À Lyon, les eaux usées alimenteront un réseau tempéré de chaud et de froid urbain

Le futur quartier de la Saulaie, situé en périphérie directe de Lyon, à Oullins, accueillera à l'horizon 2026 un réseau tempéré de chaud et de froid collectif, alimenté par les calories des eaux usées de la métropole. Cette innovation valorise autrement ces eaux grises, là où les besoins de chaud et de froid collectifs sont, eux aussi, grandissants.
La ZAC de la Saulaie, à Oullins, accueillera un réseau de chaud et de froid tempéré, généré par les eaux usées de la métropole, à partir de 2026.
La ZAC de la Saulaie, à Oullins, accueillera un réseau de chaud et de froid tempéré, généré par les eaux usées de la métropole, à partir de 2026. (Crédits : © Thierry Fournier - Métropole de Lyon)

Les consultations vont être lancées et les premiers travaux d'aménagements publics débuteront en 2024. La métropole entend bien voir livrer les 870 logements, dont 30 % de logements sociaux, de la zone d'aménagement concerté (ZAC) de la Saulaie à partir de fin 2025. Ce quartier d'Oullins, en périphérie proche de Lyon (Rhône), et desservi depuis septembre par le métro B, verra comme bien d'autres quartiers ses anciennes friches se transformer, tout comme l'alimentation en chauffage des habitants. Les 20 hectares de la zone, qui sera composée d'immeubles, d'espaces verts, de commerces et de bureaux, seront en effet approvisionnés collectivement en chaud et en froid grâce aux énergies générées par les eaux usées de la collectivité. Calories qui seront captées sur le parcours de ces eaux grises, se dirigeant vers la station d'épuration de Pierre-Bénite (33 communes y sont reliées, soit l'équivalent de 500.000 habitants et une centaine d'industriels).

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Pour cela, une centrale, enterrée sous la place Kellermann, permettra la récupération thermique des eaux usées dont la température se situe entre 15 et 25 degrés en fonction de la période de l'année. L'échange thermique se fera à cet endroit, en direction du quartier grâce à deux circuits dédiés : un pour le chaud, un pour le froid. « L'équilibre sera ajusté grâce à des pompes à chaleur, en bas de chaque immeuble et de chaque îlot pour abaisser ou chauffer l'eau, en fonction de la climatisation ou du chauffage », décrit Philippe Guelpa-Bonaro, vice-président aux réseaux de chaud urbain. « L'énergie viendra des panneaux solaires situés sur les toits des bâtiments de la ZAC », ajoute l'élu EELV, qui estime cette articulation « locale et vertueuse ».

Un des premiers réseaux tempérés en France

À l'exception de la ville de Paris, qui opère également un réseau de chaleur et de froid grâce aux énergies issues des égouts, le projet lyonnais serait « l'un des premiers réseaux tempérés de France », observe l'élu. Pas de trace d'autres initiatives en effet. Le projet de station, validé par la métropole de Lyon lors du conseil communautaire du 26 juin 2023, permettra de produire 8,5 GWh/an en chauffage et en eau chaude sanitaire, ainsi que 2,5 GWh/an en climatisation.

« C'est un réseau relativement modeste par rapport aux autres grands réseaux de chaleur métropolitains. Pour autant, il est sans doute l'un des premiers en France de cette taille, doté de cette innovation », décrit Phillipe Guelpa-Bonnaro.

Coût de l'investissement : 20 millions d'euros, sur les 81 millions de participation publique totale pour l'aménagement du quartier. L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) pourrait, elle, participer à hauteur de 30 % de l'investissement de la station, qui sera opérée en régie publique à partir de 2027 ou 2028, « soit un ou deux ans après son lancement ». Elle sera en effet d'abord construite et opérée par Engie Solutions, dans le cadre d'un marché global de performance : « Une fois que les choses se seront calées, nous opèrerons en régie publique et récupérerons des recettes de fonctionnement. Le projet s'équilibre sur quinze ans », ajoute Philippe Guelpa-Bonnaro. Des coûts conséquents, rapidement rentabilisés par la contribution des 2.000 nouveaux habitants estimés et des nombreux bureaux (3.500 salariés), qui bénéficieront de tarifs compétitifs par rapport aux solutions autonomes, comme les pompes à chaleur.

Auvergne-Rhône-Alpes, première région de France en nombre de réseaux de chaleur urbaine

D'autant que depuis juin dernier, dans la métropole de Lyon, le raccordement aux réseaux collectifs devient obligatoire dans certains cas : « Sur un périmètre donné, les copropriétaires, les bailleurs de fonds et tous les propriétaires de bâtiments ont l'obligation de se raccorder dès lors qu'ils réalisent une extension significative, une rénovation du système de chauffage ou une nouvelle construction », détaille Philippe Guelpa-Bonaro. Un système de dérogation est ouvert lorsque le raccordement n'est pas possible.

Pour l'instant, la collectivité compte sept réseaux de chaleur et porte deux projets supplémentaires, en plus du réseau tempéré de la Saulaie. De même, la région Auvergne-Rhône-Alpes est la première de France en nombre de réseaux de chaleur (189) et deuxième en énergie livrée (3.849 GWh, contre 12.650 pour L'Île-de-France). D'après l'enquête des réseaux de chaleur et de froid 2022, rédigée par le syndicat national du chauffage urbain et de la climatisation urbaine, ces deux régions, auquelles s'ajoute le Grand-Est, « concentrent à elles trois 66% des livraisons de chaleur et pratiquement la moitié des réseaux classés de France ».

Des besoins de froid urbain grandissants

Si la génération de chaleur, l'hiver, reste la priorité de ce type de service, il permettra aussi de distribuer du froid, avec une eau refroidie à 5 degrés. Ce type de réseau, comme celui employé dans le quartier d'affaires de La Part-Dieu, à Lyon, ne génère pas de chaleur à la production, et consomme moins d'énergie, grâce au transfert des calories et des frigories par les eaux.

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Selon le syndicat national du chauffage urbain, les livraisons de froid urbain ne constituaient que 0,78 TW/h en France en 2021. Aujourd'hui, les besoins de froid de confort sont estimés à environ 19 TWh dans la stratégie nationale bas carbone du ministère de la Transition écologique. La feuille de route précise qu'ils atteindraient 34 TWh en 2050. L'Etat a d'ailleurs inscrit dans sa dernière loi de programmation pluriannuelle de l'énergie l'objectif de tripler les capacités de ces réseaux de froid d'ici à 2030.

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