Clermont-Ferrand prolonge la gratuité pour tous des transports en commun le week-end

Il sera possible de se déplacer gratuitement en bus et en tram, pour trois ans de plus, le week-end dans la capitale auvergnate. La mesure va être prolongée après une phase de test de deux ans, qui a vu bondir la fréquentation des transports en commun. Coût de l’opération pour les collectivités : 2,1 millions d’euros par an. De l’argent public qui aurait été plus utile pour financer l’amélioration de la qualité du service, souligne l’Association des usagers des transports d’Auvergne.
L'accès aux bus de l'agglomération clermontoise restera gratuit le week-end jusqu'en 2027.
L'accès aux bus de l'agglomération clermontoise restera gratuit le week-end jusqu'en 2027. (Crédits : DR Emilie Valès)

La décision doit encore être votée par le conseil métropolitain cette semaine, mais la gratuité des transports en commun le week‐end devrait bien être reconduite jusqu'au 31 août 2027 dans l'agglomération clermontoise. Cette politique était expérimentée sur le territoire depuis décembre 2021. Un test grandeur nature de deux ans qui s'est soldé par un véritable succès selon le Syndicat Mixte des Transports en Commun de l'Agglomération Clermontoise, l'autorité organisatrice de la mobilité. C'est ce qui a motivé la prolongation de cette gratuité, présentée comme une mesure écologique et de pouvoir d'achat.

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« Nous avons enregistré une augmentation de la fréquentation de l'ordre de 28 % le samedi et de 62 % le dimanche. Cela fait environ 2 millions de déplacements supplémentaires qui s'ajoutent aux 4,5 déjà réalisés sur le réseau », chiffre François Rage, le président du SMTC-AC, le Syndicat Mixte des Transports en Commun de l'Agglomération Clermontoise.

Avec une tendance, l'attrait des familles avec enfants et des jeunes pour ces trajets gratuits le week-end. Et selon le syndicat, sur certaines lignes, jusqu'à 10% des usagers ne se seraient pas déplacés sans cette mesure. Il faut dire que le service est simple, pas besoin d'être résident de l'agglomération ou d'être détenteur d'un titre de transport. Rien n'est demandé à l'usager.

Evaluation du report modal à affiner

Difficile en revanche de mesurer l'impact réel de cette gratuité sur le report modal. Si les études menées à Clermont-Ferrand montrent que, sans cette gratuité, 20 à 40% des usagers, selon les lignes, auraient pris un autre mode de transport (vélo, à pied ou en voiture), on ne sait pas dans le détail s'ils ont spécifiquement renoncé à leur voiture pour le bus. Or c'est ce qui intéressent les collectivités dans une démarche écologique.

Une analyse qualitative doit donc être réalisée dans les prochains mois pour affiner les résultats. Quoiqu'il en soit, selon l'Observatoire des villes du transport gratuit, la gratuité ne peut pas résoudre à elle seule cette problématique, cela doit s'accompagner de contraintes imposées sur la voiture.

Un financement partagé de la mesure

Côté financement, cette gratuité est toujours évaluée à 2,1 millions d'euros par an pour les collectivités, entre le manque à gagner lié à la billetterie et le renfort de l'offre de service le week-end. Une somme partagée à parts égales (700.000 euros chacun) entre le SMTC‐AC, Clermont Auvergne Métropole et la Ville de Clermont‐Ferrand.

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Mais le modèle est-il soutenable alors que les autorités organisatrices de la mobilité sont notamment impactées par l'explosion des coûts énergétiques ?

« Du côté de la SMTC, nous avons un budget annuel de 100 millions d'euros donc cela ne représente pas une trop forte somme. Nous compensons notamment par l'augmentation du versement mobilité dont s'acquittent les entreprises, en hausse d'environ 5%. Il faut également préciser que cette dépense ne se fait pas au détriment d'investissements. La gratuité est absorbable en l'état actuel », tient à préciser François Rage, qui indique que les budgets sont à l'équilibre.

En revanche, impossible d'envisager une gratuité totale la semaine. La mesure était estimée à 15 millions d'euros par an sur l'agglomération de Clermont. Sans compter que le réseau n'aurait pas supporté la hausse de la fréquentation qu'aurait engendrée cette gratuité. En fait, le modèle est d'autant plus difficile à trouver dans les grandes agglomérations avec des réseaux très fréquentés et où les recettes de billetterie sont importantes. Ce qui a poussé d'ailleurs certaines villes à opter plutôt pour des politiques plus sélectives de tarification solidaire ou à destination des jeunes.

Gratuité pour tous

A Clermont-Ferrand, c'est bien le modèle d'une gratuité pour tous qui va être maintenu.

« Il aurait été préférable que cette gratuité soit accordée en fonction de critères sociaux et donc réservée aux foyers les plus modestes. Or là, cette aide bénéficie également à ceux qui n'en ont pas besoin. Le prix d'un ticket de bus n'est pas très élevé. C'est 1,50 euro (pour l'achat d'un carnet de 10 tickets, ndlr) et cela donne droit à 1h10 de déplacement. Les familles les plus aisées peuvent le payer, le coût est acceptable. L'argent public est rare donc il faut être vigilant et avoir une utilisation la plus rationnelle et efficace possible », estime de son côté Pierre Pommarel, président de l'Association des usagers des transports d'Auvergne.

D'ailleurs, pour ce représentant associatif, la priorité à Clermont-Ferrand était plutôt du côté de la qualité de l'offre et non pas du prix. Le service mériterait d'être amélioré selon lui.

« Nous sommes plus favorables à investir l'argent public dans le développement de l'offre car le réseau de Clermont-Ferrand est encore perfectible. Il ne répond pas aux attentes des usagers. Les fréquences entre les bus et les amplitudes horaires sont insuffisantes, il y a très peu de bus après 21h par exemple. Et puis, il n'y pas assez de voies réservées, » poursuit Pierre Pommarel, dont l'association n'a pas été consultée pour l'occasion.

Deux lignes à haut niveau de service

Et l'association de rappeler que quand la qualité n'est pas au rendez-vous, les automobilistes ne viennent pas dans les transports collectifs. Pour autant, elle ne s'est pas mobilisée contre cette gratuité. « Ce n'est pas non plus catastrophique car cela est cantonné aux week-ends. Nous serions en revanche fortement opposés à un élargissement au-delà », explique son président.

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Cette mesure n'handicape pas les projets en cours, promettent de leur côté les trois collectivités qui mettent en avant le chantier de restructuration du réseau de transports urbains, qui arrivera à échéance 2026.

« Je comprends les craintes mais avec le projet InspiRe, nous allons augmenter de 20% le nombre de kilomètres du réseau. Nos deux lignes de bus à haut niveau de service vont être en service de 4h30 à 1h du matin avec un passage toutes les 6 ou 7 minutes », argumente François Rage, le président du SMTC-AC.

Cela n'exonère pas une amélioration et un développement des réseaux de bus classiques existants, lui répond l'association.

Une quarantaine de villes en France

Cette expérimentation de gratuité des transports en commun le week-end était la première menée dans une grande ville, rappellent les élus de la métropole. En Auvergne-Rhônes-Alpes, l'agglomération roannaise (100.000 habitants) vient juste de se lancer sur ce même modèle en espérant « une hausse de la fréquentation d'au moins 20% sur l'année ».

Quant à la gratuité totale, elle est déjà mise en place dans une quarantaine de territoires en France, selon l'Observatoire des villes du transport public. Elle le sera à Montpellier à partir du 21 décembre. Une mise en place que suivra de très près Clermont-Ferrand. «Un des vice-présidents du SMTC-AC sera même sur place le jour J », glisse François Rage.

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Commentaires 7
à écrit le 10/11/2023 à 21:15
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dans notre monarchie technocratique et sociale ..... tout est gratuit .... Toutes nos élites "politico-administartives" aux revenus détournés de la capacité productive de ceux qui bossent n'ont pas le soucis du lendemain au contraire ils ont une pla...

à écrit le 10/11/2023 à 7:56
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Transports publics et gratuits pour tous svp, l'état offre des centaines de milliards à l'activité privée chaque année, que cet argent serve de temps en temps ce pour quoi il est prélevé ne serait pas du luxe, merci.

à écrit le 10/11/2023 à 7:44
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Il faudrait que les gens comprennent qu'il n'y a rien de gratuit. Le manque à gagner sera compensé sur leurs impôts et taxes

le 10/11/2023 à 7:55
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C'est le principe du service public en effet quand il engraisse les paradis fiscaux là il est vraiment improductif, quand il sert le public il fait le taf.

à écrit le 09/11/2023 à 21:39
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C'est payé par Michelin? ,

le 10/11/2023 à 17:34
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Non, il s'est dégonflé

à écrit le 09/11/2023 à 18:49
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Il serait intelligent de généraliser cette méthode pour tout porteur de carte d'abonnement ce qui impose toujours le "contrôle" !

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