbaine à la zone rurale. « Quant aux prix, ils sont en légère diminution, de l'ordre de 2 % à Clermont-Ferrand sur un an (à 2.362 euros le m2 au 1er novembre, ndlr), note Christian Dosmas, président de la FNAIM Auvergne. Les vendeurs ne sont pas encore prêts à baisser les prix. Le temps fera son œuvre ».

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Commentaire 1
à écrit le 06/12/2023 à 21:58
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C'est inéluctable ....un pays qui vit très au dessus de ces moyens et qui travaille peu .....on arrive à un tel résultat .... de plus le prix des constructions est surfait ..... qualité médiocre pour des prix bien trop surestimés ....

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