LGV Rhône-Alpes : les grands travaux de la SNCF pour fluidifier l'axe Paris-Lyon-Marseille

SNCF Réseau déploie d'ici à 2030 de grands travaux de modernisation de la ligne à grande vitesse (LGV) Paris-Lyon-Marseille, représentant un tiers du trafic TGV en France. Pour cela, le tronçon « Rhône-Alpes », contournant Lyon par l'Est entre Montanay (Rhône) et Valence (Drôme), en passant par l'aéroport Lyon-Saint-Exupéry, est lui aussi remis à neuf après trente ans d'activité : remplacement du ballast, changement des aiguillages et mise en place d'un nouveau système informatique. Une course contre la montre pour augmenter le trafic voyageurs sur cet axe de plus en plus emprunté et stratégique pour la ligne Paris-Lyon-Marseille, souvent saturée.
La « LGV 4 Rhône-Alpes » contourne Lyon par l'Est, en s'arrêtant par la gare de Lyon-Saint-Exupéry, accolée à l'aéroport.
La « LGV 4 Rhône-Alpes » contourne Lyon par l'Est, en s'arrêtant par la gare de Lyon-Saint-Exupéry, accolée à l'aéroport. (Crédits : SNCF Réseau)

C'est un contournement stratégique, inauguré en 1994 : la ligne à grande vitesse « Rhône-Alpes », qui s'étend sur 115 kilomètres de Montagnay (Rhône) à Valence (Drôme) en passant par l'aéroport Lyon-Saint-Exupéry, constitue l'un des axes forts de la route ferroviaire en direction du sud-est de la France depuis Paris. Après trente ans de service, alors que ses infrastructures (ballast, traverses) n'ont pour l'instant jamais été intégralement remplacées, la voici depuis 2023 inspectée et modernisée sous toutes les coutures par SNCF Réseau depuis sa nouvelle base de travaux située à Pusignan, à deux pas de la gare de Lyon-Saint-Exupéry (Rhône).

SNCF Réseau vient en effet de mettre en service ce nouveau spot, qui permettra à plus de 160 employés de « rayonner à 50 kilomètres en amont et 50 kilomètres en aval, pour réaliser des travaux de nuit, de 21 h à 6 h, sans perturber le trafic commercial », détaille sur place Alexandre Bertholet, directeur de l'Infrapôle LGV Sud-Est Européen. Concrètement, cet espace de 15 ha (8 ha d'exploitation et 7 ha renaturés) accueille désormais le stockage du ballast, un point pour l'humidifier (afin d'éviter la génération de poussière), ainsi qu'un espace de maintenance des machines nécessaires aux travaux le long de cette ligne à grande vitesse.

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Moderniser la LGV et anticiper la hausse du trafic

D'un coût de 12,5 millions d'euros, financé par SNCF Réseau, cet ancrage vise à faciliter les travaux du tronçon dans les deux décennies à venir, grâce à une concession courant jusqu'en 2047 avec son voisin aéroportuaire : Lyon-Saint-Exupéry, propriétaire d'une partie du terrain. Il s'agit, trente ans après le lancement de la ligne, de « renforcer sa robustesse, sa régularité, mais aussi son niveau de sécurité et de confort », détaille Perrine Chatut, cheffe de projet pour SNCF Réseau.

Pour cela, le ballast - usé par le passage à répétition des trains, qui provoque l'arrondissement des angles de ces pierres granitiques - est pour la première fois changé sur 600 mètres chaque nuit depuis 2023, à raison d'une tonne par mètre. Chargé à bord de rames spécialisées, le ballast est trié : 70 % des pierres, jugées conformes, sont directement réintégrées sur les voies. Pour le reste, la moitié est aussi requalifiée depuis la base de travaux, et l'autre - à savoir des pierres trop petites - sont dirigées vers des filières de travaux publics.

SNCF Réseaux travaux

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« Paris-Lyon représente un tiers du trafic TGV français »

Cette première opération, qui a débuté l'année dernière entre Valence et Claveyson (Drôme), se poursuivra aussi cette année jusqu'à Grenay (Isère), ainsi qu'en 2026 et 2027 à l'Est de Lyon. En deux ans, elle a déjà coûté plus de 100 millions d'euros à SNCF Réseau. Et sera complétée par le changement de l'ensemble des aiguillages de la ligne, entre 2026 et 2028. Cela, seulement pour sa remise à niveau technique. Car ces travaux seront complétés par d'autres aménagements dans les années futures tout au long de l'axe Paris-Lyon-Marseille visant, petit à petit, à augmenter les trafics.

En effet, le tronçon Rhône-Alpes, pour l'instant non saturé contrairement au reste de la LGV sud-est, permet notamment d'éviter « l'étoile lyonnaise », engorgée quant à elle en heures de pointe malgré l'entrée en service de la voie L de la gare Part-Dieu en 2022 : TER, TGV ; Lyon concentre l'ensemble des passages en direction et en provenance du quart sud-est. Une saturation « encore plus flagrante » une fois la Bourgogne passée, en direction de Paris, lorsque s'ajoutent les trains venus de Chambéry et de Dijon, remarque Alexandre Bertholet : « La LGV Paris-Lyon voit circuler 200 trains par jour, soit le tiers du trafic TGV français et environ 50 millions de voyageurs par an ».

Et cette tension ne risque pas de s'atténuer : la SNCF a enregistré une hausse de 4 % du nombre de voyageurs TGV en 2023 par rapport à 2022, alors que le nombre de rames (363 en circulation) se révèle quant à lui « trop faible pour répondre à l'explosion de la demande », pointait Christophe Fanichet, PDG du groupe SNCF, ce mois de janvier. Et ce, malgré l'arrivée de TGV duplex ces dernières années, ayant pour effet d'augmenter le nombre de places (+ 9,5% entre 2018 et 2023). Cette croissance de la demande est en tout cas « limitée par des effets de saturation  », tant du côté de l'exploitation que du réseau, où il s'agit désormais d'offrir « plus de capacités à l'infrastructure », ajoute le directeur de l'Infrapôle LGV Sud-Est Européen, Alexandre Bertholet.

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Passer de 13 à 16 trains par heure en 2030

C'est notamment dans cette optique que sont en ce moment réalisés des travaux sur l'ensemble de la ligne Paris-Lyon (comprenant le tronçon Rhône-Alpes), afin de passer d'une capacité maximale de 13 à 14 trains par heure dès 2025 grâce au changement d'une partie du ballast, puis jusqu'à 16 trains par heure en 2030 grâce à la mise en place du système informatique européen « ERTMS » (European rail traffic management system), déjà utilisé sur la LGV Est européenne, plus récente :

« Nous sommes en train de moderniser toute la signalisation. Nous basculerons du système des années 1980 et 1990 à une signalisation moderne, informatique, notamment via le système « ERTMS ». Il permet, grâce à la connexion des trains entre eux, de faire circuler plus de rames simultanément sur l'infrastructure », décrit Alexandre Bertholet.

Ces travaux consistent à équiper les voies de capteurs informatiques, reliés ensuite à l'infrastructure et aux trains, qui réguleront ensuite leur vitesse en fonction des autres. Mais pour fonctionner, ce système doit aussi être installé sur l'ensemble des rames. Si les dernières générations de TGV disposent bien de cet outil, les plus anciennes, qui circulent toujours entre Paris et Marseille, ne le sont pas.

« Cela signifie que les entreprises ferroviaires doivent moderniser leurs trains, pour qu'il y ait une compatibilité entre le matériel roulant et l'entreprise ferroviaire, qui sera mise aux normes en novembre 2024 », ajoute Alexandre Bertholet. « Quand nous aurons tout cela, à horizon 2030, nous disposerons de cette pleine capacité ».

Les nouveaux « TGV M », qui devraient entrer au fur et à mesure en circulation courant 2025, seront dotés de ce nouveau système informatique. Mais, face aux retards accusés par Alstom dans la livraison des ramesle groupe SNCF prépare en parallèle son plan « botox » : d'un coût estimé entre 500 millions et 1 milliard d'euros, il consiste à prolonger la durée de vie de certains trains en circulation, de quatre à dix ans, pour atteindre dans certains cas les 50 ans de service opérationnel. Lancé en 2026, ce plan de régénération vise à joindre les deux bouts, en attendant l'entrée en circulation des nouvelles générations de TGV, et en parallèle de la modernisation du réseau pour les accueillir.

Modernisation dont les travaux doivent être aidés par le nouveaux fonds de 100 milliards d'euros débloqués par l'ancienne Première ministre Elisabeth Borne en février 2023, afin de soutenir la régénération du réseau jusqu'en 2040. Cette enveloppe, qui complète le budget annuel consacré à la maintenance du réseau, pourrait aussi comprendre le financement des SERM (services express régionaux métropolitains), ainsi que la rénovation de l'ensemble des lignes ferroviaires.

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