Dans les rues de Lyon et de Grenoble, les SUV ne sont plus les bienvenus

Alors qu’Anne Hidalgo, la maire de Paris, organise une votation citoyenne sur la place des SUV dans la capitale, la Ville de Lyon ainsi que la métropole de Grenoble ont d’ores et déjà tranché. Cette dernière vient de voter la mesure : les propriétaires de SUV paieront plus cher leur abonnement dans les parkings en ouvrage dès le 1er mars prochain. A Lyon, l’abonnement résidentiel en voirie sera modifié avant l’été.
Les SUV sont considérés comme trop lourds, trop encombrants et trop polluants pour les maires, notamment, de Lyon, Grenoble, Paris et Bordeaux.
Les SUV sont considérés comme trop lourds, trop encombrants et trop polluants pour les maires, notamment, de Lyon, Grenoble, Paris et Bordeaux. (Crédits : Toyota)

C'est inédit. Pour la première fois, une métropole française instaure une tarification environnementale. Comprendre, une tarification du stationnement des véhicules séquencée selon leur impact environnemental. Impact estimé à l'aune de leur poids. La mesure vient d'être votée par l'assemblée de la Métropole de Grenoble.

A compter du 1er mars de cette année, les abonnés possédant une voiture considérée comme « lourde », verront donc leur abonnement majoré de 10%, pour les 21 parkings en ouvrage. Cela concerne ainsi les véhicules essence et diesel pesant plus de 1.550 kg ainsi que les véhicules électriques ou hybrides de plus de 1.800 kg. Avec au menu, « des hausses allant de 6€ à 10€ par mois pour les automobilistes en question, sur des abonnements mensuels allant de 65€ à 130€ selon les parkings », précise la Métropole.

La différence de traitement entre les deux est justifiée par la prise en compte du poids des batteries, selon Sylvain Laval, vice-président de Grenoble Alpes Métropole chargé de l'espace public, de la voirie, des infrastructures cyclables et des mobilités douces.

Les abonnés du territoire de la métropole grenobloise possédant des véhicules de plus petit gabarit verront, eux, leur abonnement majoré de seulement 5%, dans le cadre d'une politique globale de hausse des tarifs, décrite comme nécessaire pour financer les travaux à venir dans les 21 parkings en ouvrage du territoire.

Plus polluants, plus couteux pour la collectivité

« La limite de poids choisie permet de préserver la majorité des véhicules familiaux traditionnels », assure le président de Grenoble Alpes Métropole, Christophe Ferrari (mouvement Territoires singuliers). De fait, après vérification (au hasard des véhicules familiaux les plus répandus en France), un Renault Scenic TCE 160 de 2022 pèse 1.450 kilos. Un grand Scenic TCE 160, 1.528 kilos, un grand Citröen C4 space Tourer 1.420 kilos ou encore un Peugeot 508 SW blue HDI130, 1.430 kilos.

Car la majorité de gauche de l'agglomération grenobloise l'affirme : ce ne sont pas les véhicules familiaux dits « traditionnels » qu'elle vise mais les SUV (Sport Utility Vehicle en anglais), ces fameux véhicules issus de la tradition des gros 4X4 américains dont les Français semblent désormais raffoler.

Ils ont représenté, au premier semestre 2023 (source AAA Data), 46% des ventes de véhicules particuliers neufs. Des achats réalisés, 8 fois sur 10, par des urbains, toujours selon les statistiques d'AAA Data. A noter toutefois qu'un certain nombre de SUV affiche un poids en deçà des seuils.

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« On sait très bien que l'usure de la voirie et le niveau d'émission de C02 d'un véhicule dépendent avant tout de sa taille et de son poids. Les véhicules les plus lourds génèrent des coûts supplémentaires pour la collectivité. Cela apparaît donc logique que la politique tarifaire soit adaptée », commente Christophe Ferrari.

Une logique que dénonce Pierre Chasseray, délégué général de l'association 40 millions d'automobilistes.

« C'est de la grossophobie appliquée aux voitures. Les SUV polluent plus que quoi ?  Est-ce qu'un SUV moderne pollue plus qu'une petite voiture diesel datant de 15 ans ? Certainement pas. C'est complètement stupide. Quand on sait que la moitié des ventes de véhicules concerne des SUV, on peut s'interroger sur la vraie raison de ces sur-tarifications : qu'ils le disent clairement, ces élus jusqu'au-boutistes ne veulent plus de voitures dans leurs rues ».

« Faux », rétorque le président de la métropole grenobloise. L'objectif est bien, affirme-t-il, d'ajuster les tarifs de stationnement sur les coûts générés pour la collectivité. Tout en faisant de la pédagogie au passage : « Nous voulons inciter les acheteurs à mieux prendre en compte les critères environnementaux. La tarification environnementale reste quand même limitée, nous ne multiplions pas le tarif de stationnement des abonnés concernés par deux...».

Selon la Métropole, cette mesure concernerait 23% des véhicules du parc d'abonnés. Pour une recette annuelle supplémentaire de l'ordre de 60.000 euros.

« La mesure est symbolique et se veut surtout incitative », explique Christophe Ferrari. « Inutile ! », lui répond la conseillère d'opposition (Divers Droite) Dominique Spini Alim, intervenue en assemblée métropolitaine à l'occasion du vote de la mesure : « Cette mesure ne risque pas de sauver la planète. En revanche, ces hausses de tarif vont inciter les abonnés à se détourner des parkings ».

Le stationnement grenoblois en surface bientôt concerné ?

La Métropole travaille d'ores et déjà à une tarification environnementale du stationnement ponctuel dans ses parkings en ouvrage, et plus seulement des abonnements. Réflexion liée à une problématique technologique que mène aussi, en parallèle, la Ville de Grenoble pour son stationnement en surface.

«Nous espérons pouvoir mettre en place une tarification environnementale d'ici 2027. Ce n'est pas pour demain car nous devons d'abord moderniser nos horodateurs. Ils doivent être en capacité de se connecter aux bases de données officielles afin que le bon tarif (selon le poids) soit appliqué lorsque l'automobiliste entre sa plaque d'immatriculation dans l'horodateur ou l'application qui pourrait lui être couplée », dévoile Gilles Namur, adjoint au maire de Grenoble (l'écologiste Eric Piolle) en charge des mobilités et des espaces publics.

« Cela prendra un peu de temps mais nous devons agir sur ce sujet des SUV. Ils consomment plus, ils sont plus larges et demandent donc des aménagements de voirie adaptés. Leurs ventes explosent. Si rien n'est fait, ils représenteront 2/3 des ventes en 2030. Et ce n'est pas qu'un problème de pollution ou d'aménagement, c'est aussi une question de sécurité. Selon les assureurs, les conducteurs de SUV sont impliqués dans 10% d'accidents de plus que les autres ».

A Lyon, une réalité dès cet été

Annoncée l'année dernière, Grégory Doucet, le maire EELV de Lyon l'a confirmé à l'occasion de ses récents vœux aux habitants : la tarification environnementale du stationnement sur voirie sera une réalité dès cet été à Lyon.

Les véhicules électriques bénéficieront d'un tarif réduit de 15 euros (sauf pour les plus gros d'entre eux, les fameux SUV donc), ainsi que les véhicules thermiques de moins de 1.000 kilos. Le tarif standard de 30 euros par mois s'appliquera pour les véhicules thermiques de 1.000 kilos à 1.725 kilos et pour les véhicules hybrides rechargeables jusqu'à 1.900 kilos.

En revanche, les voitures les plus encombrantes (plus de 1.725 kilos pour les thermiques et plus de 1.900 pour les hybrides rechargeables) se verront appliquer un prix d'abonnement mensuel majoré à 45 euros. Une tarification adaptée pour les professionnels est proposée.

«  Prendre en compte le poids des véhicules, en plus de la motorisation, pour la politique de stationnement permettra de créer une tarification plus juste pour notre espace public lyonnais », justifie Valentin Lungenstrass, délégué aux mobilités, à la logistique urbaine et aux espaces publics. Jusqu'ici, un tarif unique de 20 euros par mois était en vigueur.

Les métropoles de la région Auvergne Rhône-Alpes ne sont pas les seules à se pencher sur le sort des SUV. A Paris, par exemple, la maire Anne Hidalgo organise le 4 février prochain une votation citoyenne sur le sujet, avec une proposition de triplement de tarif. A Bordeaux également, une réflexion approfondie est menée.

Au niveau national, l'État mène la même stratégie de durcissement : la limite pour le malus écologique a été durci pour 2024 avec un seuil à 1.600 kg, contre 1.800 kilos en 2023.

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Commentaires 6
à écrit le 25/01/2024 à 8:01
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Faut dire aussi qu'on nous dit l'écologie tandis qu'on nous vend des bagnoles toujours plus grosses.

à écrit le 24/01/2024 à 22:03
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Pourriez-vous nous rappeler le taux d'abstention lors des élections municipales, à Paris, Grenoble, Lyon, Bordeaux, par exemple ?

le 25/01/2024 à 9:12
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@ ici ailleurs. Comme partout et à chaque fois,les absents ont tort.

à écrit le 24/01/2024 à 19:58
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Et de son côté, Paris préfère les rats...

à écrit le 24/01/2024 à 15:19
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Bel exemple de stigmatisation de l'autre totalement stérile car ce n'est pas avec cela que l'on va sauver l'amazonie, réduire la pollution des 1.4 milliards d'habitants de l'inde, idem pour la chine, réduire la déforestation en Afrique ou ailleurs...

à écrit le 24/01/2024 à 12:45
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Les SUV (leurs propriétaires) n'ont aucune excuse. Un souvenir, il y a quelques années, dans une petite rue parisienne, un Porsche Cayenne à côté d'une 4L... Edifiant. "Ils" bénéficients (consomment) de plus d'espace public, donc ils doivent assumer....

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