Rafraîchisseurs individuels bas carbone : en Isère, Caeli Energie s'envole grâce à des froids porteurs

Créée en 2020, la startup grenobloise Caeli Energie conçoit et fabrique des rafraichisseurs sans fluide frigorigène, brevetés par le CNRS. La jeune entreprise, née dans la veine des « deeptech », surfe sur les alternatives bas carbone aux climatiseurs, à l'heure d'une transition planifiée du secteur tertiaire. Elle profite aujourd'hui d'une demande exponentielle partout en France et lève un fonds de 10 millions d'euros pour l'extension de sa ligne de production et une quinzaine d'embauches.
(Crédits : Caeli Energie)

Face aux fortes chaleurs et à la nécessaire rénovation des bâtiments du secteur tertiaire, qui doit baisser ses consommations d'énergies de 40 % d'ici à 2040, la startup grenobloise Caeli Energie creuse petit à petit sa place dans l'écosystème du refroidissement bas carbone. Créée en 2020, cette jeune entreprise de la deeptech s'est spécialisée dans la fabrication de refroidisseurs décentralisés, brevetés par le CNRS, aux rendements énergétiques cinq fois supérieurs à ceux des climatiseurs actuels.

Ces « rafraîchisseurs », nouveaux sur le marché, ne génèrent pas de calories à la production - celles qui d'habitude participent à la formation des îlots de chaleur en ville. Caeli a en effet développé une technologie de rupture. La génération de froid vient de la récupération d'énergie d'évaporation, sans augmenter l'hydrométrie de la pièce où l'appareil se trouve. Aucun fluide frigorigène n'est alors utilisé. Au profit d'une faible consommation d'énergie, qui répond aux critères actuels de décarbonation des systèmes de froid des bâtiments, dont l'Etat estime les besoins à 19 térawattheure (TWh) dans sa stratégie nationale bas carbone.

Une levée de fonds de 10 millions d'euros

Devant ce haut potentiel, mais aussi parce que les portes du marché s'ouvrent grand devant elle, Caeli s'est vue renforcée mi-2023 par une levée de fonds de 10 millions d'euros (en augmentation de capital et en dettes). Parmi les investisseurs, figurent la Banque publique d'investissement (déjà porteuse de la startup avec l'Ademe), Asterion Ventures, Starquest et Rise PropTech. Les objectifs : optimiser sa ligne de production et embaucher une quinzaine de salariés en un an.

Car, forte d'un chiffre d'affaires en progression (100.000 euros projetés en 2023), la SAS nourrit de bons espoirs de multiplier sa croissance par 10 l'année prochaine, en dépassant le 6e zéro. Ses capacités de production augmentent en effet progressivement (60 unités cette année), mais nécessitent un coup d'accélérateur. Au point que de nouveaux besoins se font désormais ressentir : « On cherche à recruter dans les métiers industriels, mais aussi commerciaux et marketing », soutient Rémi Perony, cofondateur et directeur général.

« On bénéficie d'un boulevard réglementaire »

En effet, depuis cette année, la demande explose. Au point d'afficher, trois ans après la création de l'entreprise, « un carnet de commandes très bien rempli ». Dans le viseur : le secteur tertiaire et administratif, avec des modèles déployables « pièce par pièce » (Ehpad, crèches, institutions). « On bénéficie d'un grand boulevard réglementaire, avec des volontés fortes de renouveler les parcs tertiaires », remarque l'entrepreneur, auparavant membre du Commissariat à l'énergie atomique.

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Le décret tertiaire donne en effet encore sept ans aux entreprises pour se mettre aux normes en diminuant de 40 % les consommations énergétiques des bâtiments par rapport à 2010. Pour cela, certains quartiers d'affaires, comme ceux de La Défense (Paris) ou de La Part-Dieu (Lyon), tentaculaires, mettent à l'œuvre des réseaux collectifs de chaud et de froid urbain, qui trouvent leur sens dans la densité des espaces hyper-artificialisés dans lesquels ils se déploient. Reste que leur développement reste encore à la marge dans les grandes métropoles. Un immense marché s'ouvre devant Caeli, dont le directeur général confirme : « il ne s'agit pas d'opposer les offres. Face à nous, la principale concurrence reste celle des climatiseurs ».

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S'ouvrir au secteur résidentiel et à l'export

Face à ces nouvelles perspectives, "très encourageantes", la prochaine étape pourrait consister à se placer dans le marché résidentiel ces prochains mois, dans une logique de diversification. Et pourquoi pas, d'ici à 2026, exporter dans d'autres pays de l'Union européenne. Mais l'heure est d'abord à la consolidation des positions de Caeli dans l'Hexagone, réaffirme Rémi Perony. D'autant que l'inflation ne l'a pas épargnée : « Fabriquer en France, c'est une volonté politique. On a fait ce choix et s'il le faut, on reportera au fur et à mesure les hausse des coûts sur les prix ».

Depuis son lancement, la startup fabrique en effet ses modèles entre l'Isère et la Haute-Savoie, au sein de l'usine d'assemblage Bosch Marignier. D'ici deux ans, elle espère pouvoir poser la première pierre de sa propre usine de production, grâce à une prochaine levée de fonds qu'elle escompte plus conséquente encore, haute de plusieurs dizaines de millions d'euros. Le site serait très probablement situé dans son cœur battant isérois, non loin des laboratoires de Grenoble INP et de l'Insa, avec lesquels elle travaille, ainsi que de Linksium et de la Société d'accélération du transfert de technologies Grenoble Alpes, dont elle avait intégré le programme Deeptech Alpes en 2022. Sa logique, et celles de ses investisseurs : prendre part au projet global de réindustrialisation dans un secteur prioritaire. Le tout, dans les rangs de la première région industrielle de France.

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