A Clermont-Ferrand, une maison d’édition jeunesse sauvée grâce aux réseaux sociaux

En juin, La poule qui pond, jeune maison d’édition indépendante fondée en 2014, était menacée de faillite. Fragilisée par la hausse du prix du papier et du transport et le remboursement du PGE, ce prêt garanti par l’Etat accordé pendant la crise du Covid. Mais après un appel à l’aide posté sur Facebook, les commandes ont explosé et l’entreprise reprend l’espoir.
La Poule qui pond publie une vingtaine de nouveautés par an et espère continuer à attirer de nouveaux clients.
La Poule qui pond publie une vingtaine de nouveautés par an et espère continuer à attirer de nouveaux clients. (Crédits : DR La poule qui pond)

C'est un cri d'alarme qu'a lancé Valentin Mathé en juin sur les réseaux sociaux. Sa jeune maison d'édition, installée à Clermont-Ferrand, était clairement menacée de fermeture. « Je ne vais pas y aller par quatre chemins. On n'a plus d'argent ! » déclarait le fondateur en préambule de sa courte vidéo d'une minute.

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La Poule qui pond, qui s'adresse aux enfants de leur naissance à la maternelle, n'avait plus de trésorerie et ne pouvait plus sortir de nouveautés. Elle, qui édite une vingtaine de livres par an, voyait son avenir s'assombrir.

« Le compte bancaire de l'entreprise affichait un déficit de 27.000 euros, on approchait dangereusement du découvert maximal autorisé de 30.000 euros. La banque ne nous suivait plus. On était clairement en risque de faillite. L'entreprise était viable mais nous n'avions plus de trésorerie, » rapporte Valentin Mathé, qui emploie trois personnes.

Hausse de prix demandée par les imprimeurs

La société, qui a réalisé l'an dernier 300.000 euros de chiffre d'affaires, est en fait confrontée à de multiples difficultés. D'abord, comme tous les éditeurs, La Poule qui pond a subi la hausse du coût des transports et du prix du papier, après la crise Covid et la guerre en Ukraine.

« En moyenne, chaque impression de livre nous coûtait entre 80 centimes et 2 euros, aujourd'hui c'est entre 1,30 et 2,50 euros. Et puis la masse salariale a, dans le même temps, augmenté. Avec la hausse du SMIC liée à l'inflation, c'est un surcoût de 9.000 euros pour l'entreprise, » explique le dirigeant.

Et les problèmes se sont cumulés pour la jeune société. L'un de ses imprimeurs, installé à Kharkiv en Ukraine, a dû arrêter du jour au lendemain son activité, juste après le début du conflit avec la Russie. Il a donc fallu trouver de nouveaux imprimeurs et la production des nouveautés a pris du retard. Ce qui veut dire moins de rentrées d'argent pendant plusieurs mois pour la maison d'édition. Et puis, pour ne rien arranger, La poule qui pond devait rembourser en juillet son PGE, le prêt garanti par l'Etat. Prêt de 45.000 euros. « Je me suis dis que j'allais devoir mettre la clé sous la porte », confie Valentin Mathé.

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Soutien des internautes

Mais le dirigeant n'est pas défaitiste et a l'idée de lancer cet appel de soutien. Il décide de mettre en vente sur le site internet de la maison d'édition son stock d'anciens livres, qui ne sont plus commercialisés en librairie, et des ouvrages récents sous forme de packs, allant de 30 à 75 euros. Une manière de renflouer les caisses. Et cela fonctionne. Sa vidéo a été visionnée plus de 300.000 fois depuis sa mise en ligne en juin et les commandes affluent.

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« Nous avons vendu 200 packs à 30 euros dès la première semaine. En 15 jours, nous avons fait le chiffre d'affaires de toute l'année dernière sur la boutique en ligne », se réjouit Valentin Mathé, qui comptabilise aujourd'hui 2.400 commandes en deux mois et demi (contre 1.800 sur l'année 2022). « Le succès est énorme. Des salons du livre m'ont aussi invité, des mairies passent des commandes pour les cadeaux de fin d'année, des bibliothèques, des librairies... La librairie des Canuts à Lyon a, par exemple, fait une vitrine de soutien avec tous nos livres. »

Les trois emplois préservés

Aujourd'hui, le dirigeant reprend espoir. L'entreprise n'a plus de dettes auprès de ses fournisseurs et n'est plus à découvert. La maison d'édition a aussi réussi à étaler le remboursement de son PGE qu'elle a pu transformer en prêt avec intérêt.

« Je ne me pose plus la question de licencier l'équipe. L'entreprise est viable et bénéficiaire », souligne le fondateur de La poule qui pond. «Mais la question est : combien de temps cela va durer, car cela reste fragile. Il y a l'inquiétude que l'on se retrouve dans la même situation dans deux ans. Et là, il sera impossible de refaire un appel à l'aide sur internet. Cela ne marche qu'une fois, » poursuit Valentin Mathé.

Alors, afin de transformer l'essai et garder ses tout nouveaux clients, le chef d'entreprise a décidé de faire de la pédagogie et de continuer ses vidéos en ligne, pour expliquer le métier d'éditeur, les contraintes et l'importance de garder ces petites maisons d'édition indépendantes. La poule qui pond va aussi mettre en avant l'une de ses particularités, la publication de livres jeunesse destinés aux enfants dyslexiques.

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Enfin, l'éditeur compte bien continuer à proposer des packs de livres sur son site internet, à des tarifs préférentiels, afin de faire vivre son stock dormant et d'éviter le pilonnage des ouvrages (destruction des invendus). En espérant que le soutien des internautes s'inscrive dans le temps et permette à cette petite maison d'édition indépendante clermontoise de fêter l'an prochain ses 10 ans.

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Commentaire 1
à écrit le 11/09/2023 à 10:00
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s'ils ont une explosion de commandes, c'est soit que c'est un feu de paille, sauf qu'ils avianet un pb de marketing......et sinon on ne va pas trop attendre pour entendre la suite de l'histoire, qui concernera le volet financier ( cf cours de finance...

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