Auvergne Rhône-Alpes : la filière de l’apprentissage en alerte pour cette rentrée

D’après la dernière édition du baromètre de l'artisanat, commanditée par l'Institut Supérieur des Métiers (ISM) et l’assureur MAAF, la crise du Covid-19 pourrait fragiliser la progression des effectifs de l’apprentissage en Auvergne-Rhône-Alpes. Touchés au même titre que les salariés par des baisses d’activités observées depuis la mi-mars, les apprentis pourraient avoir plus de mal à faire leur rentrée cette année. Et ce, malgré des mesures gouvernementales encourageantes, comprises du sein du plan de relance.
(Crédits : DR)

En Auvergne-Rhône-Alpes, les effectifs des CFA seront-il, comme l'an dernier, en hausse de + 1 % ? Rien n'est aussi sûr désormais, aux lendemains de la crise sanitaire qui secoue encore le pays. Car s'il demeure encore difficile de recueillir des données sur la rentrée 2020, l'Institut Supérieur des Métiers (ISM) et l'assureur MAAF ont d'ores et déjà dressé un premier bilan de l'année écoulée.

Alors que la fermeture administrative de certaines activités aurait contraint près de 25.000 apprentis à cesser leur travail en entreprise au niveau national, les apprentis de la région Auvergne Rhône-Alpes ont aussi été touchés sur la période allant de mars à juin 2020 : au total, ce sont près de 2. 850 apprentis qui ont été contraints de mettre leurs activités à l'arrêt. Parmi les secteurs les plus concernés : la filière des services à la personne (coiffure, soins de beauté) mais également, le commerce de fleurs.

Des chiffres qui pourraient même être plus importants car, d'après Catherine Elie, directrice l'Institut Supérieur des Métiers, "ces données ne prennent en compte que le nombre d'établissements soumis à des fermetures administratives. Or, il existe des entreprises qui ont dû suspendre leurs activités totalement ou temporairement par défaut de clients, ou d'approvisionnement sur cette période".

La prudence demeure de mise

Bien que la reprise semble désormais à l'ordre du jour pour les activités artisanales, "on ne sait pas encore comment va se passer cette rentrée scolaire", résume Catherine Elie, qui rappelle que si le taux d'emploi des salariés s'est globalement maintenu au second trimestre dans le secteur de l'artisanat, grâce aux dispositifs d'activité partielle prévus par l'Etat. "Les entreprises artisanales ont pour la plupart stoppé leur dynamique de recrutement et font preuve de prudence".

Si l'on reprend l'exemple d'une crise -néanmoins d'une autre nature- comme celle de 2008-2009, la baisse d'activité a été couplée à une baisse du taux d'apprentissage. "C'est la raison pour laquelle nous avions alerté lors de la période du confinement, afin de ne pas relâcher les efforts. Retrouver les baisses successives que nous avons connu au début des années 2010 (-13 % en 2012-2013) serait dramatique et il faudrait plusieurs années pour s'en relever", met en garde l'ISM.

Deux facteurs pourraient cependant permettre à la filière de l'apprentissage de relever la tête : à savoir, la reprise d'activité, totale ou partielle, déjà observée depuis quelques semaines pour la plupart des entreprises artisanales, certains secteurs comme les métiers de bouche (pâtissiers, bouchers, boulangers...) n'ayant quant à eux pas stoppé leurs activités. Mais aussi, le montant des aides accordées par le gouvernement aux entreprises qui recruteront cette année des apprentis, à travers le Plan jeunes, qui se veut comme l'un des axes majeurs du Plan de relance.

Un objectif : limiter l'érosion du nombre d'apprentis formés

Le gouvernement vient en effet d'annoncer un soutien bonifié à 5.000 euros aux entreprises qui recruteront d'ici fin février un apprenti de moins de 18 ans, allant même jusqu'à 8.000 euros pour un apprenti majeur, ce qui représente, pour les entreprises concernées, un coût quasi nul jusqu'aux 21 ans révolus de leur apprenti.

Des mesures qui visent surtout à limiter l'érosion au sein des rangs des apprentis, en vue de stabiliser, pour l'année à venir, le seuil des 368.000 contrats d'apprentissage enregistrés en 2019 (contre 317.000 en 2018). "Il est probable que ces aides puissent débloquer des signatures de contrats d'apprentissage au cours des prochaines semaines encore, les décrets d'application étant parus cet été", note Catherine Elie.

D'autant plus que le dispositif imaginé par le gouvernement français post-crise prévoit que cette année, les jeunes entrant en centre de formation des apprentis (CFA) entre le 1er août et le 31 décembre 2020 pourront démarrer leur formation sans contrat durant une période de six mois, le temps de trouver une entreprise.

La région AURA, le plus grand bassin d'apprentis

Dans sa dernière édition, le baromètre ISM-Maaf rappelle que l'artisanat demeure une filière d'importance pour la région Auvergne-Rhône-Alpes, qui concentre le plus grand nombre d'apprentis en France, avec près de 19.900 jeunes formés l'an dernier (sur un total de 150.000 jeunes inscrits à l'échelle de l'Hexagone).

C'est d'ailleurs le département du Rhône qui rassemblait le plus d'apprentis (3.850 jeunes) suivi par l'Isère (3.350), la Loire (2.110) et la Haute-Savoie (2.100). Avec également, une grande variété au sein des diplômes préparés puisque 60 % des inscrits visaient des diplômes de niveau CAP, 29 % des niveau BAC/BP et 11 % des formations de l'enseignement supérieur. Deux secteurs ont même connu une augmentation du nombre d'apprentis au niveau régional par rapport à l'année précédente : la filière des services, qui a enregistré l'an dernier une progression de 3 % de ses effectifs, ainsi que le BTP (+2 %).

Reste une pointe d'optimisme que l'ISM ne manque pas de rappeler : malgré ce contexte difficile, les apprentis pourraient cependant compter sur un taux d'emploi plus favorable que celui des jeunes diplômés issus de la voie scolaire traditionnelle. Alors que le taux d'emploi d'un apprenti, sept mois après l'obtention de son diplôme, serait ainsi de 71 % en Auvergne-Rhône-Alpes (contre 68% pour la moyenne nationale), un autre chiffre démontre qu'un jeune, détenteur d'un brevet professionnel dans l'artisanat, présenterait également un taux d'emploi (83 %) supérieur à un élève sortant de BTS (68 %).

De quoi donner un coup de pouce pour se faire une place en temps de crise ? L'ISM veut en tous les cas y croire. "Les taux d'insertion dans la vie active sont toujours favorables aux jeunes formés par apprentissage -au moment de l'embauche, prime est
toujours donnée par l'entreprise à l'expérience. Mais ils dépendent, sans surprise, du contexte économique local", ajoute Catherine Elie.

Alors que le confinement aurait provoqué une baisse de l'activité en France de 32 %, la région Auvergne-Rhône-Alpes faisait partie des plus touchées, avec 34 % de baisse, aux côtés de la Corse (-35 %) et à l'Île-de-France (-34%), en raison de la part occupée par l'industrie au sein de son économie, d'après la note de conjoncture de l'INSEE.

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