Modernisation de la ligne SNCF Clermont-Paris : vers la fin d’une arlésienne ?

ANALYSE. La ligne Clermont-Paris n'a toujours pas officiellement relancé de projet de LGV (hormis un projet de nouvelle expertise de tracés, lancé en début d'année), mais la modernisation de sa ligne Intercités, dont la vétusté est responsable de nombreux retards, est à l'origine d'une nouvelle rencontre. Un groupe de travail technique doit se réunir ce vendredi à la préfecture du Puy-de-Dôme, après la venue de Clément Beaune en septembre dernier. Objectif : afficher une plus grande "transparence" et surtout une "accélération" dans la modernisation de cette ligne stratégique pour la desserte de la région, qui a déjà pris du retard.
Quelques semaines après la venue de Clément Beaune (suivie par l'annonce d'un nouveau retard au sein du plan de travaux en cours), un nouveau groupe de travail doit se réunir ce vendredi dans la capitale auvergnate concernant la modernisation de la ligne Intercités Clermont-Paris, dont la vétusté est pointée depuis plusieurs années.
Quelques semaines après la venue de Clément Beaune (suivie par l'annonce d'un nouveau retard au sein du plan de travaux en cours), un nouveau groupe de travail doit se réunir ce vendredi dans la capitale auvergnate concernant la modernisation de la ligne Intercités Clermont-Paris, dont la vétusté est pointée depuis plusieurs années. (Crédits : DR)

Il n'est toujours pas question d'une LGV, qui aurait pu relier Paris à Clermont en passant par Orléans : un projet officiellement à l'arrêt depuis 2018, après que son coût ait été évalué à près de 13 milliards d'euros (selon une estimation menée en 2011)... même si une tierce expertise a été demandée par la région voisine, Centre Val-de-Loire début 2022.

Pour l'heure, c'est surtout le sujet de la modernisation de cette ligne Intercités, qui relie aujourd'hui la capitale à la ville auvergnate, qui a été remis sur la table. Cette ligne fait en effet l'objet d'un plan de rénovation de 760 millions d'euros, auxquels s'ajoutent 700 millions pour le renouvellement des rames, qui avait été confié à l'espagnol CAF, suite à l'établissement d'un nouveau schéma directeur en août 2018. Avec un premier objectif d'améliorer le temps de transport de seulement 10 minutes à l'arrivée, mais surtout de fiabiliser son fonctionnement d'ici à 2025.

Avec un temps de parcours moyen de 2h58, affiché il y a encore quelques années par le direct (contre 3h19 aujourd'hui, lorsqu'il n'y a pas de retard), ce train d'équilibre des territoire (TET) affiche plus ou moins le même temps de trajet qu'en voiture pour ses 400 kms de ligne, connectant l'Île-de-France au Massif central.

Conformément à l'engagement du Ministre des Transports Clément Beaune, l'Etat réunit ce vendredi 28 octobre l'ensemble des parlementaires, des représentants d'usagers, les services de l'État impliqués ainsi que des représentants de SNCF Réseaux, SNCF Voyageurs et SNCF Gares et connexions, au sein d'un groupe de travail technique.

"Il est question, pendant ce temps de rencontres, d'aborder en détail le plan des prochaines étapes de mise en œuvre du schéma directeur de la ligne Clermont-Ferrand - Paris. C'est à cette occasion également qu'un point sur les actions mises en œuvre ou envisagées pour contribuer à l'amélioration de la qualité de service et l'information des voyageurs sera réalisé", précisent les services de la préfecture du Puy-de-Dôme.

Jean-Baptiste Djebbari avait déjà, en son temps, réalisé le déplacement à Clermont-Ferrand, accompagné de l'ex-patron de la SNCF, Guillaume Pépy, pour rassurer sur la liaison ferroviaire Clermont-Ferrand - Paris. Nul doute que les élus auvergnats de tous bords tout comme les acteurs économiques seront à ce nouveau rendez-vous, qu'ils appellaient de leurs voeux depuis de long mois.

En effet, le fonctionnement erratique et les retards importants enregistrés sur cette ligne Intercités représentent une épine dans le pied de longue date pour le développement économique de la région. Cet été encore, un retard de 16 heures en raison d'une rupture de caténaire avait fait grand bruit.

Une série d'incidents et de retards réguliers

Pas une semaine ne passe sans qu'un retard ou une suppression de train ne soit enregistrée, dégradant ainsi la confiance des usagers dans le train. "Sous-investissement chronique de l'infrastructure, un Etat qui ne joue pas son rôle de stratège, une direction SNCF méprisante et .... des usagers qui payent les pots cassés !", s'agace Hervé Gonthier, représentant de la CGT Cheminots.

"Manque de moyens dans tous les services et sous-effectifs chroniques cultivés par la direction de la SNCF qui entretient pourtant le dogme de la rentabilité. Cette ligne a fait les frais du mépris et d'un délaissement pendant des dizaines d'années", estiment les syndicats, qui ne sont d'ailleurs pas conviés à cette rencontre.

Le collectif d'usagers de la ligne SNCF Clermont-Paris, qui rassemble environ 1.200 abonnés sur sa page Facebook, sera quant à lui de la partie : "Nous avons participé à la première réunion en septembre, lors de la venue du ministre Clément Beaune". Une occasion de mettre le doigt sur deux problèmes majeurs : "d'une part, la fiabilité de cette ligne, avec un matériel parfois à bout de souffle qui date parfois de 1976, ainsi qu'un manque de personnel qui engendre parfois des annulations de trains".

Outre "un problème de divagation de gibier qui pourrait être traité avec du grillage", les représentants des usagers pointent aussi "un temps de parcours qui ne cesse de s'allonger.

"Alors que nous mettions 2h58 il y a encore quelques années par le direct, il faut aujourd'hui 3h19 pour rallier Clermont-Ferrand à Paris", fait valoir Stéphanie Picard, porte-parole du collectif. "Nous souhaitons travailler sur le coup d'après, à savoir mettre Paris à 2h30 de Clermont-Ferrand."

Un schéma directeur initié en 2016, qui accumule les contretemps

Les travaux annoncés de la ligne Clermont-Ferrand - Paris ne seront de toute façon pas terminés dans les délais initialement prévus. On sait déjà que les nouvelles rames, prévues pour arriver courant 2023, n'arriveront que début 2024. Et cerise sur le gâteau, les travaux de modernisation de la ligne ne pourront démarrer qu'après une étude d'impact, préconisée par l'autorité environnementale, qui entraînera à nouveau au moins 18 mois de retard supplémentaires.

Pourtant, le schéma directeur de la ligne Paris-Clermont a été initié en 2016 par l'Etat et validé par le ministre au second semestre 2018. Cette volonté politique s'est traduite par une lettre de mission adressée au préfet de région en février 2019. "Le schéma directeur agit sur quatre leviers", précise Florence Pierreville, pour la SNCF. "La desserte, la régularité, les temps de parcours, le développement des services à bord."

En ce qui concerne SNCF Réseau, les travaux portent notamment sur deux volets : à commencer par un programme de régénération des infrastructures engagé depuis 2018, qui doit permettre de retrouver la performance nominale de l'axe. Montant de la facture : 760 millions d'euros sur la période 2018-2025.

Mais aussi un volet lié au développement de la ligne, financé cette fois par l'Etat et la Région Auvergne-Rhône-Alpes dans le cadre des accords de relance signés en 2020, qui prévoient un nouvel apport de 130 millions d'euros. Ce dernier vise en particulier à accompagner l'arrivée prévue du nouveau matériel roulant pour en utiliser pleinement les performances de vitesse notamment.

C'est d'ailleurs sur ce volet, lié au développement, qu'est intervenue la décision de l'Autorité environnementale de demander une étude d'impact, suite à la saisine de SNCF Réseau. "Il 's'agissait d'apprécier l'opportunité de poursuivre l'évaluation environnementale par une étude d'impact, à l'issue d'une décision au cas par cas (prescription légale)", précisent les services de la SNCF.

"Suite à cette décision, SNCF Réseau a déposé un recours gracieux en juillet 2022 auprès de l'Autorité environnementale. Les échanges qui ont suivi ont cependant montré que la décision de l'Autorité environnementale serait maintenue. Nous n'avons donc pas poursuivi le recours, de façon à ne pas retarder la réalisation des travaux par des délais d'instruction", fait valoir SNCF Réseau.

Une série de premiers travaux engagés

SNCF tente d'ailleurs de faire bonne figure en détaillant l'ensemble des avancées sur de la ligne Paris-Clermont.

"Les plannings des travaux de régénération et de livraison des nouveaux matériels roulants ne sont pas impactés", assure-on en interne, en listant quelques exemples de chantiers déjà engagés : à commencer par des travaux d'élagage d'arbres (un million d'euros par an depuis 2019), de pose de grillages pour lutter contre les  intrusions de la faune sauvage (200.000 euros), ou encore l'installation de systèmes de télésurveillance afin d'accélérer le diagnostic en cas de panne entre Nevers et Saint Germain des Fossés (1,8 millions d'euros).

Mais aussi des renouvellements de voie (pour 50 millions d'euros entre Moulins et Saint Germain des Fossés), d'aiguillage (en gare de Vichy et de Riom pour près de 10 millions d'euros), une mise en accessibilité de gare (à Moulins pour 3,3 millions d'euros en cofinancement avec l'Etat et la Région), ainsi qu'un renouvellement d'une voie en gare de Moulins (en cours) pour un montant de 6,4 millions d'euros.

En 2023, d'autres chantiers sont encore à venir : avec notamment le renouvellement de la voie au nord de Saint Germain des Fossés à partir de fin février 2023, pour une enveloppe de 37,9 millions d'euros.

L'étape d'après : descendre à 2h30 de temps de trajet ?

Ce n'est cependant pas suffisant pour l'association Objectif Capitales, créée en 2018 à l'initiative d'acteurs publics et privés de la région clermontoise afin de soutenir l'attractivité de la région, qui compte toujours sur l'étape d'après 2025 : soit la promesse de réduire encore le temps de trajet à plus ou moins 2h30, comme elle l'a rappelé lors de la venue du ministre Clément Beaune.

Avec pour cela, deux axes d'amélioration : la suppression de passages à niveaux, mais aussi des travaux de modernisation à réaliser cette fois à l'entrée de Paris, et qui à eux seuls, "permettraient de gagner 20 minutes", que les trains arrivent d'ailleurs à Bercy ou à la gare de Lyon...

Reste que dans un premier temps, l'objectif du groupe de travail technique qui se réunira ce vendredi sera déjà d'apporter aux élus, acteurs économiques et associations des informations régulières vis-à-vis des actions conduites à court terme afin d'améliorer la régularité et la qualité de service. Et ceci, dans l'attente de la pleine réalisation du schéma directeur et des programmes de régénération et modernisation de la ligne, dont les premiers effets sont désormais attendus en 2025.

La réunion est d'autant plus attendue que les péripéties et rebondissements au sujet de cette ligne sont presque aussi nombreux qu'une série Netflix. Le collectif des usagers de la ligne a d'ailleurs feuilletonné sur les réseaux sociaux l'histoire de la ligne, de 1858 à nos jours, du train à vapeur à la réunion du 28 octobre.

(avec Marie Lyan)

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Commentaire 1
à écrit le 17/11/2022 à 7:25
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Pour le 2h30 Paris Clermont, il faut investir dans la modernisation de la ligne suite au schéma directeur qui se termine en 2025. Prochain schéma 2025/2030 il faut créer avec le schéma POLT une ligne nouvelle V250 Paris / Etampes Sud avec un barreau...

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