Transport ferroviaire : l’Auvergne-Rhône-Alpes prend son temps sur l'ouverture à la concurrence des TER

Dans le cadre des Rencontres nationales du transport public, qui se déroulent jusqu’à jeudi près de Clermont-Ferrand, les acteurs du secteur échangent notamment autour de l’ouverture à la concurrence des TER. La Région Auvergne-Rhône-Alpes a lancé la procédure fin juin. Une entrée tardive qui s'explique par la complexité technique du sujet. Les usagers attendent une augmentation de l’offre et une amélioration du service, tandis que la collectivité devrait annoncer d'importants investissements sur le matériel roulant ferroviaire.
Contrairement à d'autres régions françaises, l'ouverture à la concurrence ne sera effective qu'en 2029 en Auvergne-Rhône-Alpes, avec les premières lignes exploitées par un potentiel nouvel opérateur.
Contrairement à d'autres régions françaises, l'ouverture à la concurrence ne sera effective qu'en 2029 en Auvergne-Rhône-Alpes, avec les premières lignes exploitées par un potentiel nouvel opérateur. (Crédits : DR/ML)

Avec ses 1.500 TER et 220.000 voyageurs par jour, l'Auvergne-Rhône-Alpes est la première région française, hors Île-de-France, en matière de services ferroviaires du quotidien. L'ouverture à la concurrence de ses trains express régionaux, votée dans le cadre de la loi « nouveau pacte ferroviaire » de 2018, revêt donc un enjeu particulier pour la deuxième région économique de France.

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En marge des Rencontres nationales du transport public, qui se déroulent jusqu'à jeudi à la Grande Halle d'Auvergne, près de Clermont-Ferrand, Frédéric Aguilera, vice-président délégué aux transports de la Région Auvergne-Rhône-Alpes, est revenu sur la complexité du sujet.

« Nous opérons notamment la ligne TER la plus empruntée de France en nombre de passagers, Lyon-Saint-Etienne, mais aussi le premier RER transfrontalier. Et puis nous avons le nœud ferroviaire de Lyon, l'un des plus complexes en région. Dès qu'il s'y passe quelque chose, cela impacte tout le sud-est de la France. L'ouverture à la concurrence que nous impose la loi ne s'improvise pas ! »

Six lots en fonction des zones géographiques

Pour répondre à cette obligation légale, la collectivité a décidé de constituer six lots, pour six appels d'offres différents. Cinq d'entre eux seront géographiques (lot Auvergne, lot étoiles de Chambéry et de Grenoble, lot étoile de Savoie et transfrontalier, lot étoile ferroviaire lyonnaise, lot relations longues distances régionales). Le dernier, fonctionnel, s'occupera de la relation voyageur, de la vente des billets et du service après-vente.

« Chaque lot aura son calendrier et son cahier des charges, car les problématiques ne sont pas les mêmes en fonction des territoires. Nous souhaitons y aller par étape et échelonner. Tout mener de front était impossible, à la fois pour nous et pour les opérateurs, » complète Frédéric Aguilera, également maire de Vichy dans l'Allier.

Si la procédure a été lancée en juin dernier, la collectivité, en tant qu'autorité organisatrice des mobilités, a décidé de mettre à profit les dix ans à venir afin, dit-elle, de « bâtir un schéma cohérent ». Ces lots vont faire l'objet, au cours des prochaines années, d'une définition de leur périmètre pour la gestion des gares, des infrastructures et du matériel. Le premier changement potentiel d'opérateur ne devrait intervenir qu'en 2029 pour le lot auvergnat, le plus simple techniquement. Suivra celui qui regroupe Chambéry et Grenoble, à horizon 2032-2033.

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L'ouverture, d'une « complexité sans nom » pour l'exécutif régional

L'Auvergne-Rhône-Alpes est bien moins avancée dans la procédure d'ouverture que d'autres régions françaises. C'est notamment le cas de Provence-Alpes-Côte-d'Azur, pionnière dans le domaine. Cette dernière a lancé, dès 2020, les appels d'offre pour ses lignes Marseille-Toulon-Nice, attribuées depuis à Transdev et dont l'exploitation devrait débuter mi-2025.

« Nous avons voulu prendre notre temps. Nous souhaitions d'abord regarder les autres et en tirer les leçons. Cela a fait évoluer notre réflexion. Au départ, nous voulions par exemple mettre en place douze lots, mais en analysant ce qui se passe ailleurs, nous avons changé notre stratégie et finalement opté pour cinq appels d'offres géographiques. Ce projet est d'une complexité sans nom, car il soulève des enjeux industriels, sociaux, de service... », pointe Frédéric Aguilera.

Laisser le temps au secteur de se structurer

De son côté, l'association des usagers des transports d'Auvergne, membre de la Fédération Aura de la FNAUT, ne s'alarme pas de cette entrée tardive dans le processus :

« Nous ne sommes pas à quelques années près », confirme Pierre Pommarel, son président. « Cela laisse au contraire le temps au secteur de se structurer. Il y a encore peu d'exploitants expérimentés. Nous préférons attendre pour que cela se fasse dans de bonnes conditions. Les premières régions vont essuyer les pots cassés. »

Aujourd'hui, les sociétés capables d'entrer en concurrence avec la SNCF sont les opérateurs nationaux comme Trenitalia, mais aussi ceux que l'on retrouve sur d'autres grands réseaux de transports, comme Kéolis ou Transdev.

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20 à 30% de trafic en plus attendu par la Région

Avec cette ouverture à la concurrence, l'exécutif régional attend en tous cas une meilleure qualité de service. La collectivité possède les outils pour mieux contrôler et pourra poser des exigences. La concurrence devrait notamment permettre de confronter la SNCF à d'autres offres en termes de régularité du service et de coût. Des gains de productivité sont en effet attendus. L'année dernière, la Région Auvergne-Rhône-Alpes a versé 553 millions d'euros à la SNCF pour opérer les TER.

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La collectivité espère également augmenter l'offre. Elle table sur une hausse de trafic des trains express régionaux de l'ordre de 20 à 30 % en moyenne sur l'ensemble du territoire. Pour l'association des usagers des transports d'Auvergne, l'urgence est bien d'améliorer le service et surtout de développer l'offre. Car, selon elle, la fréquentation des TER a crû de 15% en Auvergne-Rhône-Alpes par rapport à la période avant-Covid, et certains trains sont aujourd'hui bondés. Malgré tout, l'organisation ne se fait pas d'illusion.

« Nous avons bien conscience que l'ouverture à la concurrence ne règlera pas tous les problèmes, poursuit Pierre Pommarel. Cela devrait, certes, apporter une émulation nécessaire et améliorer la régularité, l'information aux voyageurs ou la propreté des trains. Mais pour éviter les pannes, il faut surtout que la Région investisse dans le matériel roulant et que l'Etat modernise le réseau, en tant que propriétaire des voies ferrées. Or, en France, l'âge moyen des voies est de 29 ans. Il est de 17 ans en Allemagne ».

Jean-Louis Thevenon, vice-président de l'association, abonde : « Peu importe que ce soit la SNCF ou un acteur privé, s'il roule sur des rails qui ont 50 ans, cela ne marchera pas mieux ».

Au sujet, justement, des investissements à réaliser sur la partie ferroviaire, les élus de la majorité régionale entendent faire des annonces sur le matériel roulant (acquisition et modernisation des rames), ce vendredi, « à plusieurs milliards d'euros », esquissent-ils. Il s'agit, pour eux, d'accompagner le choc d'offre et l'ouverture à la concurrence. La Région précise par ailleurs attendre un geste similaire de l'Etat sur les infrastructures.

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Commentaire 1
à écrit le 17/10/2023 à 19:23
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Coquille:La Région Rhône Alpes avec a sa tête Wauquiez ne prend pas son temps, elle PERD son temps.

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