Financement de France Rénov : l'Etat va compenser le retrait de la région Auvergne-Rhône-Alpes

Alors que la Région Auvergne-Rhône-Alpes avait signifié, en septembre dernier, se retirer de ce dispositif d'accompagnement à la rénovation énergétique des bâtiments en 2024, l'Etat annonce aujourd'hui reprendre le portefeuille de la collectivité pour maintenir ce service, au moins pour le premier semestre. Ce dispositif, qui vise à conseiller les particuliers dans la rénovation des logements, entend accompagner la transition énergétique du secteur, qui représentait 16 % des émissions de gaz à effet de serre en 2019.
L'Etat annonce aujourd'hui compenser le retrait de la Région Auvergne-Rhône-Alpes du service d'accompagnement France Rénov' à hauteur d'environ 10 millions d'euros, au moins pour le maintien du service au premier semestre 2024.
L'Etat annonce aujourd'hui compenser le retrait de la Région Auvergne-Rhône-Alpes du service d'accompagnement France Rénov' à hauteur d'environ 10 millions d'euros, au moins pour le maintien du service au premier semestre 2024. (Crédits : DR)

Le bras de fer, entre l'Etat et la Région Auvergne-Rhône-Alpes, aura duré deux mois. Trois ministres avaient même envoyé une lettre à Laurent Wauquiez, son président, le 4 septembre dernier. Le dispositif France Rénov, à savoir le service d'accompagnement pour la rénovation énergétique (SARE) des bâtiments, ne sera plus cofinancé par la collectivité l'année prochaine dans son périmètre. Celle-ci avait en effet signifié retirer sa participation annuelle de trois millions d'euros, au motif qu'elle « ne relève pas du champ d'action de la Région », avait alors plaidé Laurent Wauquiez, menaçant par ailleurs le service et ses 300 emplois.

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L'Etat va apporter 9,6 millions d'euros

Co-financé par l'Agence nationale de l'aménagement et de l'habitat (Anah), l'Agence de la transition écologique (Ademe) et des collectivités locales (EPCI, départements, régions), ce « service public de la performance énergétique de l'habitat » (Sppeh) offre un accompagnement aux particuliers dans leurs démarches de rénovation énergétique grâce à des conseillers présents sur tout le territoire. En 2023, les 22 millions d'euros dépensés au total pour ce service permettaient de « générer plus d'un milliard d'euros d'aides et de travaux au titre de Ma Prime Rénov », indique le cabinet de Fabienne Buccio, Préfète de région, « tout en permettant la création ou le maintien de près de 6.500 emplois ».

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Après plusieurs semaines d'échanges, et face à cette situation inédite, l'Etat annonce aujourd'hui compenser le départ de la deuxième région économique française à hauteur de 9,6 millions d'euros (8 millions pour l'équivalent des crédits SARE, et 1,6 million pour les six premiers mois de frais de fonctionnement des espaces conseils), afin de maintenir dans les premiers temps ce service public, au moins le premier semestre de l'année 2024. Le gouvernement s'appuiera sur l'Anah pour sa mise en œuvre, dans une décision entérinée lors de son dernier conseil d'administration, le 18 octobre dernier :

« A l'heure où nous devons tous redoubler d'efforts en matière de sobriété énergétique, l'État ne pouvait accepter que le service public de la performance énergétique puisse baisser en efficacité, que l'attribution des subventions Ma prime rénov et que les travaux de rénovation ralentissent faute de moyens suffisants, au détriment des habitants de la région Auvergne-Rhône-Alpes », indique le cabinet de Fabienne Buccio, Préfète de la région, dans un communiqué.

La Préfecture indique également que cette intervention permettra de préserver le réseau actuel des espaces conseils, et souligne le maintien des 220 millions d'euros de subventions engagées par l'Anah en 2024 dans la région concernant les rénovations énergétiques, dont 40 millions d'euros supplémentaires par rapport à 2023.

Un financement complexe

La Région Auvergne-Rhône-Alpes est la première à renoncer à ce dispositif, qui constitue aujourd'hui l'une des pierres angulaires de l'accès à l'aide Ma Prime Rénov', lancée en 2020 et dont la dotation a été renforcée dans le projet de loi de finances 2024, pour atteindre 5 milliards d'euros. Celle-ci vise à réaliser 200.000 rénovations énergétiques globales en 2024, soit le double du rythme annuel actuel. Le tout, afin d'accompagner la décarbonation des logements, qui représentaient 16 % des émissions directes de gaz à effet de serre en France en 2019 selon le Haut conseil pour le climat, et 45 % de la consommation finale énergétique du pays.

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Pour autant, la complexité du dispositif, qui s'appuie sur l'ancien réseau FAIRE incombant aux régions, depuis transféré à l'Anah et à l'Ademe, constitue un casse-tête identifié de longue date par l'association CLER (Réseau pour la transition énergétique), qui représente plus de 110 espaces conseil France Rénov : « Les Régions, dont le concours est indispensable pour la réussite de la transition énergétique, ont, quant à elles, un rôle clef à jouer dans le déploiement du SPPEH, sans toutefois que leur place dans ce dispositif soit bien définie, leur implication variant fortement selon les territoires », indiquait-elle déjà en septembre 2021. Le réseau, à travers la voix d'Isabelle Gacquet, experte efficacité énergétique au sein de l'association, pointait ainsi un besoin de clarification des responsabilités, le 12 octobre dernier :

« Le désengagement récent de la Région Auvergne-Rhône-Alpes est une alerte à prendre très au sérieux. Il n'est pas acceptable de laisser les collectivités locales se désengager du financement du service public public de la rénovation énergétique. L'État doit réagir et garantir pour tous les Français l'accès à un service public de qualité. Inscrire les responsabilités de chaque échelon territorial dans la loi est une priorité ».

Le service, maintenu au moins le premier semestre 2024

Ces dernières semaines, un bras de fer se jouait en coulisse pour faire reculer la collectivité. Jean-Luc Fugit, député Renaissance du Rhône et membre de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, interrogé courant octobre, voyait dans ce retrait « une position très singulière. L'agence est mise à mal au moment où l'Etat met plus d'argent pour financer les travaux... ». Dans un communiqué diffusé le 23 octobre dernier, 19 parlementaires (MoDem et Ronnaissance) annonçaient déjà une « participation exceptionnelle de l'Etat », avant d'avertir : « Mais notre région, deuxième région française, ne saurait se défiler pour assurer à terme la pérennité du financement ».

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Alors interpellée, la collectivité répondait que « L'Etat doit pouvoir assumer la charge des dispositifs qu'il met en œuvre et cesser de faire des annonces avec l'argent des collectivités soucieuses de la bonne gestion de l'argent public ».

« A plusieurs reprises, depuis le début de l'année, la Région a alerté les services de l'Etat et le gouvernement sur le sujet du financement des nouveaux dispositifs France Renov qui ne relève pas du champ d'action de la Région. Notre collectivité fait le choix d'accompagner nos artisans qui sauront consolider et développer leur activité grâce aux aides régionales », indique la Région Auvergne-Rhône-Alpes.

La Région mise sur la rénovation énergétique des lycées

La Région estime toujours ce dispositif « hors » de son champ de compétences. Pour Laurent Wauquiez, dans son courrier de réponse aux ministres, début septembre, indiquait alors que « le financement de dépenses administratives (par la Région) n'est pas la voie qui nous permettra de répondre à nos objectifs communs ». En parallèle, la collectivité affiche son programme d'actions, dont les deux « plan Marshall » à destination des lycées, dont le deuxième volet est financé à hauteur de 3,2 milliards d'euros pour la période 2022 - 2030. Dans ses orientations, figure notamment la rénovation thermique et l'amélioration énergétique des bâtiments du secondaire (1 milliard d'euros).

« La Région Auvergne-Rhône-Alpes a investi 80 millions d'euros dans un plan régional de sobriété énergétique pour les lycées, développe une filière leader de l'hydrogène en France, ou poursuit un plan objectif zéro enfouissement des déchets à l'horizon 2030... Ces actions sont à la fois bonnes pour notre environnement, utiles pour le développement des entreprises de notre territoire, et vertueuses car elles créent de vrais emplois et servent à défendre le pouvoir d'achat de nos habitants », ajoute la collectivité.

Mis en place tambours battants pour la première fois en 2016, lors du premier mandat de Laurent Wauquiez, ce « plan lycées » maintient aujourd'hui comme horizon la réduction de 40 % des consommations d'énergie des établissements en 2030. Il se décline en plusieurs objectifs, dont celui de rénover les établissements publics et privés les moins isolés afin d'atteindre une note minimale classée D. Une centaine d'opérations de plus de 5 millions d'euros sont en cours. La Région ajoute que : « 70% des établissements scolaires régionaux sont jugés « très performants » d'un point de vue énergétique (contre moins de 60% en 2016) ». Et si le lien avec France Rénov' n'est pas établi, la collectivité poursuit en déclarant « privilégier une vision pragmatique et de terrain ».

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Commentaires 3
à écrit le 04/11/2023 à 12:41
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J’espère que l’Etat va déduire ce montant de la participation financière qu’il verse à la Région.

à écrit le 04/11/2023 à 10:58
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"...l'Etat va compenser le retrait ..." Il serait temps de s'intéresser aussi à la réduction de notre dette..

à écrit le 03/11/2023 à 20:25
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bien, que les autres regions fassent pareil, et on va te voter une loi de decentralisation socialiste, qui decentralise la levee de l'impot pour financer un projet tolerant vote a paris........un peu comme le RMI, quoi

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