En mal de relocalisation, la filière textile confirme sa "route de la soie" avec le Japon pour innover

En pleine crise sanitaire, pas question de couper les ponts avec l'Asie : le pôle de compétitivité national du textile Techtera, basé à Ecully (Rhône), vient de renouveler un partenariat hérité de plus de dix ans avec le Japon. Une relation qui permet notamment aux Français, en mal de relocalisation actuellement, d’avoir accès à des matières innovantes, tandis que les Japonais y voient aussi une manière de voir s'ouvrir de nouveaux marchés.
Basé à Ecully dans le Rhône, Techtera se positionne comme le pôle de compétitivité français de la filière textile. Et dix ans après le démarrage d'un partenariat avec le Japon, il voit encore, post-crise, des perspectives de collaboration pour une industrie en mal de relocalisation.
Basé à Ecully dans le Rhône, Techtera se positionne comme le pôle de compétitivité français de la filière textile. Et dix ans après le démarrage d'un partenariat avec le Japon, il voit encore, post-crise, des perspectives de collaboration pour une industrie en mal de relocalisation. (Crédits : DR)

Malgré la crise, le pôle de compétitivité français du textile Techtera (22 membres) basé à Ecully (Rhône) a renouvelé son partenariat avec un pays de l'autre côté du globe, le Japon.

Un partenariat, ou Mémorandum de Coopération (Moc), vieux de dix ans, avait d'ailleurs déjà été renouvelé en mai dernier, mais ralenti par le Covid. Et pour cause : les frontières du Japon sont encore fermées aux Français, sauf pour de rares exceptions.

Mais qu'à cela ne tienne, puisque les résultats sont là : cet accord a déjà permis jusqu'à présent de réaliser sept projets de recherche et développement conjoints, 11 missions au Japon et 12 sessions de rendez-vous B2B.

Au total, près de 25 entreprises françaises sont "impliquées chaque année dans des actions vers le Japon".

Tenter de faire face à la concurrence

Dès la création du pôle de compétitivité, en 2005, l'équipe de direction avait en effet choisi de se tourner vers le Japon, et il ne s'agissait pas tout à fait d'un hasard : "L'un de notre coeur de cible est l'innovation, il était donc important pour nous de nous intéresser aux matières innovantes".

Et d'ajouter : "Il y a quinze ans, tous les fabricants de fils étaient issus du monde de la chimie, dans le monde de la pharmaceutique et du fil. L'Europe avait choisi de se concentrer sur la partie pharmaceutique là où le Japon s'était quant à lui spécialisé sur le fil", note Corinne Farace, déléguée générale de Techtera.

Une complémentarité entre les deux partenaires qui les conduit jusqu'à adresser le même défi :

"Ce partenariat avec le Japon était aussi un moyen de se rapprocher, car nous avions le même adversaire : la Chine et les États-Unis. [...] Car il nous fallait nous allier pour être compétitifs et faire face aux mastodontes de la filière", poursuit la DG.

Au Japon, Techtera est en contact avec le ministère de l'Économie, la Japan Chemical Fibers Association ou encore la Society of Fiber Science and Technology.

Avec l'objectif d'assurer, à la filière textile française, une nouvelle voie d'accès à des fibres et des matières peu ou pas encore commercialisées à l'échelle de l'Hexagone. "L'un de nos objectifs à travers ce partenariat est de voir par exemple s'il y a une innovation dans la matière que nos PME peuvent s'approprier", résume Corinne Farace.

"Ce qu'il viennent cherche en France, c'est les marchés"

Pour la France, l'intérêt de ce partenariat est donc la matière. Quant au Japon "ce qu'ils viennent chercher chez nous, c'est avant tout la technique, mais aussi le fait de développer de nouveaux marchés avec la France. [...]"

Un constat gagnant-gagnant qui va même jusqu'à assurer une meilleure traçabilité des matières premières : "On a d'un côté ceux qui conçoivent la matière et qui ne savent pas forcément ce qu'elle devient ensuite, tandis que nous-même, nous ne savons pas toujours d'où d'où elle vient."

Car côté français, l'industrie textile française englobe près de 2.200 entreprises qui emploient près de 61.000 employés, dont 63% sont des PME. Mais elle a fait face, au cours des dernières années, à de forts enjeux en matière de relocalisation :

"Aujourd'hui, 95% du textile consommé en France (habillement et linge de maison) est importé, dont 80% d'Asie" commentait à La Tribune Eric Boël à la tête le la PME ligérienne Les Tissages de Charlieu et qui a piloté une étude de l'Union des Industries Textiles (UIT). La Chine restant de loin le premier importateur de textile en France.

"En 2017, après 40 années de décroissance, le nombre de salariés a progressé de 3,6%. Cette progression a concerné sept des douze régions d'emplois textiles et notamment les cinq premières en termes d'effectifs", note toutefois le ministère des Finances. Auvergne-Rhône-Alpes étant d'ailleurs la première région en la matière.

Sans compter que sur d'autres aspects comme le recyclage, le Japon peut aussi apprendre de la France abonde Corinne Farace. "Ils ont étudié le système de bennes de dépôt comme celles dont on dispose ici, par exemple."

De prochains échanges sont déjà à l'agenda entre les deux pays : en juin 2022, une délégation japonaise est attendue pour venir aborder la question de l'économie circulaire, tandis qu'une délégation française devrait s'envoler pour le Japon afin d'évoquer le textile à destination du secteur de la Défense.

Le pôle Techtera organisera également un "Appareil Retail Tour" sur le prêt-à-porter au Japon et en Corée du 29 novembre au 3 décembre. Objectif : découvrir et renforcer la compréhension de l'écosystème de la mode et de sa distribution sur place.

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