Immobilier, gestion de l’eau : la Banque des territoires joue l’amortisseur de crise aux côtés des collectivités

Bras armé et financé de la Caisse des Dépôts, la Banque des Territoires est un organisme que l’on peut qualifier de tentaculaire tant les projets qu’elle finance sont nombreux et diversifiés. Particulièrement active en 2023, l’entité de la région Auvergne-Rhône-Alpes a soutenu les collectivités locales et les entreprises face aux défis qu’elles traversent : dans la gestion de l’eau, la réindustrialisation du tissu et des friches industrielles mais avant tout, le logement social.
La Banque des Territoires s'engage aux côtés des territoires autour des enjeux de logements sociaux, mais aussi de transition énergétique et écologique.
La Banque des Territoires s'engage aux côtés des territoires autour des enjeux de logements sociaux, mais aussi de transition énergétique et écologique. (Crédits : Renaud Gaud/ADT07)

Dans le contexte économique compliqué qu'a connu l'année 2023, la Banque des Territoires a décidé de renforcé son soutien aux territoires. L'an dernier, elle a ainsi signé pour 1,6 milliard d'euros de prêts, soit une croissance de 7,2% rapport à 2022 et investi en fonds propres186 millions d'euros.

Cette augmentation des dotations répond à deux situations : une crise immobilière, qui a nécessité un appui fort aux bailleurs sociaux et une dynamique d'investissements forte des élus locaux, couplée à la transition énergétique.

Aux côtés des bailleurs sociaux face à la crise immobilière

Positionnée depuis toujours comme un acteur financier de premier ordre du logement social, la filiale de la Caisse des Dépôts a été directement confrontée à la crise de l'immobilier qui s'est installée depuis plus d'un an dans la région et peine à s'enrayer. Ce qui ne l'a pas empêchée d'être active sur le sujet en 2023, bien au contraire.

« Il faut qu'on réponde à la crise immobilière, que l'on soit présent dans le parc social », estime Barbara Falk, directrice régionale Auvergne-Rhône-Alpes de la Banque des Territoires. Qui rappelle : « les collectivités locales sont très affectées par cette crise, notamment les départements pour lesquels les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) sont en baisse majeure ». Le budget de la métropole de Lyon se trouve lui-même fortement affecté avec 122 millions d'euros en moins dans ses caisses de fonctionnement (sur un montant global de 3,11 milliard d'euros).

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Malgré le contexte, la Banque des Territoires a largement investi dans le logement social l'an dernier. « On a fait 1,43 milliard de prêts à l'habitat social, dont 293 millions d'euros de prêts à la réhabilitation, ce qui est presque surprenant, analyse Barbara Falk. Nous n'avons jamais fait d'aussi belles années, ce qui veut dire que les organismes de logements sociaux se sont mobilisés de manière majeure pour répondre à la crise du logement en rachetant en VEFA ce qui était disponible et en développant leur capacité de construction ».

Avec cette somme, en augmentation de 5% par rapport à 2022, l'institution financière a permis l'acquisition et la construction de 11.031 logements ainsi que la réhabilitation de 11.121 logements sociaux. A noter que, pour la première fois, le nombre de réhabilitations dépasse le nombre de constructions.

« L'une des spécificités de notre territoire est que l'on peut avoir de très grosses opérations comme la "Muraille de Chine" à Clermont Ferrand », poursuit directrice régionale Auvergne-Rhône-Alpes de la Banque des Territoires.

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A la demande de l'Etat, la Caisse des dépôts à accompagner les bailleurs sociaux grâce à diverses mesures. « Nous avons réalisé des prêts à taux négatifs, c'est-à-dire, le taux du livret A retranché de quelque chose, baissé le taux de prêts réglementés ou encore soutenu les opérateurs avec des titres participatifs. Cela signifie que l'on entre à leur capital pour un temps déterminé. » D'autres outils viennent compléter cet arsenal, notamment les éco-prêts, ou encore les prêts haut de bilan pour la construction verte.

Des élus prêts à investir pour l'avenir

Arrivées à mi-mandat, les collectivités ont pu établir les besoins de leur territoire et déterminer les projets qu'elles souhaitaient faire sortir de terre. La période 2024-2025 suivra l'exemple de l'année 2023 au cours de laquelle les territoires ont beaucoup investi, estime Barbara Falk. Le soutien de la Banque des Territoires sera essentiel, notamment au regard des conditions qu'elle offre.

« Nos prêts sont compétitifs car principalement basé sur le livret A qui a conservé son taux de 3%, ce qui reste encore inférieur au taux du marché et il y a une vraie perspective de baisse à moyen terme. Ce qui fait que nous avons une offre très prisée des collectivités locales. » Résultat, le volume des financements apporté aux collectivités double en un an pour atteindre les 154 millions d'euros prêtés.

Les projets dédiés à la transformation écologique qui ont été financés, pour partie, par l'organisme de financement, s'élèvent à 343.

La gestion de l'eau, un sujet qui émerge

Parmi les sujets qui montent au sein de la Banque des Territoires, on peut citer : la gestion de l'eau. Si la sonnette d'alarme sur cette ressource est tirée depuis plusieurs années, l'intérêt des élus sur le sujet est de plus en plus marquant.

« La gestion de l'eau est un sujet important avec une concentration autour du petit cycle de l'eau, comme la rénovation des canalisations. Dans certaines espaces, on observe 50% de fuites. Ce sont des zones souvent peu denses où les travaux sont très chers. On va de plus en plus aller vers le grand cycle, c'est-à-dire, l'eau dans son milieu naturel » , développe Barbara Falk.

Si ce type de projets émergent, c'est parce que la Banque des Territoires va « très loin en termes de durée de prêts ». Et ce, grâce à la fiabilité et la confiance dans le livret A qui permet de financer des projets sur plusieurs décennies. Car « rénover un réseau d'eau ou d'assainissement ne doit pas entrer en concurrence avec la réhabilitation de gymnases. Si l'on peut prêter sur 60 ans, on peut faire les deux. Et ce, avec des taux à marge extrêmement réduite voire nulle ». L'an dernier, 43 prêts ont été réalisés sur cette seule problématique, pour 61 millions d'euros.

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La Station d'épuration des Trois Rivières à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme) a par exemple bénéficié de trois prêts portant sur l'extension des filières de traitement des eaux et des boues et de valorisation énergétique, la construction de six bassins de stockage-restitution et les travaux de renouvellement des réseaux d'assainissement. Le tout, pour un coût global de 77 millions d'euros dont 19,7 millions ont fait l'objet d'un financement de la Banque des Territoires Auvergne-Rhône-Alpes.

Foncier et formation, deux enjeux majeurs pour l'industrie

Autre atout majeur de la Région : son tissu industriel. L'organisme financier régional agit souvent de concert avec Bpifrance en finançant les murs pendant que son homologue parisien subventionne la R&D.

Les investissements portent principalement sur « des grosses PME qui ont besoin de construire une usine, car elles ont atteint le stade où elles doivent se développer et s'industrialiser. » Une problématique qui concerne l'ensemble du territoire doté de nombreux pôles industriels : Lyon, Saint-Etienne, Grenoble ou encore Clermont-Ferrand.

Ces investissements financent parfois la rénovation de friches industrielles, une stratégie qui s'inscrit dans le respect de la Loi zéro artificialisation nette (ZAN) visant à limiter la bétonisation des sols. Un dispositif qui se traduit inévitablement par une raréfaction du foncier, poussant ainsi à « une gestion intelligente » des implantations, reconnaît Barbara Falk.

Cette tension sur le foncier s'avère particulièrement forte dans la métropole lyonnaise et sur les terrains de grande surface, propre à accueillir des gigafactories. Ce qui a d'ailleurs poussé plusieurs acteurs comme l'isérois Verkor et le lyonnais Carbon à installer leurs usines dans d'autres régions, pointe la directrice régionale de la Banque des Territoires.

Fortes de ce constat, les diverses entités de la Banque des Territoires ont décidé de se rassembler pour examiner cette problématique dans les mois à venir, afin de mieux anticiper les besoins et les difficultés des entreprises industrielles et ainsi éviter de futures expatriations hors de France.

De son côté, la Région a lancé, en juin 2023, un dispositif sur le foncier industriel doté d'un budget de 100 millions d'euros sur cinq ans afin de mieux répondre aux besoins des industriels. Ce plan doit également préserver jusqu'à 1.900 hectares de foncier pour l'industrie.

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Opérateur France 2030, la Banque des Territoires a déjà engagé 38,5 millions d'euros dans ce cadre. Parmi les opérations co-financées, on peut citer le centre de formation ardéchois aux métiers du nucléaire (Voulte-sur-Rhône) et 2 millions d'euros à la communauté d'agglomération de Privas Centre Ardèche pour construire ce centre. Un investissement qui répond à un besoin réel pour répondre au plan du gouvernement de recruter 100.000 personnes dans le secteur d'ici 10 ans. En tant que première région française productrice d'énergie nucléaire, Auvergne-Rhône-Alpes est particulièrement concernée par cet enjeu.

Autant de sujets qui ont marqué l'année 2023 pour la Banque des Territoires de la Région Auvergne-Rhône-Alpes et devraient continuer à figurer dans la liste de ses priorités pour 2024 et 2025. Barbara Falk entend bien faire autant, si ce n'est plus pour le logement social, mais aussi la transition écologique et énergétique sur le territoire.

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