Dans le Puy-de-Dôme, les défaillances d’entreprises repartent fortement à la hausse

Inflation, remboursement des prêts garantis par l’Etat (PGE), difficultés de recrutement, ruptures de carnet de commande, manque de visibilité… La situation se tend pour bon nombre d’entreprises. Dans le Puy-de-Dôme, les défaillances ont presque doublé en un an et dépassent les niveaux d’avant la crise sanitaire.
Le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand a enregistré 280 défaillances sur les huit premiers mois de l'année.
Le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand a enregistré 280 défaillances sur les huit premiers mois de l'année. (Crédits : YP)

La parenthèse est bel et bien terminée. Plutôt préservées ces trois dernières années grâce au « quoi qu'il en coûte » et aux mesures de soutien de l'Etat, la situation se tend pour bon nombre d'entreprises puydômoises. Les défaillances, qui avaient chuté à des niveaux historiquement bas durant la crise sanitaire, repartent à la hausse. Et même, elles explosent, puisqu'elles ont presque doublé en un an, au prorata des huit premiers mois de l'année.

« Entre début janvier et fin août, nous avons constaté 280 défaillances dans le Puy-de-Dôme. Elles étaient 150 à la même période l'année dernière. Nous revenons à des niveaux d'avant covid et nous les dépassons. »

Yves Quinty, président du tribunal de commerce de Clermont-Ferrand.

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Effet rattrapage

Selon Yves Quinty, président du tribunal de commerce de Clermont-Ferrand, les difficultés s'accumulent. La hausse des coûts des matières premières et de l'énergie, cumulée à celle des salaires, sans oublier la remontée des taux d'intérêt, réduisent les marges des entreprises. Et pour ne rien arranger à leur trésorerie, certaines sociétés doivent aussi rembourser les prêts garantis par l'Etat (PGE), accordés pendant la crise Covid. Résultat, dans le département, les procédures collectives touchent particulièrement les petites structures, les TPE (très petites entreprises) et les PME (petites et moyennes entreprises), à l'image de ce qui se passe au niveau national. Et certains secteurs sont particulièrement concernés : le commerce, la construction et l'hébergement/restauration.

« Il y a aussi un effet rattrapage...», analyse le président du tribunal de commerce qui est conscient que ces trois dernières années étaient un peu particulières. Parmi les procédures, il y a des entreprises dites « zombies », celles qui n'ont survécu que grâce aux aides publiques déployées pendant la pandémie et qui ont ainsi bénéficié d'un sursis.

De son côté, la Banque de France confirme une accélération rapide des défaillances depuis un an sur le territoire, mais cela marque, selon l'institution, un retour à un rythme naturel.

« Je ne me projette pas sur un mur de faillites. Il est difficile de dire si cette accélération va continuer ou si elle va se stabiliser. Mais il n'y a pas de raisons objectives pour que l'on dépasse durablement les niveaux de défaillances que l'on connaissait avant la crise sanitaire. »

Guilhem Blanchin, directeur départemental de la Banque de France.

60 entreprises en procédure amiable dans le département

Yves Quinty constate tout de même, cette année, moins de résignation de la part des dirigeants. Alors qu'en 2022, beaucoup de chefs d'entreprises demandaient en première audience l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire, c'est moins le cas depuis le début de l'année.

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« Nous avons 71 redressements contre 25 l'an dernier sur la période. Sans doute parce que, parmi les entreprises concernées cette année, les structures plus grosses, comme des PME avec des salariés. Elles ont certes des difficultés mais elles tentent de s'en sortir. Elles veulent éviter à tout prix la liquidation. »

Yves Quinty, président du tribunal de commerce de Clermont-Ferrand.

Autre tendance, de plus en plus de chefs d'entreprise sollicitent le tribunal de commerce, dès les premiers signes de fragilité, afin de trouver des solutions en amont. Ainsi, depuis le début de l'année dans le Puy-de-Dôme, 60 entreprises (contre 40 l'an dernier) ont ouvert une procédure préventive amiable, sous la forme soit d'une conciliation, soit d'un mandat ad hoc.

« Nous ne sommes pas qu'un tribunal de faillites, nous pouvons aussi être un lieu de rebond. La prévention est un axe fort de ma mandature. A travers ces procédures amiables, les entreprises peuvent étudier et négocier auprès de leurs créanciers la possibilité de différer leurs remboursements. Dans ce cas-là, elles ont 80% de chance de s'en sortir. A l'inverse, lorsqu'elles n'anticipent pas et se retrouvent en défaillance, elles sont 30 à 40 % à trouver une issue positive », détaille Yves Quinty.

Quatre entreprises sur dix affirment constater une baisse d'activité

Si les défaillances sont la face visible des difficultés des entreprises, le malaise est plus profond. Ainsi une étude menée par la CCI Puy-de-Dôme Clermont Auvergne Métropole, vient de sonder le moral des chefs d'entreprises. Sur les 485 dirigeants du département interrogés, 41% constatent une baisse de leur activité au premier semestre. Et c'est bien la prudence qui domine pour les mois à venir puisque seulement 1 chef d'entreprise sur dix prévoit d'embaucher d'ici la fin de l'année. Pire, la moitié des entreprises sondées ne vont pas d'investir d'ici la fin de l'année (36%) ou le feront à la baisse (18%). En cause notamment, là encore, le remboursement du PGE qui pèse aussi sur les capacités d'investissement.

« La photo immédiate n'est pas catastrophique, mais l'avenir est incertain. Les chefs d'entreprise n'ont pas de visibilité. Une forte inquiétude remonte du terrain. Elle est liée à l'inflation et aux tensions sociales qu'elle engendre. »

Claude Barbin, le président de la CCI Puy-de-Dôme Clermont Auvergne Métropole.

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Ce dernier souligne cependant que de beaux projets sont en préparation sur le territoire : l'extension de l'implantation d'Hermès à Riom, l'installation d'ateliers du joaillier de luxe Van Cleef & Arpels vers Thiers ou encore le projet Cataroux et ses 53 hectares de réindustrialisation.

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