Logement social : le bail réel solidaire monte en flèche dans la Métropole de Lyon

Le bail réel solidaire (BRS), qui consiste à dissocier le foncier du bâti, permet aux acquéreurs modestes d'acheter un bien presque à la moitié du prix du marché. À la veille des 5e rencontres des organismes de foncier solidaire (OFS), qui se déroulent à Lyon le 21 et 22 novembre 2023, la Métropole annonce avoir déjà engagé 1.200 logements avec ce type de contrat, créé en 2016 en France. Exemple à la Croix-Rousse, l'un des quartiers les plus chers de la collectivité.
La Métropole de Lyon entend créer 1.000 logements sociaux en bail réel solidaire chaque année.
La Métropole de Lyon entend créer 1.000 logements sociaux en bail réel solidaire chaque année. (Crédits : Inui)

Face à la crise du logement, les élus du Grand Lyon, deuxième métropole de France, le répètent à chaque occasion : « Le logement social est la clé de voûte », affirmait ce lundi Renaud Payre, vice-président de la collectivité délégué à l'habitat, et par ailleurs président de Foncier Solidaire France, dont les 160 organismes de l'Hexagone se réunissent cette semaine à Lyon.

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Si la crise s'appuie, selon lui, sur des leviers conjoncturels (hausse des taux d'intérêt, chute de la demande), elle serait aussi structurelle, avec dans certains quartiers, un rééquilibrage des prix et des types de biens jugé nécessaire « afin de faire revenir des populations qui se sont appauvries du logement, ou qui en étaient même exclues », remarque l'élu. D'où l'intervention du bail réel solidaire (BRS) dans l'équation que tente d'équilibrer la majorité écologiste.

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Ce type de contrat créé en 2016 en France, qui entre dans le cadre du logement social, dissocie en effet le foncier, propriété externe, souvent publique, du bâti. Avec cette opération, l'objectif est de réduire le prix d'achat d'un bien immobilier de moitié, aux environs de 3.400 à 3.600 euros le m2 à Lyon, contre 7.000 euros en moyenne dans le quartier de La Croix Rousse par exemple. Le tout, sous conditions de ressources pour les acquéreurs, à l'achat comme au rachat, qui doivent être éligibles au locatif intermédiaire (l'un des trois échelons du logement social). Sachant que 72 % des habitants de la Métropole sont éligibles à au moins un niveau.

À La Croix-Rousse, l'enjeu du rééquilibrage de la part de logements sociaux

Ce rééquilibrage vient notamment répondre aux tensions sur les logements dans de nombreuses communes urbaines. Exemple dans le quartier très « gentrifié » de La Croix-Rousse, à Lyon. Ce secteur des pentes de la presqu'île et de son plateau, à l'histoire notamment ouvrière, a vu sa population grossir et se densifier depuis le début des années 2000, au point qu'il est devenu l'un des plus prisé de la capitale des Gaules.

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« Jusqu'à atteindre 10.000 euros le m2 », détaille Aline Guitard, adjointe à l'urbanisme du 4e arrondissement. « Plus de logements accessibles, du foncier métropolitain vendu au privé... », énumère l'adjointe. Illustration avec l'ancien collège Maurice Scève, côté Rhône, réorienté en 2021 par la Métropole vers l'Office foncier solidaire après l'échec de son opération par Vinci : alors qu'il était destiné à des opérations classiques, au prix du marché, le futur lotissement du « Jardin des Balmes » proposera finalement 105 logements sociaux, qui devraient désormais sortir de terre en 2024. Dont 67 en BRS. Cette seule opération permettrait d'atteindre le niveau de logements sociaux ajoutés en un an à La Croix-Rousse. Pourtant, ils restent encore trop peu nombreux, accrochés à 17 % de la part globale des logements. En dessous des 25 % minimum ordonnés par la loi SRU.

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Selon Renaud Payre, aussi président de Foncier Solidaire France, le BRS permettrait de rehausser « rapidement » la part de logements sociaux. Car depuis 2019, la Métropole est passée de zéro à 1.200 habitats de ce type créés, « à raison de 2 à 3 personnes par foyer », répond l'élu. Une enveloppe de 40 millions d'euros a été affectée en ce sens à la Foncière Solidaire du Grand Lyon depuis 2020, pour monter en charge progressivement sur l'achat de foncier jusqu'à 2026. L'objectif de l'exécutif métropolitain aujourd'hui : créer chaque année 1.000 logements supplémentaires en BRS.

55 % des acquéreurs sont en dessous du seuil de 60 % du PSA.

Mais le foncier disponible est-il suffisant ? Acheté parfois à prix coûtant par la Foncière solidaire, sous perfusion de la Métropole, ce n'est pas l'unique réponse selon Renaud Payre :

« Il y a cette opération, il y en a d'autres. Nous allons très probablement annoncer des choses du côté de la halle Debourg. Il y en a aussi du côté de Paul Bert (3e arrondissement), pour du foncier métropolitain. Mais parfois, les opérations de promotion immobilière sont amenées à produire du BRS, à le commercialiser. C'est assez singulier à Lyon, toutes les agglomérations ne le permettent pas. Nous utilisons tous les leviers, notamment la promotion privée, pour produire du logement abordable », répond Renaud Payre.

 En effet, le BRS, inscrit dans le Plan local d'urbanisme et de l'habitat (PLU-H) de la collectivité, doit représenter 10 % des logements d'une opération immobilière, à partir d'un certain seuil de déclenchement. De même, la part des logements locatifs sociaux s'élève à 30 %. Pour autant, le contexte actuel met à l'arrêt de nombreuses opérations immobilières. La Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) de la région lyonnaise relevait en septembre 2023 une diminution de 40 % des réservations de logements neufs (unités et blocs) en un an.

Aide d'urgence de 10 millions d'euros : en deux mois, 900 logements locatifs sociaux créés.

Pour dégripper le marché immobilier, qui empêche le lancement de nombreuses opérations, la Métropole de Lyon a débloqué une aide « d'urgence » de 10 millions d'euros le 29 septembre 2023. L'idée est de racheter des parts de logements libres aux promoteurs afin de lancer les travaux, et par ailleurs les faire basculer vers le parc social, en prêt locatif social (PLS) et en bail réel solidaire (BRS).

En à peine deux mois, déjà 80 dossiers ont été déposés auprès de la collectivité. Au premier comptage, près de 900 logements locatifs sociaux (PLS) seraient déjà créés par cette opération, indique Renaud Payre, qui ajoute :

« Nous sommes en train de les administrer, de faire les allers-retours avec les communes. 80 dossiers déposés, ce ne sont pas 80 projets acceptés. Mais cela montre l'ampleur de la crise, où les promoteurs sont dans une situation de blocage ».

La Métropole espère ainsi sauver 3.000 logements avec cette enveloppe qui courra jusqu'à 2024. Le Président de la Métropole de Lyon, Bruno Bernard, n'a pas exclu de la reconduire.

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