Chantier Part-Dieu à Lyon : le choix de Vinci sous l'ère Collomb a manqué de « transparence », révèlent des magistrats

La Chambre régionale des comptes a publié, lundi 25 septembre, un rapport d'observations sur les opérations de restructuration du quartier de la Part-Dieu, à Lyon (Rhône). Les magistrats pointent un « manque de transparence » de la Métropole, à l'époque du maire Gérard Collomb, dans le choix de Vinci pour le chantier de la tour To-Lyon, mais aussi de la place Béraudier, devant la gare, et du parking souterrain attenant, en « consentant plusieurs facilités » au constructeur, « dans un secteur pourtant hyperconcurrentiel ».
La tour To-Lyon, dernière à sortir de terre dans le quartier d'affaires de la Part-Dieu, sera inaugurée à la fin de l'année 2023.
La tour To-Lyon, dernière à sortir de terre dans le quartier d'affaires de la Part-Dieu, sera inaugurée à la fin de l'année 2023. (Crédits : La Tribune Aura)

La Métropole de Lyon a-t-elle favorisé le constructeur Vinci dans certains travaux de transformation de la Part-Dieu ? La chambre régionale des comptes, dans son rapport d'observations publié le lundi 25 septembre 2023, met en doute la « transparence » de la collectivité alors présidée par Gérard Collomb dans certaines opérations, parmi lesquelles figure le projet To-Lyon, cette nouvelle tour noire de 171 mètres, dont l'inauguration est annoncée à la fin de l'année 2023. Inscrite dans la « restructuration du pôle d'échanges multimodal (PEM) » du deuxième quartier d'affaires français, opérée par la société publique locale Lyon Part-Dieu créée en 2014, l'ouvrage est complété par la rénovation de la place Béraudier, devant la gare, et la construction d'un parking sous-terrain de 500 places, le tout, pour une opération globale à 283,4 millions d'euros pour le constructeur.

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Refus de la maîtrise foncière nécessaire

Dans leur rapport, qui plonge dans les exercices comptables de 2014 à 2021, les magistrats pointent notamment le renoncement de la métropole à la maîtrise foncière nécessaire, « pour des raisons de coût et de délai », malgré la déclaration d'utilité publique des opérations. Si celle-ci ne s'avère pas obligatoire, elle a eu pour effet, selon les rédacteurs du rapport, de participer à une situation de co-production avec des partenaires privés, que la chambre définit comme la « méthode Part-Dieu » qui « désigne un urbanisme négocié lorsque l'aménageur ne dispose ni du foncier, ni de l'argent. L'aménageur prend alors le parti de coproduire avec les acteurs privés, dans une logique contractuelle ». Décision qui intervient alors que « le coût de l'expropriation envisagée était tout à fait supportable financièrement par la Métropole de Lyon », selon les magistrats.

« La Métropole de Lyon, à travers la SPL Lyon Part-Dieu, a consenti plusieurs facilités à la société Vinci pour lui permettre de réaliser son projet. Si le montage juridique retenu a été justifié par le fait que l'opération « To-Lyon » reposait sur une co-construction avec un investisseur privé, il n'en est pas moins contestable dès lors qu'une partie des ouvrages a vocation à être utile à la collectivité, et que le choix de Vinci a manqué de transparence dans un secteur pourtant très concurrentiel. »

Chambre régionale des comptes d'Auvergne-Rhône-Alpes, le 25 septembre 2023

En conséquence, selon le rapport : « Vinci a été présenté comme un partenaire indispensable et incontournable pour mener à bien le projet de restructuration du pôle d'échanges multimodal », en acquérant des emprises foncières dans le périmètre du projet, ce qui lui aurait fait acquérir la qualité « d'interlocuteur naturel ». Toujours selon le rapport, Gérard Collomb, ancien président de la métropole, annonçait dès 2012 l'attribution du marché au constructeur. Pourtant, Vinci « ne disposait (trois ans plus tard, en 2015), tout au plus, que de la maîtrise foncière de quelques emplacements de parking au sein de la copropriété située sous la place Béraudier. A fortiori, Vinci ne disposait pas non plus, à cette date, de la maîtrise foncière nécessaire à la stricte réalisation de son projet ».

Compte tenu de la forte imbrication des différentes opérations de restructuration du pôle d'échanges multimodal, il est inenvisageable d'imaginer que le choix de Vinci n'ait pas donné lieu à des contacts préalables étroits et réguliers, tant des services techniques que des décideurs, notamment le président de la SPL qui était alors aussi le président de la métropole de Lyon.

Chambre régionale des comptes

Pour la SPL Lyon Part-Dieu, « aucun choix public n'est intervenu »

Dans sa réponse au rapport, rédigée le 31 août dernier, la SPL Lyon Part-Dieu aujourd'hui présidée par Florent Sainte Fare Garnot, formule « de vives réserves » au sujet des conclusions critiques adressées à la métropole. Pour la société publique, détenue à 90 % par la métropole et à 10 % par la ville de Lyon : « Pour mémoire, le foncier était maîtrisé par le privé, et, en l'espèce, aucun choix public n'est intervenu (...) L'intention publique s'est restreinte à susciter l'initiative privée, pour voir construire à cet emplacement un projet immobilier d'ampleur, notamment hôtelier. »

Présenté aux élus lors du dernier conseil métropolitain, lundi 25 septembre 2023, le rapport d'observations n'a pas été assailli d'interrogations. Pour Béatrice Vessillier, vice-présidente à l'urbanisme et au renouvellement urbain :

« Les choses avaient été bordées juridiquement par des avocats de part et d'autre. En effet, étant donné l'imbrication très étroite entre le parking souterrain et la place basse, il y avait une certaine logique à confier la réalisation à Vinci. La complexité technique du projet le justifiait également. Je m'en tiens à ces analyses factuelles et aux réponses qui ont été données à l'époque aux élus en charge des ces montages. La Chambre régionale des comptes verra quelle suite elle donne à ce rapport. »

Béatrice Vessillier, vice-présidente de la métropole de Lyon, déléguée à l'urbanisme, au renouvellement urbain, à l'action foncière.

Cette publication intervient au cœur du chantier de restructuration du quartier, réalisé aujourd'hui à moitié (dont 50 % des dépenses prévisionnelles et 53 % de recettes, indique la SPL). La tour To Lyon sera quant à elle inaugurée à la fin de l'année 2023.



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