"Province, mon amour" : en 2021, l’immobilier neuf des Alpes a continué d'attirer, mais les stocks sont au plus bas

Elu en décembre dernier, le nouveau président de la FPI des Alpes, Vincent Davy, revient sur une « bonne année » pour le secteur des Alpes, avec le retour à des niveaux de transactions d’avant-crise. Car la demande est toujours très forte sur les quatre principales villes et métropoles de l'arc alpin (Grenoble, Chambéry, Annecy, Aix-les-bains), qui continuent d’attirer pour leur cadre de vie. Mais les retards de délivrance des permis, ainsi que la hausse des coûts des matières premières pourraient fortement compliquer le scénario en 2021.
(Crédits : CC/Wikemedia)

Chaque année, la FPI Alpes publie son Observatoire annuel sur la conjoncture du marché local de l'immobilier collectif neuf. Et si 2021 peut être qualifiée de « bonne année » du point de vue des transactions, avec des têtes de pont régionales (Grenoble, Annecy, Chambéry, Aix-les-Bains) qui continuent d'attirer à la fois les locaux mais aussi les lyonnais et les franciliens par leur qualité de vie, elle fait déjà ressortir un premier élément d'inquiétude : celui de la tension sur le marché.

Car après deux années de crise et des élections municipales et métropolitaines qui ont provoqué attentes et changements de majorité, les délais de délivrance des permis de construire se sont rallongés dans l'ensemble des villes de l'arc alpin.

Un phénomène qui débutait en 2020, s'est accentué en 2021, et qui pourrait même atteindre son apogée en 2022, certaines villes comme Annecy bouclant l'année avec un stock de logements neufs collectif au plus bas.

« Alors que les niveaux habituels et jugés sains sont plutôt de l'ordre de 15 mois, nous sommes sur un stock à l'offre d'à peine six mois à Annecy, de 8 mois à Aix-Les-Bains Grand Lac. Seule Grenoble se porte légèrement mieux à 15 mois », affiche Vincent Davy, nouveau président de la FPI Alpes. « Or, il existe une vraie demande sur l'ensemble des marchés alpins, où le nombre de réservations reste correct malgré la crise ».

Les prix flambent à Annecy et Aix-les-Bains

Résultat ? Dans une ville comme Annecy, qui cumule « forte demande » et « nombre élevé de refus de permis de construire », le prix au m2 du neuf (à 5.386 euros/m2) dépasse désormais celui de la métropole lyonnaise (à 5.262 euros/m2).

Il faudra en effet compter 370.000 euros en moyenne pour se loger dans le neuf à Annecy, contre 293.000 euros à Aix-les-Bains Grand Lac ou 235.000 euros à Chambéry par exemple.

Même si, sur le papier, les chiffres de l'Observatoire de la FPI Alpes évoquent une très légère baisse des prix de -1% à Annecy, il s'agit d'un phénomène en trompe l'œil selon Vincent Davy.

« Les niveaux de prix restent proches des années précédentes alors qu'en réalité, il s'agit désormais d'opérations menées sur des sites plus excentrés, moins proches du cœur de ville, et où le m2 devrait donc en théorie être moins élevé ». Et d'ajouter : « Compte-tenu du fait qu'il y a eu plus de 1 500 logements, dont environ 500 logements sociaux refusés à Annecy, les prix devraient encore augmenter très fortement, il ne sera pas possible de répondre à la demande ».

Un autre secteur des Alpes pâtit d'une hausse provoquée par un effet de rattrapage sur ses prix : il s'agit du secteur d'Aix-les-Bains Grand Lac, une communauté de communes surnommée la "Riviera des Alpes". Située à une trentaine de kilomètres d'Annecy, elle multiplie les atouts aux yeux des acquéreurs.

« Aix-les-Bains Grand Lac rencontre une explosion des prix, passés de 4.135 euros le m2 en 2019 à 4.600 euros/m2 aujourd'hui ! Cela s'explique par un bon cadre de vie, avec une liaison TGV plus proche de Paris qu'Annecy, et qui dispose en outre d'un vrai bassin d'activité sur le site du Bourget du Lac », constate Vincent Davy.

Ce marché a d'ailleurs particulièrement attiré les investisseurs institutionnels, à travers de la vente en bloc : un bon signe selon la FPI Alpes, qui témoigne de la confiance dans ce secteur, même s'il ne représente qu'un petit volume (353 unités réservées en 2021).

Grenoble et Chambéry, deux villes moyennes toujours dans la course

Les hausses de prix sont ensuite plus nuancées à Grenoble, qui représente 50% du marché de l'Isère, et où les prix des logements neufs augmentent une nouvelle fois, mais de manière contenue (+3% en 2021), après une première hausse de +3% en 2020.

Le prix du m2 dans le neuf se place ainsi à 3.730 euros à Grenoble tandis qu'à Chambéry, le très bon niveau de réservations des biens neufs (+14%, soit du jamais vu depuis 2007) s'accompagne également d'une hausse des prix de +5% en 2021, avec un prix moyen qui s'élève désormais à 3 816 euros/m2 (hors stationnement).

« Chambéry est une ville qui était marquée par une forme de désengagement des investisseurs et habitants jusqu'ici, et qui bénéficie désormais d'une bonne tendance et d'une vraie demande, avec un stock descendu à 8 mois ».

C'est d'ailleurs en premier lieu le manque de production de logements, et notamment de permis délivrés, qui inquiète désormais les acteurs de l'immobilier neuf. Car en plus des retards pris lors de la crise sanitaire et des élections locales, le rallongement des délais d'obtentions des permis de construire se poursuit dans chaque marché alpin, « en dehors de la coloration politique », note la FPI Alpes.

Un sujet sur lequel les élus sont souvent pointés du doigt en premier lieu comme la cause de ces délais, et que Vincent Davy tient cependant à nuancer : « Nous discutons avec eux et ils sont en réalité conscients du problème... Les élus font cependant face à des choix difficiles avec d'un côté, le PLU qui les autorise à densifier et de l'autre, la volonté de ne pas trop le faire mais aussi, des questions qui se posent de plus en plus régulièrement sur l'accueil de ces nouvelles populations, et notamment des services qu'il faudra développer (transports, écoles...) ».

Même si en attendant, les acteurs du neuf rappellent : « le temps de la construction n'est pas le temps politique : cela fait presque deux ans que les permis sont systématiquement bloqués ou refusés à Annecy, et l'état des stocks baisse dangereusement », alerte Vincent Davy.

Tandis que le besoin en logements continue de grimper

En attendant, la FPI Alpes note que le besoin en logements continue de grimper, avec des villes moyennes alpines qui bénéficient encore du regain d'intérêt des acheteurs. « Le cœur de la demande n'est pas alimenté par les investisseurs, mais par les acquéreurs de résidences principales », note la FPI Alpes.

Et depuis la crise, ces acheteurs proviendraient de plus en plus des grandes métropoles voisines comme Lyon, mais aussi désormais de l'Ile-de-France : « Le secteur des Alpes attire beaucoup, et le phénomène s'est encore renforcé depuis 2 à 3 ans, avec une population qui a tendance à augmenter plus fortement que la moyenne nationale, comme on le voit à Annecy ».

Conséquence de ce phénomène : les prix s'affichent encore, en cette fin 2021 à la hausse, et ils devraient le rester en 2022, estime le président de la FPI Alpes, qui rappelle qu'il ne s'agit pas nécessairement d'une bonne nouvelle, y compris pour les promoteurs.

« Plus on vend un logement à des prix élevés, plus on doit s'adresser à une cible étroite d'acheteurs. Contrairement à ce que l'on pourrait penser, les promoteurs n'ont donc aucun intérêt à ce que la hausse des prix se poursuivre ».

Et pourtant, la montée des prix devrait tout de même être alimentée, courant 2022, par plusieurs facteurs : les retards pris dans la délivrance des permis associés à la forte demande des ménages d'une part, mais aussi désormais la hausse du coût des matériaux, qui continuent d'impacter les nouveaux projets du secteur du bâtiment.

« Les prix du foncier n'arrêtent pas de monter, de même que ceux des matériaux. Les coûts de construction eux-mêmes sont concernés par la mise en application de nouvelles réglementations comme la RE2020 au 1er janvier dernier, qui vient ajouter des hausses de 7 à 15% », poursuit Vincent Davy.

Enfin, l'essor des différentes chartes de bonnes pratiques urbanistiques au sein des collectivités pèserait également sur le marché. « Les collectivités souhaitent aujourd'hui toutes se doter de référentiels ou de chartes de bonnes pratiques, afin que leurs habitants soient mieux logés : c'est une bonne chose, et il y a des éléments où nous ne pouvons qu'être d'accords. Mais il faut être conscient qu'ajouter certaines règles revient, en bout de ligne, un renchérissement des coûts », met en garde Vincent Davy, qui cite en exemple la mise en place de matériaux plus onéreux, ou encore de hauteurs de plafonds supplémentaires, pouvant se traduire par la perte d'un étage à commercialiser par exemple.

Pour 2022, la FPI Alpes demeurera particulièrement attentive sur l'état de ses stocks, avec des discussions déjà engagées avec les différentes municipalités.

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