Le fabricant des vélos cargo Kiffy compte sur son exposition à l'Elysée pour rebondir

La TPE ligérienne Easy Design Technology a pu exposer à l’Elysée ses vélos cargos électriques, à l’occasion de la grande exposition du Fabriqué en France. Une occasion en or de mettre en avant ses produits et son savoir-faire alors même qu’elle avait été placée en redressement judiciaire quelques jours avant l’événement.
Le kiffy a trouvé sa place dans le hall de l'exposition du Fabriqué en France, qui s'est tenu au Palais de l'Elysée.
Le kiffy a trouvé sa place dans le hall de l'exposition du Fabriqué en France, qui s'est tenu au Palais de l'Elysée. (Crédits : Easy design technology)

Les 1er et 2 juillet derniers, le Palais de l'Élysée accueillait la troisième édition de la « Grande exposition du Fabriqué en France » et proposait aux visiteurs de découvrir les savoir-faire nationaux avec la mise en avant de 124 produits imaginés et fabriqués en France. Des entreprises de toutes tailles censées représenter non seulement les compétences multiples et pointues présentes dans le pays mais aussi, - c'est en tout cas ce à quoi on pourrait s'attendre - montrer des chemins de réussite économique basée sur le made in France.

Pourtant, parmi cette centaine d'entreprises présentes, - sélectionnées parmi près de 2.500 dossiers par un jury composé de nombreuses personnalités du monde économique (dont les ministres Roland Lescure et Olivia Grégoire) -, certaines étaient en difficulté. C'est le cas de la TPE ligérienne, Easy Design Technology (5 salariés ; 2 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2022), en redressement judiciaire depuis le 31 mai.

Créée en 2015, la petite entreprise a développé des vélos électriques cargos sous la marque Kiffy. Vendu aux alentours de 5.500 euros, ce biporteur, au design travaillé et coloré, est adapté à un usage urbain et permet de transporter ses courses ou ses enfants.

Ne pas rater l'occasion de se montrer, malgré tout

« J'ai reçu le courrier signé d'Emmanuel Macron nous indiquant que nous étions sélectionnés pour la Grande Exposition le lendemain de ma déclaration de cessation de paiement. Je ne crois pas que les services en charge de l'organisation de l'événement étaient au courant de notre situation. Personne ne nous en a parlé, ni avant, ni pendant, ni après. Et d'ailleurs, d'après les échanges que j'ai eus avec d'autres participants, nous n'étions visiblement pas les seuls à nous trouver dans une situation complexe », explique Christophe Rosenstiel, dirigeant de la TPE et par ailleurs à la tête du groupe industriel ITI (100 salariés, CA 2022 : 15 millions d'euros).

Sollicitée sur cette situation  la Préfecture de la Loire a renvoyé la balle aux services de l'Élysée, en charge de la sélection et de l'organisation de l'événement. Ces derniers n'ont pas donné suite à notre demande.

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Malgré la situation inconfortable dans laquelle elle se trouvait, la TPE n'a pas renoncé à sa participation à l'événement. Au contraire, elle a profité de son invitation à la grande exposition du Fabriqué en France pour mettre en avant son savoir-faire. Une mise en avant très utile dans cette période complexe de redressement judiciaire :  Easy Design Technology est en période d'observation jusqu'en novembre prochain, période devant mener à une reprise de l'entreprise.

« Nous étions très bien positionnés sur cette exposition, nous avons été vus par un nombre important de visiteurs. C'est toujours bon à prendre pour notre visibilité », confie l'entrepreneur, assurant que des discussions ont d'ores et déjà été initiées par ailleurs avec de potentiels repreneurs. « Je suis confiant pour l'avenir, le potentiel du Kiffy est certain ».

Et ce, même si celui-ci a été mis à mal par les soubresauts que connait actuellement le secteur du vélo.

« La bulle du vélo est en train d'exploser »

Porté par le boom du vélo post-covid, la TPE avait, pour la première fois, atteint l'équilibre financier en 2021. 2022 s'annonçait plus que radieux, Easy Design Technology devait produire plus 1.000 vélos pour un chiffre d'affaires de 2,5 millions d'euros et s'apprêtait à changer de braquet pour monter à 5.000 vélos en 2025 avec une ambition de 8 à 10 millions d'euros de chiffre d'affaires. L'entreprise était alors avantagée par son choix du made in France. Dans un contexte de pénurie de pièces (et globalement de vélos) face à une demande explosive, les délais de fabrication courts proposés par la petite structure ligérienne représentaient un argument de choix.

Mais c'était sans compter sur la crise ukrainienne ajoutée aux conséquences du Covid sur la chaine mondiale d'approvisionnement. Easy Design Technology s'est retrouvée subitement confrontée à une interruption totale de livraison des moteurs Bosch.

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« Sur les six derniers mois de l'année 2022, nous n'avons plus reçu un seul moteur alors que nous avions de nombreuses commandes... Nous ne pouvions donc plus livrer nos clients. En revanche, nous avons continué de pré-produire et d'assembler afin d'être prêts à livrer dès que les moteurs arriveraient. Ce que nous avons pu faire effectivement dès le début de 2023, avec une livraison de 200 exemplaires de notre nouvelle gamme de Kiffy », expose Christophe Rosenstiel. « Le problème est que notre fournisseur nous a livré à ce moment-là tout ce qu'il n'avait pas livré en 2022 et nous a demandé de payer cash...  »

Impossible pour la TPE. Car justement au moment où on lui demandait de payer immédiatement des centaines de moteurs, en face la demande s'effondrait. « En fait, les livraisons de moteurs se sont débloquées plus ou moins en même temps pour tous les fabricants de vélos électriques. Les gros ont inondé les magasins, avec des moyens de pression bien différents des nôtres. Sans compter que de nombreuses marques de vélos se sont lancées ces derniers temps mais avec une demande qui s'est ralentie. Nous avons eu des difficultés à placer nos vélos dans les magasins, à nous faire payer par ceux-ci et donc à faire rentrer de l'argent ». Et d'observer : « La bulle du vélo est en train d'exploser ».

Contacté, Bosch a indiqué ne pas pouvoir commenter le cas d'Easy Design Technology puisque celui-ci commerçait avec un distributeur et non en direct (NDLR, ce qui est le cas de la grande majorité des fabricants de petite envergure), en précisant que « l'industrie du vélo a connu des montagnes russes ces trois dernières années, notamment en ce qui concerne les chaînes d'approvisionnement ».

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