
La Tribune - Ce moment si particulier de début de confinement, comment l'éprouvez-vous intimement, comment l'interprétez-vous intellectuellement ?
Je le vis comme le prélude à d'autres crises et d'autres confinements, toujours plus graves, toujours plus surprenants, et pourtant prévisibles. Je veux dire que nous savons plus ou moins toutes et tous aujourd'hui que nous ne pouvons plus vivre comme avant, que nous avons forcé et dépassé un certain nombre de limites.
J'envisage cette crise comme un coup de semonce qui met en lumière notre aveuglement et notre impréparation. J'espère qu'elle va nous servir de déclencheur pour la grande bifurcation qu'exige l'imminence de la crise écologique.
C'est, par son ampleur et sa diffusion, une crise inconnue, une crise plurielle - économique, sociale, financière - et tentaculaire, une crise d'une soudaineté terrifiante, c'est en premier lieu une crise qui frappe et interroge "toute" la société et "toute" la planète. Vit-on un moment inédit de "crise holistique" ?
Hier, je parlais par Skype avec une Américaine installée au fin fond des Etats-Unis. Elle me racontait exactement la même situation que celle dans laquelle je me trouvais moi. Les écoles fermées, le confinement, les morts, les hôpitaux submergés, l'impuissance.
Cette internationalisation des événements, la simultanéité des expériences, ou encore la diversité des réponses et l'incapacité de former un "nous" alors que nous vivons la même chose et que nous sommes en quelque sorte constitués en une humanité unie par cet événement, forment quelque chose de tout à fait extraordinaire. Si cela nous permettait justement de prendre conscience de l'identité des défis auxquels nous sommes confrontés, ce serait magnifique. Plus encore si nous en profitions pour façonner des réponses communes.
Nous devons absolument reprendre la main et sur la finance et sur la production, revenir sur la liberté de circulation des capitaux et sur l'actuelle division internationale du travail.
Comment la globalisation du monde doit-elle être questionnée par cette crise ?
A l'évidence, elle a été beaucoup trop loin et elle n'a pas été contrôlée. A cet égard, le fameux article de Rawi Abdelal, ("Le consensus de Paris : la France et les règles de la finance mondiale") qui montre comment les Français ont promu la libéralisation complète de la finance en croyant pouvoir la maîtriser, est important. Car comme l'admet désormais le FMI, c'est un échec.
Et accepter la désindustrialisation et la dépendance que cela a provoqué est insensé. Nous devons absolument reprendre la main et sur la finance et sur la production, revenir sur la liberté de circulation des capitaux et sur l'actuelle division internationale du travail.
Le fonctionnement de cette globalisation, que l'on dit communément inégalitaire, égoïste, compartimenté, mercantile, peut-il à terme mais aussi dès maintenant profiter de cet indicible pour se réinventer ? L'urgence sanitaire mondialisée semble faire naître des desseins de ce type. En revanche, de l'Europe aux Etats-Unis, la cartographie géopolitique n'est guère encourageante...
Certes, mais la prise de conscience est brutale et intense. Il va falloir reconstruire très vite un programme politique de rechange exactement comme pendant la Seconde Guerre mondiale avec Beveridge et Keynes. Il nous faudra profiter de cette situation pour engager une véritable reconversion. Nous devons tout repenser, y compris et d'abord nos représentations des rapports entre humains et Nature, ce qu'est la vocation humaine, réapprendre le sens des limites, trier dans ce que la Modernité nous a apporté.
L'histoire est, à ce titre, un éternel recommencement : c'est dans l'exploitation des peurs que fermente le succès populaire et électoral des thèses isolationnistes, nationalistes, xénophobes. L'incontestable succès des candidats RN sortants ne doit-il pas être lu à cette aune ? Au-delà, et notamment au sein des pays d'Europe mais aussi aux Etats-Unis engagés dans la bataille des Présidentielles, ce spectre est-il inéluctable ?
Beaucoup de recherches ont mis en évidence le lien étroit entre délocalisations, automatisation, chômage et vote pour les extrêmes. Dans la reconversion écologique que je propose, nous devons mettre au centre l'impératif de justice sociale. Bien pensée, celle-ci peut permettre de recréer des emplois, de renouer avec le sens du travail, tout en sauvegardant des "conditions de vie véritablement humaines".
Une "autre" réalité de nos existences est concrètement frappée : le travail, "l'exercice du travail". Les premières mesures de l'Etat vous satisfont-elles ? Quels dangers, à plus long terme, cette déflagration fait-elle peser sur cet exercice du travail ?
Ce moment devrait nous permettre d'une part de faire le tri entre les métiers vraiment utiles et ce que Graeber appelle les "bullshits jobs", d'autre part de reconsidérer la rémunération relative des métiers. Il faut être aveugle pour ne pas voir quels sont aujourd'hui les métiers sans lesquels la société ne peut pas vivre.
Peut-on dès maintenant "tirer profit" de ce moment de crise pour questionner l'organisation, les réglementations, les conditions futures de cet "exercice du travail" ?
Oui, il nous faut préparer l'après dès aujourd'hui. A tous points de vue, nous devons renouer avec le réel et atterrir. La société de demain doit se préparer à faire face à des catastrophes climatiques et sanitaires. Nous devons nous organiser pour y faire face.
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Dominique Méda est professeur de sociologie à l'Université Paris Dauphine, et titulaire de la Chaire "Reconversion écologique, travail, emploi, politiques sociales" à la Fondation Maison des Sciences de l'Homme (FSMH).
Plutôt que decrire un système a. Deux alternatives,
- Une logique de plan propre a l'après guerre
- un logique néo libérale en période de paix prolongée,
Pourquoi ne pas envisager un système a géométrie variable, dont les priorités sont établies en fonction des risques que les différentes communautés scientifiques voient pointer à l'horizon.
Les outils de l'informatique actuelle permettent de modéliser ces états et ceux intermédiaires
Mais "après", et si rien ne viendra contraindre de facon immédiate et directe l'humanité dans son instinct de satisfaction, alors les choses continueront de la même facon. Seul la force des états peuvent nous contraindre à la raison et c'est certainement la raison pour laquelle ils sont si peu appréciés.
profitons en pour réflechir à l'organisation mondiale : privilégier les circuits courts, surveiller les décchets (en particulier les plus dangereux, nucléaires et chimiques), améliorer la répartition des ressources mondiales et d'abord l'eau, donner accès à l'éducation et aux services de ssanté, taxer les profits financiers .. et bien d'auttres points sur lesquels il est urgent de réfléchir et d'avoir une politique commune
Revaloriser l’agriculture, la santé, l’eau, l’électricité, les artistes, le train, les livres, les enseignants, de petits logements
Supprimer: les avions, le tourisme international non accessible par train
Les voitures thermiques, le trafic de camions internationaux car on produira en majorité localement, les programmes tv à la con, les grandes maisons
D’autres idées?
- 1957 grippe Asiatique.
- 1968 grippe de Hong Kong virus H3N2
- 1997 grippe aviaire Hong Kong virus H5N1
- 2009 grippe porcine Asie virus H1N1
Ce n'est pas suffisant pour se questionner de nos erreurs et d'agir rapidement.
Mettons tous nos moyens pour rééquilibrer le Fonctionnement du Monde. Mais que les politiques prennent des décisions fortes pour que l’économie puisse fonctionner sans « course à l’échalotte » à base de crédit pour un développement sans limite. Et que les gens puissent vivre décemment de leur travail. C’était le cas au début des années 70, à Sedan et ailleurs, quand nous les jeunes n’avons rien pensé ni vu venir !! Mais comment faire comprendre/ accepter à chacun qui vit correctement qu’il n’a pas besoin de plus (un i-phone 15 au lieu d’un 12?)
Erik
On peut être heureux avec la nourriture produite en France, le vin , les artistes français, les écrivains et autres penseurs.
Renoncer, ce n’est pas fondamentalement vivre moins bien.
Sans compter les roitelets locaux ivres de pouvoir qui rajoutent là dessus un couvre feu inutile, et des interdictions diverses et variées.
Pour la suite je crains plus pour la survie de la démocratie et de la liberté que pour la survie de la population.
Je vous rappelle les chiffres: 562 morts... une grippette saisonnière un peu sévère c'est 20 fois plus. Même si on avait in fine 200 000 morts, ce seraient les retraités qui seraient les premières victimes et pas, comme pendant une guerre, les forces vives de la nation.
Parce qu’on a toujours besoin de penseurs profonds pour vivre heureux.
zut alors, j'ai repris tous vos arguments mais pas une seule idée en ressort, rien qui ne fasse progresser un débat
Au bout de 4 jours, c'est déjà insupportable. L'équation est simple, pour sauver 2% de la population, est il raisonnable de confiner et punir aussi drastiquement les 98"% restants ?
Humainement oui.... mais nous sommes en guerre et la guerre ça fait des morts.
"Une guerre ça fait des morts", écrivez-vous. Si je vous comprends bien, ce n'est pas très grave, dans la mesure évidemment où vous-même allez vous trouver dans l'heureuse proportion des vivants et conserver la liberté d'écrire pareilles énormités. Quel merveilleux sentiment que celui de vivre, pas vrai ?
Actuellement le système sature avec a peine 1500 malades en réa !
Pour "écluser" 1 300 000 malades il faudrait étaler sur 150 ans en prenant pour base 15 jours de rea par malade.
Alors, on confine les gens pour une siècle et demi?