Intelligence artificielle : à Grenoble, le Cluster MIAI élargira son spectre au quantique, à l'éducation et aux industries créatives

Avec un PIB de 45 millions d'euros, 59.500 étudiants dans l'enseignement supérieur, l'Isère bénéficie d'une large communauté scientifique portée par ses 13 centres de recherche nationaux et internationaux, de nombreux centres de R&D privés mais aussi des pôles de compétitivité et d'excellence comme Minalogic, dans les micro-nanotechnologies et les systèmes embarqués, ou encore MIAI...dans l'intelligence artificielle. Ce dernier vient d'ailleurs d'être nommé lauréat de l'appel à manifestation d'intérêt « IA Cluster : pôles de recherche et de formation en IA ». Une annonce qui vient confirmer sa labellisation 3IA et ouvrir un nouveau chapitre dans son développement.
Dans le cadre l'appel à manifestation d'intérêt « IA Cluster », la dotation de l'Institut grenoblois s'élèvera à 70 millions d'euros sur cinq ans. Soit l'une des trois enveloppes les plus élevées décernés aux neuf lauréats, qui représente, à elle seule, 19% du budget total (360 millions d'euros).
Dans le cadre l'appel à manifestation d'intérêt « IA Cluster », la dotation de l'Institut grenoblois s'élèvera à 70 millions d'euros sur cinq ans. Soit l'une des trois enveloppes les plus élevées décernés aux neuf lauréats, qui représente, à elle seule, 19% du budget total (360 millions d'euros). (Crédits : DR)

Et de deux ! Après avoir été lauréat de l'appel à manifestation d'intérêt (AMI) « 3IA » en 2019, le Multidisciplinary Institute in Artificial Intelligence (MIAI@Grenoble-Alpes), chapeauté par l'Université Grenoble Alpes (grand établissement), vient de remporter un nouvel AMI intitulé : « IA Cluster : pôles de recherche et de formation en IA ». Objectif : renforcer le travail effectué pendant plus de cinq ans, tout en élargissant ses domaines d'activités et son offre de formations.

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Entre sa labellisation 3IA en 2019 et aujourd'hui, l'Institut s'est concentré sur les fondamentaux de l'IA (architecture matérielle et IA embarquée, apprentissage automatique et raisonnement, perception et interaction), les cadres juridique et éthique de l'IA, les conditions d'acceptation de l'IA, la formation ainsi que le développement de solutions pour les entreprises. Ce, en se basant sur trois domaines d'applications particuliers : l'énergie et l'environnement, la santé et l'industrie 4.0, détaille à La Tribune Eric Gaussier, directeur du MIAI et du laboratoire d'informatique de Grenoble (LIG, CNRS/Grenoble INP/Inria/UGA).

Cinq ans après son lancement, le cluster entre dans une deuxième phase de développement, en partie porté par ce nouvel appel à manifestation d'intérêt. Avec, pour maître mot, la continuité avec le travail précédemment réalisé. Le tout, en élargissant ses domaines d'application.

Elargir le spectre de ses compétences - Passer un nouveau cap

Avec la nouvelle enveloppe de 70 millions d'euros que vient de lui octroyer l'Etat pour les cinq prochaines années, le cluster entend bien élargir son spectre de recherche et d'innovation.

« Nous allons reprendre tous les éléments de la première phase : fondamentaux de l'IA (cœur IA), les enjeux sociétaux, la formation et les trois domaines d'application. Les aspects cœur de l'IA continueront de couvrir un spectre large, des architectures matérielles et embarquées jusqu'aux modèles mathématiques et logiciels d'IA modernes », développe le directeur de l'institut.

Une attention plus forte sera également apportée aux IA génératives, interactives, embarquées, frugales et de confiance par design. « Développer une IA au service des humains et de l'environnement a toujours été notre Motto », poursuit-il, pointant le caractère fédérateur de cette vision au sein de l'institut.

Ainsi, le travail effectué sur les cadres juridiques et éthiques de l'IA ainsi que les conditions d'acceptation se poursuivront en accompagnant les chercheurs et les développeurs sur ces enjeux. Ce, grâce au soutien de spécialistes en sciences sociales.

Trois nouveaux champs d'application viendront s'ajouter à ceux précédemment cités : l'IA et le quantique, l'IA et l'éducation et l'IA et les industries culturelles et créatives. Avec une précision concernant le quantique : « Nous ne connaissons pas encore les apports respectifs que ces deux technologies peuvent avoir entre elles, mais les deux sont perçues comme essentielles pour l'avenir. Il est donc important de réfléchir à d'éventuelles convergences entre elles. »

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L'intégration de l'IA et des industries culturelles et créatives tient, quant à elle, d'un rapprochement opéré entre le Cluster et deux acteurs académiques. « Un point différenciant par rapport à la phase 1 est que nous avons deux nouveaux partenaires : l'université Clermont Auvergne et l'Université Savoie Mont-Blanc. On veut travailler avec ces partenaires autour de thématiques communes, or il y a de nombreuses industries culturelles et créatives près d'Annecy. »

Créer une école de l'IA

Un autre grand axe de développement consistera à élargir son offre de formations à l'IA afin de diffuser les fondamentaux de cette technologie à davantage d'étudiants, mais aussi d'enseignants. En France comme ailleurs, et ce auprès d'un public qui souhaite ou non en faire son métier.

« Nous avons récemment créé une chaire sur le domaine de l'IA et l'éducation. Le marché n'est pas forcément très grand, mais le domaine est très actif et tout le monde a besoin de savoir comment utiliser l'IA. Il faut également apprendre aux élèves comment s'en emparer et quelles sont ses limites ».

Une volonté qui fait écho aux travaux menés par Efelia-MIAI (Efelia est l'acronyme de l'Ecole française de l'intelligence artificielle), la branche de l'institut consacrée à la formation qui a, elle-même, été lauréate d'un appel à projets par le passé.

L'objectif étant de former des centaines d'étudiants à l'IA chaque année et devenir une école de référence pour l'apprentissage de l'IA, confie Eric Gaussier. « Depuis 2022, nous formons plus de 2.600 personnes par an à l'IA et espérons former environ 4.000 personnes par an en 2030 sur les trois sites (Grenoble, Clermont-Ferrand, Savoie Mont-Blanc) ».

Et le potentiel est là : « Les jeunes étudiants sont de plus en plus intéressés et nous allons faire de gros efforts pour arriver à créer des cours qui puissent être vus par un large public, notamment par des cours en ligne. Nous allons aussi développer des plateformes pédagogiques pour y déposer nos cours et former les enseignants. »

Un vaste programme qui devrait permettre d'ajouter aux formations de niveau Master un panel d'offres visant des équivalents licence et BTS. L'idée étant qu'un maximum de jeunes soient formés à la compréhension du fonctionnement et du potentiel de l'IA autant qu'à ses limites.

200 recrutements prévus 

Au cours de la phase 1, l'Institut avait bénéficié d'un soutien financier de l'Etat, via le programme 3.I.A, d'un financement de 22 millions d'euros sur quatre ans (hors financement Efelia-MIAI, de l'ordre de 67 millions d'euros). Un montant complété par 23 millions d'euros de ses partenaires industriels et environ 25 millions d'euros de la part de partenaires académiques.

Dans le cadre l'appel à manifestation d'intérêt « IA Cluster », la dotation de l'Institut s'élèvera à 70 millions d'euros sur cinq ans. Soit l'une des trois enveloppes les plus élevées décernés aux neuf lauréats, qui représente, à elle seule, 19% du budget total de 360 millions d'euros du plan. Un budget qui devrait être renforcé par 35 millions d'euros de la part de ses partenaires industrielles et une somme sans doute équivalente de la part des partenaires académiques, estime Eric Gaussier.

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« Nous allons avoir une augmentation significative du budget de l'Institut et cela va nous permettre d'aborder avec confiance toutes les actions envisagées » , confirme Eric Gaussier. Avec une répartition entre la recherche, l'innovation et la formation. Tout en sachant que le poste qui absorbera le maximum de dépenses sera celui du recrutement.

« Nous nous appuyons sur des infrastructures de calcul nationales, donc nous n'avons pas de gros investissements à réaliser en matériel. Par contre, nous allons recruter environ 200 personnes : des chercheurs et des chercheuses, post-doc, en thèse ou encore des ingénieurs...pour développer toutes les actions que l'on doit mener ».

De nouvelles personnalités qui rejoindront les 250 membres permanents du monde académique et la centaine de membres non permanents que compte MIAI@Grenoble-Alpes).

Attirer davantage d'industriels dans son sillon

En parallèle, l'Institut poursuivra le développement de solutions innovantes basées sur l'IA avec des partenaires industriels tels que Google, EDF, Qarnot, Huawei, Air Liquid ou encore Thalès pour ne citer qu'eux.

« Nous travaillons sur la base d'accords en général bipartites avec nos partenaires industriels en essayant d'être flexibles pour répondre à leurs besoins et protéger leur propriété intellectuelle. Au cours de la phase 1, nous avons pu conclure 150 contrats de ce type » révèle Eric Gaussier qui insiste sur le fait que l'enveloppe de l'Etat ne sert pas à financer ces projets de recherche.

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« Depuis 2019-2020, on observe une forte appétence des industriels pour l'IA. Certains s'en emparent plus rapidement que d'autres, notamment les grandes entreprises ou celles dont les métiers sont en lien avec le numérique. Mais il n'y pas d'ambiguïté sur son attractivité. »

Et la tendance devrait se poursuivre lors de cette deuxième phase de développement car le cluster a gagné en visibilité grâce au précédent programme. Et l'IA a fait ses preuves.

« Au cours de cette première phase, nous avons réussi à structurer l'écosystème de l'IA sur Grenoble. De nombreux acteurs travaillaient de manière isolée et nous avons réussi à les fédérer » , constate t-il. « Et pouvoir financer les recherches de façon confortable et se doter d'une masse critique de chercheurs nous a également permis de faire nos preuves et de gagner en visibilité et donc en impact. » Ce qui s'est concrètement traduit par la publication de nombreux articles et la création de 17 start-ups.

Et Eric Gaussier est convaincu que l'attractivité apportée par le programme 3IA sera équivalente avec ce nouveau programme.

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