Ce samedi, c'est un format réduit -mais non moins international- qui est attendu dans les Capitale des Alpes. Car le maire écologiste de Grenoble, Eric Piolle, se prépare à recevoir des représentants de l'ONU, de la commission européenne, mais aussi des délégations de la jeunesse venant de différentes nations, à l'occasion du coup d'envoi de Grenoble Capitale Verte 2022.
Durant cette année de règne, la ville de près de 160.000 habitants (et plus largement de 450.000 âmes si l'on prend le périmètre de sa métropole) verra chaque mois rythmé par une thématique en lien avec la transition écologique.
Mais avant cela, le maire EELV, réélu en juillet 2020, a présenté ce mardi des voeux à la presse, marqués bien entendu par la crise sanitaire, mais également par les questions d'ordre plus nationales et politiques.
L'eurodéputé et désormais candidat investi par les Verts était d'ailleurs de passage dans la ville d'Eric Piolle ce jeudi, pour défiler avec les enseignants qui manifestent contre la gestion de la crise sanitaire du Covid-19 à l'école, et devait se rendre ensuite en montagne afin de dénoncer les dégâts du réchauffement climatique. Il y a également rencontré Eric Piolle et Delphine Batho, avec lesquelles il a (sans surprise) évoqué la présidentielle.
- Le sujet de la présidentielle, et de son ancien adversaire Yannick Jadot
Le maire de Grenoble, qui fait désormais partie du "comité stratégique" de Yannick Jadot, est revenu lui-même sur la notion de rassemblement, à l'aube de l'échéance d'avril 2022 :
"Il existe aujourd'hui beaucoup de bruit autour de la question du rassemblement. J'ai moi-même une expérience de comment l'on construit ce type de rassemblement, avec notre expérience grenobloise, et cela ne se fait pas dans une campagne électorale".
Et ce, tout en affirmant cependant que "la famille écologiste est désormais rassemblée et ouverte", rappelant qu'il existe désormais en son sein "au moins trois listes présentes lors des dernières élections européennes, et qui totalisaient 19%".
De son côté, le candidat écologiste Yannick Jadot a estimé à la presse, en arrivant dans la capitale des Alpes, qu'il souhaitait "s'inspirer" du bilan d'Eric Piolle (et plus largement des villes dirigées par les écologistes), estimant que cela constituerait "un bénéfice extraordinaire" pour sa campagne.
Quelques heures plus tôt, Eric Piolle glissait également que le projet écologiste "pourrait être présenté en fin de mois", non loin de là, à Lyon, un autre fief d'EELV où siègent déjà le président du Grand Lyon Bruno Bernard, très actif dans la campagne de Yannick Jadot, ainsi que le maire de Lyon, Grégory Doucet.
- Le cas des voeux Zemmour, vite éludé
Avec, pour commencer, une allusion dès les premières minutes de son intervention aux voeux prononcés par le candidat d'extrême droite, Eric Zemmour. Celui qui avait critiqué, il y a quelques jours, la profession de journaliste qu'il avait lui-même exercé à l'occasion de ses voeux, est pointé par Eric Piolle : "Ces propos sont extrêmement choquants et il faut là aussi de l'énergie et mettre des digues pour confiner cette violence, qui commence toujours face à la presse, par des mots, et qui grandit et s'étend ensuite , comme on l'a vu, avec les attaques de Sciences Po Grenoble", a estimé le maire de Grenoble, qui ajoute :
"Qu'il s'agisse des attaques contre les minorités religieuses, contre les minorités de genres ou de l'antisémitisme, notre histoire est éloquente et nos pages les plus sombres doivent nous éclairer pour anticiper", a estimé Eric Piolle.
- L'absence d'Emmanuel Macron, "une dérobade"
Pour Eric Piolle, les discussions amorcées au long des derniers mois en vue d'organiser la venue d'Emmanuel Macron, à l'occasion de l'inauguration de Grenoble Capitale Verte qui aura lieu ce samedi, ne sont que l'illustration d'une "dérobade du président qui, en tournant le dos à Grenoble, tourne également le dos à des millions de personnes, entrepreneurs, parents, associations, qui oeuvrent à créer de nouvelles prospérités".
Le président de la république sera à nouveau représenté par sa ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, qui était déjà venue il y a quelques semaines à Grenoble, afin de matérialiser un engagement de l'Etat de 4 millions d'euros pour cet événement.
Une occasion également, pour l'élu grenoblois, de regretter qu'Emmanuel Macron ait choisi de conserver la présidence tournante de l'Union européenne, "qui revient mathématiquement tous les 14 ans", alors qu'il prépare en même temps une élection présidentielle. "Un pied de nez majeur à l'Europe", selon lui :
"Là où la France prenait le leadership il y a sept ans à travers la Cop 21, ce virage nous fait honte, de même que les tractations avec les lobbys du gaz menées au cours des derniers mois afin de peser à l'échelle européenne". Eric Piolle souhaite, à ce sujet, "que samedi soit un temps où l'on entende la jeunesse qui n'a pas été entendue durant la Cop 26".
Pour Yannick Jadot également, « c'est une faute politique quand on a une grande ville française célébrée pour son action sur l'écologie à l'échelle de l'Europe de ne pas participer à sa célébration », a-t-il reconnu lui aussi dans la matinée, lors de sa visite.
- "La promesse phare" : une taxe sur le stationnement des SUV à l'étude pour 2023
Durant cet exercice de voeux, Eric Piolle en a profité pour lâcher une annonce qui pourrait faire grand bruit : afin de poursuivre son objectif de "protéger la santé des habitants" et de "continuer de mettre la justice sociale au coeur de son action", le maire de Grenoble a en effet annoncé l'instauration d'une réforme du système de stationnement de la ville pour 2023, prévoyant notamment une taxe pour les véhicules individuels les plus lourds, de type SUV.
Notant un phénomène "d'explosion" de ce type de véhicules, qui atteindraient selon les chiffres évoqués par l'élu "près de 40% des nouvelles immatriculations de voitures neuves en France, dans des villes comme Lyon", le maire écologiste a estimé :
"Transporter des humains pesant entre 50 et 90 kgs en moyenne, dans des voitures comme des 206 de 600 kgs est déjà une chose, mais de le faire dans des véhicules qui pèsent 1,6 à 1,8 tonnes en est une autre, car ils émettent encore plus de GES, de particules fines et plus généralement, de particules lors du freinage, compte-tenu des lois universelles de la physique".
Reste à préciser les modalités de ce projet de taxe, puisqu'il faut rappeler que l'élu écologiste avait d'abord entrepris une première réforme de la tarification du stationnement à Grenoble lors de son premier mandat, afin de rendre sa grille progressive et adaptée aux revenus des ménages.
Une disposition qui avait finalement été révoquée par le tribunal administratif en février 2017, qui arguait d'une mesure "ne respectant pas l'égalité des citoyens" et forçant ainsi la municipalité à rembourser le trop-perçu à une frange de ses habitants.
- La sphère de l'opposition locale, à la métropole
Le plan local a également été cité, par le maire de Grenoble, avec quelques allusions concernant le rôle et la gouvernance de l'outil métropolitain, qui avaient donné lieu à l'été 2020 à une importante bataille entre les soutiens écologistes du camps d'Eric Piolle, et ceux du président sortant et ex-PS, Christophe Ferrari. Ce dernier avait finalement été reconduit, de justesse, à la tête de Grenoble Alpes Métropole, aux commandes également de l'outil du SMMAG (Syndicat Mixte des Mobilités de l'Aire Grenobloise - SMMAG) qui gèrent les transports en commun.
En ce début 2022, les lignes de fractures semblent cependant encore loin d'être refermées, puisqu'Eric Piolle a profité de ses voeux pour regretter "la gratuité des transports en commun que les grenoblois attendaient le week-end" ou encore "la réduction de l'offre du réseau", gérés par la Métropole.
Mais aussi le sujet de la Convention citoyenne pour le climat, que la métropole de Grenoble souhaite elle aussi lancer prochainement, qui représente à la fois pour Eric Piolle "une occasion de monter le niveau de jeu pour le territoire", même s'il assure : "Nous veillerons à ce que le principe du sans filtre, primordial pour respecter les ambitions des citoyens et dépasser les conservatismes, soit appliqué".
Questionné au sujet de ses relations avec l'outil métropolitain, Eric Piolle a à nouveau déploré l'absence d'élections directes au sein d'une métropole comme celle de Grenoble, qui traduisent selon lui "un décalage majeur entre le choix des urnes et la composition de l'exécutif". "Mais notre objectif reste de faire avancer le plus possible les choses".
- Et la question en suspens : celle du procès de la fête des Tuiles
Questionné par la presse, Eric Piolle a confirmé la tenue d'une audience en mars prochain concernant l'affaire de la Fête des Tuiles, cette manifestation grenobloise qu'il avait créée en 2015 comme un grand rendez-vous populaire, et pour lequel il a été renvoyé devant le tribunal de Valence pour des soupçons de "favoritisme" concernant l'attribution d'un marché public, pour les années 2015 et 2016, à une association culturelle.
"Cette affaire n'est pas compliquée du tout car je suis un justiciable et un patron comme un autre. Il s'agit toujours d'un litige technique sur lequel nous avons eu l'occasion de nous exprimer. Nous avons suivi une procédure de marché public à ce sujet et la question sera tranchée par le tribunal. Cela ne m'inquiète pas plus que cela", a affirmé l'élu écologiste, qui rappelle que "toute la chaîne de direction de la ville" est également citée à comparaître dans cette procédure.
Et Eric Piolle d'ajouter : "Nous passons au tribunal souvent, notamment avec la Métropole, avec laquelle nous avions un autre litige technique sur une somme de 500.000 euros concernant l'entretien de bornes, et sur laquelle nous avons gagné".
Un agenda chargé donc, pour une année où Grenoble devrait être sous les feux des projecteurs à l'échelle nationale.
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