
Dans un contexte où la précarité étudiante est aggravée et très médiatisée, le gouvernement a balayé l'option d'instaurer un RSA (Revenu de solidarité active) pour les jeunes de moins de 25 ans.
Mais à l'échelle locale, Bruno Bernard, président de la Métropole de Lyon, avait déjà fait de cette mesure l'une de ses promesses de campagne entre les deux tours, et l'avait même réaffirmée comme l'un des dix premiers chantiers à venir de son mandat, en juillet dernier. Cette promesse s'apprête désormais à passer aux actes, pour une collectivité qui dispose d'un statut particulier, puisqu'elle est issue d'un régime spécial consécutif à la loi Mapam, qui lui a permis de fusionner son statut de métropole avec celui d'un conseil général en 2015.
De quoi lui permettre de tirer la doter d'une compétence sociale, à commencer par celle du RSA. Et peut-être bientôt, dans ce contexte, d'un nouveau "revenu de solidarité jeune" (RSJ), une proposition qui doit encore être soumise au vote du conseil métropolitain, qui se tiendra le 15 mars prochain.
Un revenu de solidarité jeune à 400 euros, promesse de campagne
Selon Bruno Bernard, ce RSJ d'environ 400 euros serait dédié aux jeunes en grande précarité (pas uniquement étudiants), et sans emploi. Un budget de 10 millions d'euros serait ainsi attribué à cette expérimentation, qui devrait être effective en juin, comme l'a rapporté le président écologiste ce jeudi, auprès du quotidien du soir.
Une mesure d'autant plus justifiée selon lui que sur les 175.000 étudiants qu'elle recense, la Métropole estime "qu'un tiers sont en deçà du seuil de pauvreté soit 600 euros par mois (demi revenu médian)".
"La crise a mis en émergence une situation de précarité qui était présente avant et qui le sera aussi après", a souligné Frédéric Fleury, président de l'université Claude Bernard Lyon 1.
Le journal Le Monde rapporte que ce RSJ "répond à un véritable besoin hors des autres dispositifs, auprès d'environ 2.000 jeunes de la métropole, selon les estimations des services."
En réalité, un RSA dédié aux 18-25 ans existe déjà, mais ses conditions d'attribution sont plus strictes : il faut avoir travaillé "pendant au moins deux ans à temps plein, au cours des trois ans précédant la date de la demande." Le dispositif de la Métropole viendrait donc combler les manques.
Car dans la Métropole, ce sont plutôt les moins de 25 ans qui ont connu la plus grosse évolution du nombre de demandeurs d'emploi (catégories A, B et C) entre entre le quatrième trimestre de 2019 et celui de 2020. Les jeunes demandeurs d'emploi ont augmenté de 11,7 %. A titre de comparaison, sur la même période, chez les 25-49 ans l'augmentation est de 4,9 % et de 5,7 % pour les plus de 50 ans.
Mobilisée sur le RSJ, la Métropole devra toutefois faire également face à l'augmentation de bénéficiaires du RSA, qui relève également de sa compétence. La Métropole de Lyon a déjà prévu de mobiliser 30 millions d'euros supplémentaires cette année, pour le RSA déjà existant, du fait d'allocataires plus nombreux.
"Pour l'instant sans compensation aucune de l'État", souligne au passage Bruno Bernard, qui affirmait lors de la présentation de son plan pluriannuel que les collectivités dont la métropole de Lyon, attendaient toujours un geste de la part de l'exécutif afin de rééquilibrer ce poste de dépenses. En février de cette année, le Grand Lyon annonçait en effet une augmentation de 10 % du nombres de bénéficiaires du RSA depuis janvier 2020.
Des tarifs encore plus réduits dans les transports en commun
Mercredi, lors d'un point presse sur la précarité étudiante, Bruno Bernard, aussi président du Sytral, le syndicat des transports en commun de l'aire lyonnaise, a annoncé l'instauration de tarifs encore plus réduits pour les jeunes dans les transports en commun TCL, dès le 1er septembre.
L'abonnement annuel des 18-25 ans passera ainsi de 32 euros à 25 euros par mois. Les boursiers auront accès à un abonnement à 10 euros par mois. Cette mesure doit être proposée au prochain comité syndical du Sytral. Un groupe de travail sur la précarité étudiante a aussi été constitué au sien de la Métropole. Il s'est réuni pour la dernière fois ce jeudi 25 février et devrait rendre ses conclusions.
Les initiatives privées (distributions de colis, de repas...) se sont aussi multipliées pour leur venir en aide aux étudiants. L'État de son côté a mis en place les repas à un euro, depuis le 25 janvier, et des protections menstruelles gratuites, dés la rentrée de septembre.
De son côté, Banque alimentaire du Rhône travaille avec la Ville pour trouver un local permettant de faire une distribution aux étudiants de plus grande ampleur, en dehors des universités, afin de créer un modèle pérenne et autonome.
La Métropole a par ailleurs déjà financé des aides à l'équipement numérique, un dispositif d'accompagnement psychologique pour les étudiants (300 bénéficiaires) et un soutien aux associations de distribution alimentaire.
L'enjeu de faire parler les dispositifs à l'échelle locale
Selon lui, cette somme devrait permettre de payer la formation des apprentis qui n'ont pas pu trouver de contrats, mais aussi d'aider financièrement les associations de distribution alimentaires destinées aux étudiants, ou encore de financer le lancement d'une ligne d'écoute psychologique. Laurent Wauquiez a aussi annoncé qu'il allait doubler les postes en alternances dans les organismes de la Région (cantines scolaires des lycées, maintenance du bâtiment ...) et mettre à disposition des tests antigéniques pour permettre aux étudiants de revenir dans les universités.
Laura Lehmann, présidente de l'association étudiante Gaélis, également présente au point presse de la Métropole, affirmait que les jeunes attendent également à ce sujet "des gestes sur les transports, comme le TER, pour que les étudiants puissent rentrer chez eux à l'autre bout de la Région".
Mercredi, une dizaine de représentants de l'Unef avaient manifesté devant le Conseil régional, évoquant un plan régional qu'ils jugeaient "insuffisant", la somme annoncée ne correspondant, selon leurs calculs, "à moins de 0,60 d'euros par étudiant", ajoutant que la distribution de ces aides, "qui ne sera pas financée, reposera également sur le bénévolat des étudiants."
Quant à Bruno Bernard, il salue ces initiatives de la Région, mais affirme que "ce serait bien de travailler ensemble, pour ne pas que les mesures se chevauchent".
En effet, depuis l'arrivée aux manettes de la ville et de la métropole des écologistes, ces derniers ont regretté, à plusieurs reprises, le manque de concertation au niveau local avec la Région, tenue par le président LR Laurent Wauquiez. Et Bruno Bernard de rappeler : "Lyon est le plus gros contingent d'étudiants de la région, on attend une discussion." Un chiffre qui serait d'ailleurs amené à grimper et pourrait atteindre, d'ici 2030, jusqu'à 195.000 jeunes, selon des estimations du Schéma de Développement Universitaire (SDU).
(avec ML)
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