Prix du gaz. "Un choc de compétitivité avec les Etats-Unis qui force à rester attentifs" (Jérôme Geneste, France Chimie AURA)

L’INVITE ECO. A l'heure où Bercy rencontre encore ce mercredi après-midi les fédérations professionnelles concernant la mise en œuvre des mesures relatives à l'électricité et au gaz du plan de résilience, Jérôme Geneste, président de France Chimie AURA, mais aussi directeur des établissements Seqens dans la région, suit attentivement l’évolution des cours du gaz et des matières premières. Car même si les industriels auralpins ont démontré jusqu’ici leur résilience, la perspective d’un choc de compétitivité qui pourrait avoir lieu avec les Etats-Unis notamment, qui n’évoluent pas à la même vitesse que ceux de l’Europe, fait partie des craintes.
Comme d'autres filières, tout le paradoxe réside dans le fait que le secteur de la chimie, comme d'autres, se trouvait aussi en pleine reprise lorsque cette nouvelle crise liée à la guerre en Ukraine a frappé son tissu économique : à l'échelle de la filière, 120.000 emplois étaient projetés sur les cinq prochaines années afin de soutenir la croissance attendue.
Comme d'autres filières, tout le paradoxe réside dans le fait que le secteur de la chimie, comme d'autres, se trouvait aussi en pleine reprise lorsque cette nouvelle crise liée à la guerre en Ukraine a frappé son tissu économique : à l'échelle de la filière, 120.000 emplois étaient projetés sur les cinq prochaines années afin de soutenir la croissance attendue. (Crédits : DR)

Pour l'industrie de la chimie, l'un des principaux impacts de la guerre en Ukraine se situe sur le terrain de l'augmentation des prix du gaz, « qui peut représenter une augmentation de 30 à 40% des coûts de production ». « Pour certains fabricants d'engrais ou de polyamides, cela peut représenter un impact massif, qui ne peut pas toujours être répercuté sur les prix », rappelle Jérôme Geneste, président de France Chimie AURA (qui représente 758 établissements et 33.000 salariés dans la région) et directeur des sites de Roussillon et de Saint-Fons de Seqens, un fabricant de principes actifs dédiés à l'industrie pharmaceutique.

Des tarifs qui, s'ils perdurent, pourraient entraîner un choc de compétitivité entre l'Europe et les Etats-Unis, où les prix n'ont pas augmenté à la même vitesse.

« Si cette situation dure et que des actions ne sont pas prises de manière assez rapide, il existe un risque que certains produits soient fabriqués sur un autre continent », met en garde Jérôme Geneste, sur le plateau de Lyon Business (BFM Lyon / La Tribune AURA).

Il met en avant les discussions qui se tiennent actuellement entre les industries gazointensives et le gouvernement, à l'heure où Bercy rencontre encore ce mercredi après-midi les fédérations professionnelles concernant la mise en œuvre des mesures relatives à l'électricité et au gaz du plan de résilience, et plaide notamment pour la mise en place d'aides transitoires, qui pourraient être accordées temporairement pour venir en soutien à cette industrie. Un sujet qui demeure stratégique à plus d'un titre, à quelques jours désormais du premier tour de l'élection présidentielle.

Des chaînes logistiques chamboulées par deux fois

Alors que certaines usines françaises, notamment les fabricants d'engrais normands, ont déjà revu leurs volumes de production à la baisse, ce ne serait cependant pas encore massivement le cas en Auvergne Rhône-Alpes.

Chez Seqens, un ralentissement de production de quelques jours aura été observé au démarrage de cette crise, mais pas uniquement en raison des prix du gaz :

« Ce sont aussi tous les approvisionnements en matières premières qui sont impactés, avec des chaînes logistiques qui ont d'abord été chamboulées par le Covid puis par la guerre en Ukraine, et désormais par la reprise du Covid en Chine... Les entreprises comme le nôtre doivent jongler », atteste Jérôme Geneste.

Seqens est donc passé, comme d'autres, à la recherche de nouveaux fournisseurs pour diversifier ses achats, mais tente aussi, lorsque cela est possible, de constituer des stocks sur certaines matières.

« Un grand nombre de matières premières générales et nécessaires à la chimie comme l'éthanol ne sont pas suffisamment produites en Europe par exemple », note-t-il cependant.

Egalement à la tête d'un grand projet de relocalisation d'un principe actif clé, le paracétamol, qui n'était lui aussi plus produit en Europe et dont le retour avait été soutenu par France Relance, Seqens planche d'ailleurs sur le démarrage de cette unité, toujours espérée en 2024/2025. Car même si son directeur reconnaît plus largement qu'une période comme celle-ci « ralentit nécessairement l'ensemble des projets », pas de décalage à attendre pour l'instant à ce sujet.

120.000 emplois projetés sur cinq ans

Comme d'autres filières, tout le paradoxe réside dans le fait que le secteur de la chimie, comme d'autres, se trouvait aussi en pleine reprise lorsque cette nouvelle crise a frappé son tissu économique :

« Nous étions lancés dans une phase de développement industrielle, avec de nouveaux matériaux répondre aux besoins de nouveaux produits comme les batteries, comme on a pu le voir avec le nouveau centre d'excellence d'Arkema, ainsi qu'avec la chimie verte et biosourcée qui prend désormais une place importante ».

A l'échelle de la filière, ce sont d'ailleurs 120.000 emplois qui étaient projetés sur les cinq prochaines années afin de soutenir la croissance attendue. « Nous étions jusqu'ici dans une bonne dynamique, avec le vent dans les voiles », confirme Jérôme Geneste.

Pour passer ce cap, les plateformes chimiques de Roussillon (Nord-Isère) comme de la vallée de la Chimie près de Lyon devront donc continuer à appuyer voire même à accélérer leurs programmes de décarbonation, lancés avant la crise sanitaire.

« Il faut arriver à sortir des matières fossiles : Roussillon va par exemple bientôt n'être plus qu'à 20% de gaz, après des actions entreprises avec son incinérateur, l'utilisation de la biomasse, etc ».

Tout l'enjeu des prochains mois sera donc de trouver des moyens d'ajustement, « qui pourraient combiner à la fois hydrogène et électrification des procédés ».

Retrouver l'intégralité de l'interview ici en replay

Un décideur chaque semaine

Pour rappel, le groupe La Tribune et BFM Lyon s'unissent depuis cette rentrée pour vous proposer, à travers l'émission Lyon Business (tous les mardis à 17h45), l'interview d'un décideur de l'économie lyonnaise au coeur de l'actualité.

Une occasion de décrypter ensemble les enjeux des dossiers et tendances de l'économie locale, animée par Elodie Poyade pour BFM Lyon et Marie Lyan pour le bureau Auvergne Rhône-Alpes du journal La Tribune.

Une émission à retrouver en direct et en replay sur la chaîne BFM Lyon, disponible sur le canal 30 de la TNT et sur les chaines 479 (box SFR), 360 (Orange), 315 (Bouygues) et 915 (Free), ainsi que sur le bureau Auvergne Rhône-Alpes de La Tribune.

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