Face à la 5e vague, Bioguard s'est préparé à désinfecter bien plus que des billets de banque

Inventeur d'une technique de désinfection des billets de banque il y a une vingtaine d'années, le fabricant Bioguard & Co, filiale de l'imprimeur Oberthur implantée en Isère, a pu montrer que sa solution permettait de lutter contre le Covid-19 et l'a étendue à des papiers et des surfaces, grâce à un vernis spécial. A l'aube d'une cinquième vague désormais offensive, la startup a séduit la Région et entend désormais se diversifier, en se préparant notamment à traiter désormais du papier kraft, utilisé pour les emballages.
Depuis une quinzaine d'années, la technologie Bioguard est utilisée dans plusieurs pays dans le monde entier pour protéger les billets de banque, à travers le laboratoire VHP Security Paper, basé à Apprieu (Isère).
Depuis une quinzaine d'années, la technologie Bioguard est utilisée dans plusieurs pays dans le monde entier pour protéger les billets de banque, à travers le laboratoire VHP Security Paper, basé à Apprieu (Isère). (Crédits : DR)

C'est une annonce de la Région Auvergne Rhône-Alpes, qui a mis sur le devant de la scène la diversification, menée depuis la crise sanitaire, par un fabricant dont la technologie se destinait, en premier lieu, au marché des billets de banques.

Car à la mi-octobre, le fabricant Bioguard, filiale du Groupe François-Charles Oberthur et leader mondial de l'impression de billets de banque, a officialisé un partenariat conclu avec la collectivité régionale. Objectif : déployer sa technologie virucide à destination des documents internes et courriers produits par la Région (sans que le volume, ni le prix contractualisé à travers cet accord, n'aient été précisés), afin de renforcer la sécurité sanitaire de ses usagers.

"La technologie de Bioguard a été inventée en hiver, dans notre laboratoire d'Apprieu (Isère), il y a une vingtaine d'années", raconte Nicolas Koutros, directeur général adjoint du groupe François-Charles Oberthur et directeur général délégué de Bioguard & Co, filiale du groupe.

"A cette époque, elle était destinée aux billets de banque et comportait deux spécificités : antifongique, c'est-à-dire contre le développement des champignons que l'on peut notamment trouver dans les pays tropicaux via la chaleur et l'humidité, et antibactérienne", détaille-t-il.

Si l'entreprise iséroise ne communique pas le contenu de sa "recette", elle précise que celle-ci est basée sur "la mise en œuvre de plusieurs matières actives dont certaines sont d'origine naturelle. (...) Avec une "synergie développée par un mélange ou « cocktail » d'actifs judicieusement sélectionnés, afin d'agir sur différents éléments de structures biochimiques des germes, en vue de les détruire ou d'empêcher leur multiplication, tout en restant neutres pour l'homme".

Une invention qui s'était déjà avérée décisive pour la longévité des billets. En effet, le papier pour les billets de banque est fabriqué en fibres de coton et les champignons peuvent en détruire la structure.

Pour empêcher cela, Bioguard a mis au point un bain chimique dans lequel sont passés les billets et qui donne des propriétés au papier, via un traitement de surface qui fixe un cocktail d'agents antifongiques et antibactériens sur la surface du papier. La technologie peut être intégrée lors de la fabrication du papier, ou plus tard, dans les vernis recouvrant recto-verso le billet.

Une dizaine de milliards de billets en circulation avec cette technologie

Cette invention a permis au groupe détenu par François-Charles Oberthur, devenu le premier fabricant privé de ce marché au niveau mondial (et premier fabricant privé de billets euros), de disposer de produits plus résistants.

"En France, nous disposons de la plus grande usine privée de fabrication de billets de banque au niveau mondial. Nous fabriquons à peu près l'équivalent des besoins de la zone Euro, soit environ 5 milliards de billets, pour le monde entier. Il n'y a aucun pays qui ne soit pas potentiellement notre client", détaille Nicolas Koutros.

La technologie de Bioguard était ainsi déjà utilisée dans plusieurs pays dans le monde entier, depuis une quinzaine d'année, sur une dizaine de milliards de billets mis en circulation avec sa technologie. "Il faut savoir que la zone Euro consomme en moyenne 5 milliards de billets par an. Les billets en circulation avec notre technologie représentent donc deux fois la consommation de la zone Euro annuelle", précise-t-il.

Et si les perspectives de la société s'inscrivent dans une vision à long terme, "et non-pas au gré des vagues", la pandémie que nous subissons depuis deux ans a conduit Bioguard à se poser la question de l'efficacité de sa technologie contre le coronavirus : "Lors du premier confinement, nous nous sommes dits qu'il fallait tester notre 'cocktail' sur ce virus et avons envoyé des échantillons de notre vernis dans des laboratoires spécialisés aux États-Unis".

Résultat ? "Nous avons constaté que Bioguard est efficace contre les coronavirus. Au bout de quelques heures, après avoir déposé des millions de milliards de virus, nous avons observé que la surface traitée diminuait le nombre de virus de 100 à 1.000 fois, voire à 10.000 fois. Aux deux propriétés que nous connaissions déjà, nous avons donc ajouté une propriété antivirale", détaille Nicolas Koutros.

Cette technologie peut être intégrée à tous types de supports : papiers, documents, vernis protecteurs, pouvant être appliqués sur différentes surfaces (poignée de portes, interrupteurs, tables, etc.).

"Aujourd'hui, il y a d'un côté les vaccins, de l'autre les gestes barrière. Les deux sont complémentaires. Les gestes barrière, dont Bioguard fait partie, diminuent le risque de contamination". Il ajoute par ailleurs que la durabilité de sa technologie est longue : "tant que le vernis est sur une table par exemple, la table est protégée".

L'entreprise a ainsi testé des billets en circulation depuis cinq ans, dans un pays sous les Tropiques et a constaté que les propriétés de la technologie Bioguard étaient toujours là.

Films et emballages

Bioguard a également développé des films qui peuvent se coller sur un écran d'ordinateur et prépare actuellement la phase d'industrialisation de la technologie pour fabriquer du papier kraft utilisé pour les emballages.

"Ce n'est pas une formulation miracle que nous utilisons pour chaque usage. A chaque fois, nous étudions l'application finale, les moyens industriels utilisés pour fabriquer cette application finale, la réglementation différente selon les industries et les pays et à partir de là, nous développons les formules, les cocktails adaptés pour cette application", développe Nicolas Koutros.

Bioguard travaille aussi sur la pulvérisation. "C'est un nouveau champs qui s'ouvre à nous. Dans les semaines à venir, nous allons par exemple rendre visite à un industriel qui a choisi de traiter les objets qu'il fabrique sous forme de pulvérisation. C'est dans notre plan de développement", explique-t-il.

De la part de ses clients, il constate "beaucoup de résistance au changement. Mais d'un autre côté, nous sommes aussi en contact avec des industriels avec lesquels nous travaillons très étroitement, pour développer la bonne solution et convaincre leurs clients ou consommateurs de l'utilité de la technologie", nuance-t-il.

D'ailleurs, face à la 5e vague épidémique qui se profile, le directeur général délégué de Bioguard & Co estime qu'elle suscite effectivement de l'intérêt pour son produit, "et contribue à la sensibilisation des industriels".

Concernant le marché visé, Nicolas Koutros ne souhaite cependant pas donner de chiffres pour le moment : "Nous avons pris la décision de déployer cette technologie à cause de la pandémie d'aujourd'hui et des pandémies à venir. Notre objectif premier est de trouver des solutions techniques qui peuvent s'appliquer dans les différentes industries. On fera les comptes après. Il y a une urgence aujourd'hui à déployer la technologie Bioguard et nous nous concentrons sur cette partie-là".

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Commentaire 1
à écrit le 30/11/2021 à 10:34
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Nettoyer l'argent, une ambition démesurée ! Bon courage quand même ! ^^

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