A Clermont-Ferrand, la belle renaissance de l’emblématique librairie Les Volcans

Du dépôt de bilan il y a près de dix ans à 7,6 millions d’euros de chiffre d’affaires l’an dernier, la célèbre librairie Les Volcans a su rebondir grâce à son statut de Scop. Un joli succès pour cette institution clermontoise qui se voit avant tout comme un lieu de rencontre.
La librairie compte aujourd'hui 80.000 références d'ouvrages et accueille de nombreuses conférences et débats.
La librairie compte aujourd'hui 80.000 références d'ouvrages et accueille de nombreuses conférences et débats. (Crédits : DR Les Volcans)

Les auteurs s'y succèdent : Brigitte Giraud, Eric Orsenna, Olivier Adam, Marie-Hélène Lafon... mais aussi les conférences, les débats, les expositions et les concerts. Pas moins de 350 animations sont organisées chaque année à la librairie Les Volcans. Un dynamisme et une belle vitalité pour ce commerce situé en plein cœur de Clermont-Ferrand, à quelques encablures de la place de Jaude. Il y a dix ans, pourtant, la librairie avait dû fermer après le dépôt de bilan du réseau Chapitre, auquel Les Volcans appartenait. Mais c'était sans compter la ténacité et la volonté de ses salariés qui ont repris l'affaire sous la forme d'une Scop, une société coopérative de production. Par « état de nécessité » au début, pour sauver leur entreprise. Mais ce statut a depuis montré ses nombreux avantages.

« La Librairie est doublement indépendante, car elle ne dépend pas d'un grand groupe et en plus, elle appartient à ses salariés associés (une vingtaine aujourd'hui sur les 46 salariés). Cela nous donne carte blanche sur les choix éditoriaux et stratégiques. C'est une force.Tout est décidé en interne. Nos libraires sont libres dans leurs commandes et dans la mise en avant des ouvrages », explique Boris Surjon, qui a repris la gérance de la librairie il y huit mois, avec Philippe Pelade, après le départ à la retraite de la précédente gérante.

Pour cet ancien manager dans l'économie sociale et solidaire, ce modèle de Scop permet à la librairie d'être éclectique dans sa programmation et de n'avoir aucune obligation. « C'est la garantie d'une diversité. On peut, par exemple, promouvoir des livres autour du couronnement de Charles III et en même temps recevoir Alain Badiou, ancien maoïste, philosophe. On peut se permettre des grands écarts entre des choses plus commerciales, plus lucratives et celles qui relèvent de la niche. »

Dans le top 20 des librairies indépendantes

De la même façon, aux Volcans, on dit se préoccuper davantage de l'humain. Ici pas d'objectifs individuels. On parle d'ailleurs plutôt de contributions. C'est justement ce modèle coopératif et les valeurs qu'il incarne qui ont aussi séduit les Clermontois.

« Cela a clairement apporté à la librairie un capital sympathie. Les habitants nous soutiennent. On est également bien intégré au tissu économique et culturel de Clermont-Ferrand. Nous avons noué des partenariats avec La Comédie, qui est la Scène Nationale, avec la Maison de la Culture ou encore les bibliothèques. Ils nous ont aidé au moment de la reprise. On est reparti aussi grâce à eux » salue Boris Surjon.

Aujourd'hui, la librairie des Volcans est une véritable institution à Clermont-Ferrand, au même titre que Mollat à Bordeaux ou Ombres Blanches à Toulouse. Fondée il y a presque cinquante ans, on pourrait même dire qu'elle connaît une seconde jeunesse. Elle qui a enregistré l'an dernier un chiffre d'affaires de 7,6 millions d'euros (un peu moins que son exercice record de 2021-2022 qui s'élevait à 8 millions). Des résultats qui ont permis « aux Volcans » de se hisser à la 17ème place des librairies indépendantes en France selon le classement de Livre Hebdo. Que de chemin parcouru pour ce commerce qui réalisait, lors sa première année de reprise en Scop, un chiffre d'affaires de 4,4 millions.

Lieu de convivialité

Et la belle histoire n'est pas prête de s'arrêter. Car la nouvelle gérance a plein de projets en tête et notamment une ambition : faire « des Volcans » un lieu encore plus convivial. Pour cela, la librairie et ses 1760 m2 de surface commerciale vont être réaménagés. Pas question pour autant de toucher aux 80.000 références d'ouvrages présentes dans les rayons. Le projet, qui devrait aboutir en 2025, est en phase de réflexion avec un architecte. L'idée est de créer un espace de rencontre, cosy, où l'on peut boire un café et manger une pâtisserie.

« Nous voulons faire de la librairie un beau lieu de vie et de culture. Faire en sorte qu'il y ait toujours quelque chose. Il y a un modèle inspirant du côté d'Arles avec Actes Sud, où la librairie côtoie un cinéma, un café et même un hammam. Cela nous parle. Nous n'avons pas leurs moyens mais on a cette envie que les gens puissent passer du temps chez nous » expose Boris Surjon.

Les nouveaux gérants ne cachent pas, non plus, leur velléité d'agrandissement. En revanche, ils n'ont pas prévu d'acquérir de nouvelles librairies. « Si la Scop a décidé de reprendre en 2018 la librairie Horizons de Riom (à une quinzaine de kilomètres de Clermont-Ferrand), c'est que cette dernière était menacée de fermeture et que cela faisait écho à notre histoire » raconte le gérant. « Mais on ne fera pas une chaîne de librairies. Ce n'est pas dans notre ADN ».

Une cinquantaine de libraires françaises en Scop ou Scic

Aujourd'hui en France, une cinquantaine de librairies sont constituées en Scop ou Scic, Société coopérative d'intérêt collectif. Et il en apparaît de nouvelles chaque année. Comme en 2022, avec L'Astrolabe à Rennes, Bédélire à Tours ou encore Les Libreurs à Leucate dans l'Aude.

« Il y a un intérêt croissant pour ce statut dans le secteur » confirme Fatima Bellaredj, déléguée générale de la Confédération Générale des Scop. « Il y en avait moins d'une dizaine il y a dix ans. Et fait marquant, un peu plus de la moitié de ces librairies sont issues de reprises d'entreprises existantes par les salariés, le plus souvent dans le cadre de transmission après une retraite ou un départ du dirigeant. »

Les Volcans est un exemple emblématique dans le milieu coopératif. Les salariés ont repris l'activité alors que la période était compliquée pour les librairies. Pour Fatima Bellaredj, ils ont en quelque sorte ouvert la voie. « Ils sont encore aujourd'hui un modèle inspirant pour bon nombre de libraires. Ils ont montré que c'était possible. »

Selon elle, le statut de Scop ou Scic peut être un atout pour les librairies. Au-delà d'avoir la main sur les choix stratégiques et éditoriaux, le modèle permet aussi de bénéficier de financements et de conseils, ce qui facilite le démarrage. Les salariés associés peuvent notamment obtenir un prêt auprès du mouvement coopératif. La Scic permet, même, aux clients de rentrer au capital de l'entreprise. « La librairie La Cavale à Montpellier a été créée comme cela. 400 clients, lecteurs passionnés, ont financé le projet. Ils sont devenus sociétaires », raconte la déléguée générale de la Confédération Générale des Scop.

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