C'est un baromètre jaune à vert, inspiré du « nutri-score », qui a aussi fait son apparition dans le secteur cosmétique. Le nouveau « Jouet Score », lancé début novembre par le premier distributeur de jouets en France, King Jouet, arrive peu à peu sur les produits des quelque 330 magasins du groupe originaire de Voiron (Isère). En un coup d'œil, il permet aux clients d'estimer la valeur écologique d'un jouet, au sens le plus global. Car la note, définie sur 10 points, avant d'être ramenée à l'échelle de 5, évalue trois critères : l'origine du produit (sur 4), ses matériaux (sur 3) et la composition de son empaquetage (sur 3). Surtout, elle vient répondre à la demande, identifiée depuis plusieurs années, d'une plus grande transparence sur la fabrication des jouets, là où la grande majorité de ces produits vendue en France reste fabriquée en Asie. Pour King Jouet, c'est même le cas pour environ 80 à 90 % d'entre eux.
« En posant la question aux consommateurs de leur connaissance des labels, beaucoup nous font remonter ceux de la fabrication française. En revanche, ceux des matériaux sont moins connus, comme le label des forêts à gestion raisonnée », remarque Coralie Gueydon, directrice de la responsabilité sociétale (RSE) du groupe King Jouet.
Renforcer son positionnement autour du « jouer français »
Le score s'appuie sur une analyse réalisée avec le soutien de l'organisme Eco-maison, agréé par l'Etat. Les compositions (matériaux en bois, en plastique recyclé, recyclable, ou non) et l'étiquette des jouets sont détaillées, puis des notes leur sont attribuées. En revanche, aucun audit n'est réalisé, ce score restant produit par l'enseigne, sans encadrement particulier. Mais déjà, ce concept, inédit dans le milieu du jouet, mais aussi marketing, s'empare des rayons. Sur les 1.600 jouets du catalogue de Noël 2023, 400 se sont vus attribuer une note supérieure ou égale à 2/5, que King Jouet estime « suffisante pour donner à un produit un caractère éco-responsable », juge Coralie Gueydon.
« Nous privilégions les bois effacés, les produits mono-matériau, plus faciles à recycler. Mais aussi tout ce qui va intégrer des matériaux déjà recyclés, ce qui est aujourd'hui très difficile car la directive sur les jouets est très stricte en matière de sécurité et de solidité. Et c'est très bien. Mais il est difficile pour les fournisseurs de développer de nouveaux matériaux. »
Si l'objectif est de petit à petit renverser la donne en matière de fabrication et de responsabilité environnementale, le groupe entend surtout mettre en avant ces produits et sa stratégie en direction du « jouer français, avec un R ». Car il s'agit de considérer non seulement la fabrication, mais aussi la conception en France. Ce qui fait grimper le jeu français de quelques points dans les parts de vente : si la grande majorité des jeux restent fabriqués en Asie (les 2/3 proviennent de Chine), King Jouet revendique 20 % de ventes « françaises » - à savoir des produits conçus et/ou fabriqués dans l'Hexagone - contre 15 % en moyenne dans le secteur des jeux-jouets en valeur. Ces jeux atteignent 25 % du référencement du spécialiste, et jusqu'à 30 % dans ses magasins de centre-ville (15 boutiques, dont cinq à Paris).
Montée en gamme et inflation : trouver « le juste équilibre »
L'un des principaux enjeux du leader de la distribution spécialiste - 14,2 % des parts de marché en France de janvier à octobre 2023 (après la reprise des magasins Maxi Toys), derrière Amazon et Leclerc en 2022 - reste de trouver « le juste équilibre » dans cette équation à deux entrées : le « jouer français » et les prix. Car le secteur, durement touché par l'inflation lors de la crise sanitaire en raison des coûts des transports et des délais d'approvisionnement, reste affecté. Malgré un discours plutôt optimiste cette année, où les prix ont augmenté de 4 % par rapport à 2022, indique la Fédération des Commerces spécialistes des Jouets et des Produits de l'Enfant (FCJPE). Ce qui reste inférieur à l'inflation sur d'autres produits pour Noël (alimentation, décoration), car le secteur s'est resolidifié et serait par essence « protégé », dépeint Coralie Gueydon, responsable RSE du groupe distributeur :
« Le budget des jouets par foyer sera d'environ 125 euros par foyer cette année, contre 130 euros l'année dernière. C'est un peu moins, mais cela reste un budget protégé. Ceux de l'alimentaire, de l'alcool et des décorations ont tendance à diminuer davantage. Les jouets sont moins touchés car nous avons à cœur de faire plaisir aux enfants. »
Comment s'inscrit donc le Jouet Score dans cette équation ? Si environ la moitié de la clientèle de King Jouet lui indiquait considérer la valeur environnementale d'un produit (lieu de fabrication et de composition) lors d'un achat, le porte-monnaie reste le premier critère. Le prix du jouet français, quant à lui, s'élève dans certains cas de « 10 à 20 % plus cher », indique King Jouet, ce qui représente 2 à 4 euros d'augmentation sur un prix moyen de 20 euros.
« Nous avons commandité une étude à un cabinet indépendant, Junior City, sur les critères d'achat. Le premier, c'est le prix, pour les 2/3 des clients. Le deuxième, c'est ce que l'enfant a choisi. Et le troisième, ce sont les promotions. Nous naviguons dans cet environnement inflationniste. Mais nous venons offrir un choix, une possibilité à ceux qui souhaitent avoir une démarche éco-responsable, plus durable, en mettant en avant ces produits, en les rendant plus visibles », ajoute Coralie Gueydon.
Dans cette continuité, des jeux d'occasion, rachetés par la marque contre des bons d'achat, sont également vendus dans 10 magasins King Okaz en France. Entre octobre et décembre 2022, au plus fort de l'activité, 35.000 jouets d'occasion avaient été apportés par des clients, et 24.000 ont été vendus.
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