Ferroviaire : après l'abandon de l'A45, Gaël Perdriau défend la création d'une nouvelle ligne Lyon/Saint-Etienne

Pour le maire de Saint-Etienne et président de Saint-Etienne Métropole, les alternatives aujourd'hui proposées par l'Etat pour compenser l'abandon du projet A45 - cette autoroute qui devait relier Lyon à Saint-Etienne - sont illusoires. L'élu a décidé de porter un nouveau combat, inscrit dans son plan de mandat métropolitain présenté le mois dernier : la construction d'une nouvelle ligne ferroviaire entre les deux villes, qui fait déjà l'objet d'une étude.
100.000 véhicules en moyenne empruntent actuellement l'axe Lyon/Saint-Etienne. Après la fin de non recevoir de l'Etat sur l'A45, le maire de saint-Etienne Gaël Perdriau défend la construction d'une nouvelle ligne ferroviaire, comme seule autre voie possible pour diminuer les temps de trajet... Une étude a été lancée, avec de premiers résultats attendus au second semestre.
100.000 véhicules en moyenne empruntent actuellement l'axe Lyon/Saint-Etienne. Après la fin de non recevoir de l'Etat sur l'A45, le maire de saint-Etienne Gaël Perdriau défend la construction d'une nouvelle ligne ferroviaire, comme seule autre voie possible pour diminuer les temps de trajet... Une étude a été lancée, avec de premiers résultats attendus au second semestre. (Crédits : DR)

C'était en octobre 2018. Elisabeth Borne, alors ministre des Transports, confirmait l'abandon officiel du projet d'autoroute entre Lyon et Saint-Etienne. Un dossier vieux de trois décennies, un véritable serpent de mer, mais qui avait sensiblement avancé ces dernières années avec une déclaration d'utilité publique, un financement bouclé grâce aux engagements financiers majeurs de la Métropole stéphanoise et du Département de la Loire notamment, un avis favorable du conseil d'Etat, le choix de Vinci comme concessionnaire etc.

Oui mais voilà, les 100.000 véhicules/jour et la congestion régulière de la liaison existante, l'A47, n'ont pas convaincu le conseil d'orientation des infrastructures. Dans son rapport Duron, rendu début 2018 et sur lequel s'est appuyé le gouvernement d'Edouard Philippe pour prendre sa décision, il préconisait en effet l'abandon de l'A45 et la recherche d'une "alternative acceptable pour tous".

La ministre des Transports expliquait à l'époque que les 400 millions d'euros prévus par l'Etat pour cette autoroute seraient investis pour améliorer les liaisons entre Lyon et Saint-Etienne afin de mettre en œuvre ces fameuses "alternatives".

Somme sanctuarisée en 2019 dans le cadre de la loi d'orientation des Mobilités et à dépenser d'ici 2027. L'enveloppe est même désormais portée à 510 millions grâce aux engagements financiers de la Région, des Départements de la Loire et du Rhône, des métropoles lyonnaise et stéphanoise, du Sytral et de la communauté d'agglomération Vienne Condrieu.

74 millions investis en 2021

Selon la Préfecture d'Auvergne Rhône-Alpes, qui conduit depuis l'abandon de l'A45 des réunions de concertation et de suivis sur le sujet, l'ambition vise à "renforcer l'utilisation du mode ferroviaire et des autres transports collectifs, à promouvoir l'intermodalité, à favoriser le covoiturage et à améliorer les conditions de circulation routières, notamment en matière de sécurité et de fluidité".

Concrètement, selon le bilan communiqué à l'issue du dernier comité de concertation, mi-décembre, 74 millions d'euros ont été investis en 2021 pour des travaux qui se poursuivront jusqu'en 2023.

Avec en ligne de mire : l'amélioration de la sécurité et du temps de parcours sur l'axe routier, l'amélioration de la fiabilité, de la régularité et du temps de parcours pour l'axe ferroviaire.

Parmi ces travaux : le renouvellement d'aiguillage en gare de Chateaucreux, des travaux d'amélioration de la sécurité du passage à niveau de Saint-Romain-en-Gier, le déploiement de dispositifs de surveillance des équipements ferroviaires pour prévenir leur défaillance, des travaux d'amélioration d'échangeurs de l'A47 et de la RN88, la création de bandes d'arrêt d'urgence etc.

En parallèle, l'acquisition de nouvelles rames, cofinancées par la Région et l'Etat, est en cours (budget : 46 millions d'euros), complétée par un autre co-investissement de 43 millions pour la construction d'un atelier de maintenance proche des gares stéphanoises qui devrait permettre de réduire les durées de réparation.

Nouveaux travaux pour 2022

Pour 2022, les services du Préfet de Région Pascal Mailhos, indiquent à La Tribune que des études vont être menées pour augmenter le nombre de places dans les TER ainsi que leur fréquence.

"Des études seront aussi réalisées pour identifier toutes les marges de manœuvre possibles de réduction des temps de parcours entre les deux agglomérations. L'ensemble des actions menées visent à effectuer un saut de performance et in fine de fréquentation de l'offre et du service ferroviaire". La ligne Saint-Etienne/Lyon doit d'ailleurs faire l'objet d'une "priorité toute particulière" dans le cadre du programme de "RER à la lyonnaise".

Sur le plan routier, des études sont également en cours pour traiter les difficultés de circulation du nœud Givors/Ternay/Chasse-sur-Rhône, bête noire des usagers.

Quid d'une nouvelle ligne ferroviaire ?

La liste des travaux semble fournie, mais le compte n'y est pas pour Gaël Perdriau, maire (LR) de Saint-Etienne et président de Saint-Etienne Métropole. L'édile n'a toujours pas digéré la fin de non-recevoir de l'Etat au projet A45, projet qu'il avait porté à bout de bras. "Les alternatives à l'A45 n'existent pas", martèle-t-il.

"Il ne faut pas que nos concitoyens pensent une seule seconde que l'abandon de l'A45 permettra la mise en place d'alternatives efficaces en termes de durée de trajet, en train comme par la route", a-t-il ainsi réaffirmé à l'occasion du dernier conseil métropolitain.

"Les travaux actuels annoncés et listés par la Préfecture de Région sont des travaux d'entretien courant. Ce n'est pas l'aménagement de ronds-points à Andrézieux-Bouthéon ou de l'échangeur de la Varizelle qui permettront d'améliorer la circulation entre Lyon et Saint-Etienne !", ironise l'élu.

Gaël Perdriau réclame des travaux plus ambitieux. Beaucoup plus ambitieux...

Le dossier A45 clos donc à regret, il veut désormais porter un nouveau combat : la construction d'une nouvelle ligne ferroviaire entre Saint-Etienne et Lyon. Sujet qu'il a décidé d'inscrire dans le projet métropolitain 2021-2026 (le plan de mandat en clair) présenté le mois dernier.

"La ligne actuelle date de deux siècles. Les progrès techniques contemporains qui permettraient de réaliser le trajet en 20/30 minutes sont anéantis par la vétusté de l'ouvrage. On peut se payer le mot d'un RER à la lyonnaise mais nous aurons tout de même des RER qui mettront 50 minutes pour parcourir les 50 kilomètres séparant les deux villes".

"La seule voie d'amélioration possible"

Pour Gaël Perdriau, "si nous voulons vraiment progresser, il nous faut une nouvelle voie ferrée. J'ai décidé de porter ce combat car il s'agit de la seule voie d'amélioration".

Un combat qui se traduit par une demande claire auprès de Pascal Mailhos : inscrire sur les financements de l'Etat une étude sur le sujet. Demande entendue et acceptée par le Préfet de Région.

Ses services confirment à La Tribune qu'une première étude doit être lancée au cours du premier trimestre 2022 sur l'opportunité de la réalisation d'une nouvelle ligne entre les deux agglomérations afin de "bien objectiver les apports possibles d'un tel projet, notamment par rapport aux actions prévues pour améliorer la ligne actuelle et aux enjeux en matière d'insertion dans les territoires qui seraient traversés". Un premier pas salué par l'élu stéphanois ainsi que par la Région qui soutient ce projet, - en parallèle de ses diverses actions en cours- , tout en rappelant qu'il devra être financé par l'Etat "dont c'est la compétence".

Les conclusions de cette étude préliminaire devraient être connus au cours du second semestre. Mais attention, prévient d'emblée la Préfecture de Région, un tel projet s'il était décidé "ne pourrait nécessairement s'inscrire que dans un horizon de long terme".

Horizon qu'Olivier Klein, directeur adjoint du Laboratoire Aménagement Economie Transports (laboratoire lyonnais de recherche mixte avec le CNRS et l'Université de Lyon), estime à au moins 15 ans, "si tout se passe bien". "Je ne connais pas de ligne, dans ces trente dernières années, dont la mise en route ait été plus rapide". L'expert estime le coût final à au moins un milliard d'euros et estime finalement peu probable une telle réalisation.

"Il est vrai que cette ligne n'est pas satisfaisante mais je ne crois pas qu'on puisse aujourd'hui envisager une nouvelle ligne sur ce territoire complexe et urbanisé. Peut-être que cette étude permettra néanmoins d'obtenir des aménagements supplémentaires des infrastructures actuelles".

Il préconise en revanche de plancher sur deux pistes. D'abord, éliminer les aléas techniques et humains. Et puis, travailler sur un rééquilibrage des deux territoires.

"Pourquoi cette liaison est-elle si problématique? Parce que vous avez beaucoup de Stéphanois qui partent le matin travailler à Lyon et qui rentrent le soir. Pour les Lyonnais qui réalisent le trajet en sens inverse, le problème est bien moindre ! Si les poids économiques étaient un peu plus équilibrés, cela réglerait en grande partie le sujet! La question doit donc être observée et traitée de manière beaucoup plus globale que par la lorgnette des infrastructures".

La FNAUT Aura (Fédération des associations d'usagers des transports ferroviaires) s'interroge, elle aussi, sur l'opportunité d'une nouvelle ligne. "Créer de nouvelles lignes va couter extrêmement cher pour quel gain? Quelques minutes de temps de parcours ne sont pas la priorité des usagers. Leur priorité c'est d'avoir plus de trains, et plus de fiabilité", explique ainsi Nicolas Peyrard, son président.

"Cette idée est à mon sens un caprice pour marquer la colère de certains élus locaux face à l'abandon de l'A45. C'est idéaliste, inutile et très loin des besoins réels".

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