Niche Fused Alumina : cinq repreneurs potentiels et des questions pour l'heure en suspens en Savoie

Après son placement en redressement judiciaire le 23 avril dernier, le fabricant savoyard de corindon blanc Niche Fused Alumina, actuellement détenu par le fonds de pension américain Dada Holdings, vient de recevoir cinq candidatures à la reprise de son usine centenaire. Une perspective encourageante en marge de la nouvelle audience, prévue ce lundi 24 juin au tribunal de commerce de Chambéry (Savoie), qui doit permettre de dresser un premier point d'étape des dossiers déposés.
Les syndicats de Niche Fused Alumina ont travaillé de concert au cours des dernières semaines sur un business plan afin de défendre leur vision des marchés et des perspectives de développement de leur outil industriel.
Les syndicats de Niche Fused Alumina ont travaillé de concert au cours des dernières semaines sur un business plan afin de défendre leur vision des marchés et des perspectives de développement de leur outil industriel. (Crédits : DR/ML)

Il ne s'agit que d'un point d'étape et pourtant, il se veut déjà emblématique. Car après un placement en redressement judiciaire décidé il y a seulement deux mois, le 23 avril dernier, et une recherche de repreneurs qui s'est enclenchée sur quelques semaines, le fabricant centenaire de corindon blanc, Niche Fused Alumina (NFA), a finalement déjà reçu pas moins de cinq candidatures potentielles à sa reprise sur la table.

Un premier soulagement pour les représentants des salariés, et notamment pour la CGT, qui défend aux côtés de la CFE-CGC la sauvegarde des quelques 180 emplois du site. Même si rien n'est encore joué : « On nous dit que les candidats repreneurs sont de qualité, et c'est plutôt une bonne nouvelle pour nous que plusieurs acteurs se soient positionnés. Mais on attend de voir quelles seront leurs offres », avancent David Bourquenoud et Anthony Buttarello, tous deux délégués syndicaux CGT de Niche Fused Alumina.

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A ce stade, la confidentialité plane cependant encore aussi bien sur les noms, que sur les projets nourris par les cinq candidats. Tout juste quelques informations sont égrainées par le directeur actuel du site, Pierre le Cacheux, contacté par La Tribune  : « Nous avons des groupes plus ou moins grands, français ou non, avec une petite majorité d'Européens... Mais il s'agit de cinq repreneurs sérieux ».

Des premiers signes qui démontrent, selon lui, un certain attrait pour l'usine, qui est issue d'un historique et savoir-faire centenaires dans la fabrication de corridon blanc, ce minéral particulièrement abrasif qui, grâce à sa dureté, entre dans la fabrication de différents produits pour l'aérospatiale, l'automobile, les parquets laminés ou encore le médical. « Chaque repreneur aura bien entendu ses propres motivations », poursuit Pierre le Cacheux.

Mais pour l'heure, il n'est pas encore temps de parler de projets de reprise, qui devront encore être affinés au fil des visites et échanges avec la direction de l'usine, ses syndicats ainsi que les administrateurs judiciaires nommés par le tribunal. Car la partie ne fait que commencer : « Nous avons déjà eu des visites et il va y en avoir d'autres. Nous avons des échanges quotidiens avec différents repreneurs qui sont en train de monter des offres », ajoute le directeur du site.

Un nouveau délai attendu pour consolider les offres

Dans ce contexte, la nouvelle audience prévue ce lundi 24 juin devant le Tribunal de commerce de Chambéry (Savoie) ne devrait constituer qu'un point d'étape, après la date limite de dépôts des offres : autrement dit, ce ne sera pas encore le moment de trancher entre les différents projets de reprise, qui devront être questionnés et affinés, après avoir été officiellement déposés le 10 juin dernier.

« Dans ce type de processus, les repreneurs potentiels ne dévoilent pas tous les éléments de leur projet dès le début », souligne Pierre le Cacheux, qui attend notamment que le tribunal se prononce sur le délai qui sera accordé aux candidats afin de compléter leurs offres.

En coulisses, on évoque une date possible début juillet. Tout dépendra aussi de la situation financière de l'entreprise, qui est entrée en phase de redressement judiciaire, pour une période d'observation de six mois, et dont la trésorerie demeurait tendue : son actionnaire, le fonds de pension américain Dada Holdings, avait réinjecté il y a quelques semaines une enveloppe sous forme de prêt, qui devait aider le site à tenir jusqu'à cet été. Celle-ci pourrait encore être complétée par une nouvelle somme, afin de permettre à l'entreprise de poursuivre ses activités, le temps de la procédure...

Car du côté des marchés, les voyants repasseraient progressivement au vert :

« Nous arrivons aujourd'hui sur un niveau d'activité bien meilleur que l'an dernier, même si nous sommes entrés dans une phase inflationniste sur le coût des matières premières à nouveau, qui pousse vers une augmentation des prix. Et ce, alors que la concurrence chinoise reste très compétitive », observe le directeur du site.

Le flou encore sur le contenu des offres

Jusqu'à cette audience, l'actionnaire de Niche Fused Alumina, qui avait repris le site savoyard de la Bâthie en 2017, avait encore la possibilité de se positionner également pour redresser l'entreprise. Mais cette option semble écartée, selon plusieurs sources du dossier, ce qui tendrait à privilégier, de fait, une reprise par un nouvel acteur.

Reste également des questions de la forme que pourrait prendre ce changement d'actionnaire : simple continuité d'activité ou plan de cession ? Rien n'est encore tranché à ce stade. Les projets des candidats, ainsi que la situation financière de l'usine, pourraient bien peser dans la balance.

Durant la période dite « d'amélioration des offres » qui s'ouvre, demeurent encore de nombreuses inconnues sur les conséquences pour l'emploi ou encore le montant de cette possible cession. Aucun projet n'a encore été dévoilé, tout se joue pour l'heure en coulisses. Et la concurrence pourrait faire grimper les offres, espèrent encore les représentants des salariés.

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« Nous allons rencontrer au cours des prochaines semaines les candidats repreneurs, des contacts sont en train de faire avec le CSE. Les offres devront ensuite être déposées et étudiées par les experts du CSE et celui-ci, en vue de donner un avis consultatif au tribunal », rappelle David Bourquenoud. Les syndicats de Niche Fused Alumina ont en effet travaillé de concert au cours des dernières semaines sur un business plan, en lien avec le cabinet d'expertise Secafi, afin de défendre leur vision des marchés et des perspectives de développement de leur outil industriel.

« Nous avons exposé notre vision de l'entreprise afin de démontrer que notre usine peut être rentable et viable dans son entièreté, avec l'ensemble de ses emplois et en ne négligeant pas un secteur plus qu'un autre. Car c'est ce qui nous a sauvé jusqu'ici », affirme le délégué CGT, qui espère que cette vision, nourrie d'axes de diversification et nouveaux marchés, pourra compléter celle des candidats à la reprise.

Malgré un climat social que les représentants de salariés estiment « tendu » et « anxiogène » en raison des incertitudes qui planent sur l'avenir de leur site, ils rappellent que les salariés sont mobilisés pour faire tourner la production, qui connaît un regain d'activité.

« Malgré la situation, les salariés répondent présents et rester mobilisés pour sauver leur usine. Après quinze années de ballotement entre différents acteurs, nous souhaitons trouver un repreneur qui possède une vraie vision industrielle et qui porte l'usine là où elle devrait être, et non pas là où nous sommes, car le corindon blanc a encore de l'avenir devant lui », estiment les deux délégués CGT. « Les syndicats jouent le jeu et font tout pour faciliter le processus et la recherche de repreneurs », concède à son tour directeur du site. L'audience de ce lundi devrait désormais établir les prochains jalons attendus cet été.

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