Au CHU de Saint-Etienne, l'IA pourrait accompagner le geste des chirurgiens sur les coelioscopies

Le CHU de Saint-Etienne vient de signer un partenariat stratégique de quatre ans avec la medtech clermontoise Surgar. Il vise à collecter des données opératoires qui viendront nourrir l’algorithme de l’IA développé par la start-up. Avec comme objectif : l'amélioration des procédures de chirurgies mini-invasives, en vue de proposer un meilleur guidage des gestes chirurgicaux dans les cœlioscopies touchant notamment à l’utérus, au foie et aux reins.
D'ici 2030, Surgar vise 100.000 patients opérés avec son dispositif, afin d'augmenter le nombre de chirurgies mini-invasives réalisées sur trois organes ciblés : l'utérus, le foie et le rein.
D'ici 2030, Surgar vise 100.000 patients opérés avec son dispositif, afin d'augmenter le nombre de chirurgies mini-invasives réalisées sur trois organes ciblés : l'utérus, le foie et le rein. (Crédits : Surgar)

Moins lourde, plus rapide, avec une hospitalisation généralement plus courte et moins de risques de complications... La chirurgie mini-invasive est devenue un axe fort de l'offre du système de santé et connaît depuis quelques années un fort développement. Cette technique chirurgicale, aussi appelée laparoscopie ou cœlioscopie, consiste en effet à pratiquer une incision la plus fine possible, puis à opérer avec l'aide d'une assistance vidéo.

Les chiffres sont très variables d'une spécialité à l'autre et difficiles à consolider, mais la croissance du marché global de ces dispositifs en atteste : selon le cabinet d'intelligence économique, Mordor Intelligence, le marché mondial s'établirait actuellement à 32,1 milliards de dollars. En 2028, il pourrait dépasser les 42 milliards de dollars.

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C'est sur ce secteur en plein essor que la start-up clermontoise Surgar (pour Surgical Augmented Reality) s'est positionnée depuis sa création en 2019 par les professeurs Adrien Bartoli et Nicolas Bourdel (chirurgiens gynécologues au CHU de Clermont-Ferrand).

Un partenariat avec le CHU de Saint-Etienne pour entrainer son IA

Après une dizaine d'années de recherche, menées conjointement par le CHU de Clermont, l'université Clermont Auvergne et le CNRS, la start-up de 28 salariés a choisi de s'intéresser non pas aux robots opératoires, mais aux logiciels de réalité augmentée destinés aux opérations chirurgicales par laparoscopie.

Avec un objectif : combiner en temps réel, grâce à l'intelligence artificielle, les images préopératoires (scanner, IRM etc) et celles issues de l'intervention.

En superposant l'information virtuelle issue des données de l'imagerie pré-opératoire à la vue chirurgicale, le logiciel de Surgar doit ainsi permettre un guidage plus précis des gestes chirurgicaux.

La start-up devrait mettre sur le marché son premier produit, d'ici la fin de l'année, après obtention du marquage CE : il visera en premier lieu les chirurgies mini-invasives de l'utérus.

Un logiciel dédié au foie est annoncé pour 2025. Et c'est justement plus particulièrement pour cette application que Surgar vient de signer un partenariat stratégique de quatre ans avec le CHU de Saint-Etienne.

Objectif : collecter les données d'opérations pratiquées par l'établissement hospitalo-universitaire, afin d'entraîner l'intelligence artificielle de son dispositif. Une première phase d'une centaine d'opérations, d'ici la fin de l'été, est visée afin de franchir une nouvelle étape de développement pour l'accompagnement des opérations du foie.

100.000 patients traités d'ici 2030

« Les opérations mini-invasives présentent de très nombreux avantages. Mais il y a des freins, notamment la décoordination main/œil du chirurgien puisque celui-ci ne peut voir directement l'organe sur lequel il intervient. Il le visualise sur un écran, via l'assistance vidéo. Les logiciels de Surgar doivent permettre d'effacer ces problématiques afin d'augmenter significativement le nombre de chirurgies mini-invasives pour les trois organes que nous ciblons pour le moment : l'utérus, le foie et le rein », explique Nicolas Bourdel, chirurgien gynécologue et co-fondateur de Surgar.

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Plus spécifiquement, pour le foie, la plus-value apportée serait importante, selon le professeur Bertrand le Roy, chef du service de chirurgie viscérale et digestive du CHU de Saint-Etienne (équipe de 70 personnes dont 9 chirurgiens). Une plus-value qu'il avait d'ailleurs immédiatement détectée, après avoir pris connaissance des travaux des professeurs Adrien Bartoli et de Nicolas Bourdel autour de l'utérus, et qui l'avait convaincu de s'associer à ses collègues chirurgiens et développer plus spécifiquement un dispositif dédié au foie.

« Le foie est un organe très gros. Les tumeurs sont détectées sur les images pré-opératoires mais lors de l'intervention, il est souvent difficile de les retrouver. D'autant que la chirurgie mini-invasive modifie l'organe puisqu'on insuffle du CO2 afin d'avoir plus d'espace.  Aujourd'hui, pour retrouver les tumeurs dans le foie, on passe par l'échographie mais les images ne sont pas très bonnes. L'intelligence artificielle doit permettre de corriger en temps réel ces différences entre les images pré-opératoires et ce que le chirurgien a en face de lui », explicite Bertrand le Roy.

Si le logiciel de Surgar dédié aux chirurgies de l'utérus est plus avancé, sa déclinaison concernant le foie en est à la phase 1.

« Pour l'instant, il est capable de reconnaître le foie et d'afficher les tumeurs. Maintenant, il doit apprendre à recaler les images en temps réel pendant l'intervention. C'est exactement ce que nous allons lui apprendre à faire en l'utilisant pendant plusieurs dizaines d'opérations sur les mois à venir. L'algorithme va se nourrir de toutes ces données qui seront bien sûr anonymisées ».

Une levée de fonds de 6 millions d'euros à venir

Ce partenariat avec le CHU de Saint-Etienne s'ajoute à ceux signés avec le CHU de Clermont, avec l'AP-HP et à celui qui devrait bientôt être validé avec celui de Grenoble.

Ces coopérations assurent à la start-up une masse de données suffisantes pour nourrir son algorithme et aux établissements hospitaliers la possibilité de se positionner comme précurseurs de cette nouvelle technologie. Car sur ce marché, le co-fondateur de Surgar l'atteste : il ne ferait face à aucun concurrent direct en France tandis que sur le marché mondial, des équipes américaines plancheraient également sur le sujet.

Après l'utérus et le foie, Surgar devrait se lancer, à moyen terme, sur le rein. À horizon de six ans, l'ambition est d'avoir contribué aux opérations de 100.000 patients (sur les trois spécialités) tout en ayant divisé par deux le nombre de complications. Un chiffre d'affaires de 40 millions d'euros est attendu d'ici 2030.

Pour monter en puissance, recruter, investir dans les démarches réglementaires et dans sa R&D, Surgar travaille sur une levée de fonds de six millions d'euros. Elle a déjà levé, depuis sa création, cinq millions d'euros.

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