Comment le plan de suppressions de postes chez SFR va impacter la région

Dans le cadre du plan de départs volontaires annoncé par le groupe Altice SFR, près de 187 postes de l'opérateur devraient disparaître en Auvergne-Rhône-Alpes, région qui abrite pourtant un centre stratégique pour SFR : la supervision du cœur de réseau pour toute la France. Pour protester contre ce plan, un mouvement de grève était mené ce jeudi. Interpellés, les candidats aux Régionales n'ont cependant pas répondu à leur appel.
187 postes sont concernés, en Auvergne-Rhône-Alpes, par le plan de dégraissage de SFR. Les syndicats, qui avaient lancé un appel aux candidats aux Régionales, n'ont obtenu aucun écho de la part des candidats. Ils n'ont pas compris les enjeux régionaux, avance l'UNSA.
187 postes sont concernés, en Auvergne-Rhône-Alpes, par le plan de dégraissage de SFR. Les syndicats, qui avaient lancé un appel aux candidats aux Régionales, n'ont obtenu "aucun écho" de la part des candidats. "Ils n'ont pas compris les enjeux régionaux", avance l'UNSA. (Crédits : Stephane Mahe)

Son annonce avait pris de court les organisations syndicales en mars dernier. Trois ans après le plan de départs volontaires qui avait vu 5.000 collaborateurs quitter l'entreprise, le groupe Altice France - SFR a ainsi présenté un plan "Transformation et ambitions 2025".

Un plan en quatre actes prévoyant le recrutement de 1.000 jeunes diplômés qualifiés en sécurité et en IA notamment, le recrutement de 1.000 apprentis par an, une formation renforcée des salariés mais aussi, - et c'est bien là la goutte de trop pour les syndicats du groupe -, le départ volontaire de 400 salariés de la branche distribution (boutiques) et 1.300 de la branche télécom, dès 2021. Soit 11% de l'effectif du groupe (15.000 salariés).

Après trois mois de négociations et discussions, les syndicats ont décidé, ce début de semaine, de claquer la porte. Et de mener, ce jeudi, un mouvement national de grève, dans le cadre d'une intersyndicale. Une action qui n'est pourtant pas "dans l'ADN de l'entreprise", assure Philippe Pernot, délégué syndical UNSA basé à Lyon, syndicat majoritaire chez SFR. "Nous sommes un syndicat réformiste, ouvert à la négociation. Mais là, aucune discussion n'est possible, la direction reste campée sur ses décisions et refuse de nous donner les informations nécessaires à la compréhension du projet, alors qu'elle a été condamnée à ce sujet par le Tribunal... Nous réfutons l'ampleur du plan et la méthode".

Et l'annonce ce jeudi (coïncidence?) du remaniement du management d'Altice France avec le retrait d'Alain Weil de ses fonctions de P-dg d'Altice France, de SFR et d'Altice Media, remplacé par Grégory Rabuel, ne devrait pas changer significativement la donne selon l'élu syndical puisque Grégory Rabuel était justement leur interlocuteur, en tant que directeur général de SFR...

Au-delà de l'impact sur l'emploi, l'intersyndicale alerte sur un plan affaiblissant "significativement la souveraineté industrielle et numérique française. Pourtant, la panne des lignes de numéros d'urgence survenue récemment a montré l'intérêt vital de la bonne conduite des activités des entreprises de télécommunication".

Elle évoque également un plan trahissant "la confiance des décideurs publics alors même que le groupe a utilisé au-delà des besoins réels le recours à l'activité partielle en 2020".

Philippe Pernot dénonce ainsi : " les résultats du groupe ont été très bons en 2020, le chiffre d'affaires a augmenté de 2,1% (11 milliards d'euros NDLR) et l'Ebitda d'1,7 % (avec une chute au dernier trimestre néanmoins NDLR). L'activité a été très forte puisqu'il a fallu redimensionner le réseau pour répondre aux besoins des télétravailleurs notamment. Les 2.500 personnes en activité partielle des boutiques, cela s'explique parfaitement, mais les 2.000 de l'activité télécom ? Cela a surpris et choqué en interne car nous avons dû stopper des projets".

Sollicité par la Tribune, le groupe n'a pas donné suite, à l'heure où nous écrivons ces lignes, à notre demande d'interview.

187 postes impactés en Auvergne-Rhône-Alpes

Sur les quelque 950 salariés du groupe dans la région (700 pour l'activité télécom et 250 pour la distribution), ils sont plus d'une centaine à avoir fait acte de présence sur le piquet de grève de ce jeudi mais le mouvement est probablement plus étendu. Difficilement quantifiable par les syndicats en raison du télétravail.

Sur la région, ce plan de départs volontaires doit concerner, selon les sources syndicales, 155 postes pour l'activité télécom et 32 pour les boutiques.

L'essentiel de cette réorganisation concernera le site de Bron, site historique du groupe et particulièrement stratégique puisque c'est ce site qui a en charge la supervision du cœur de réseau du groupe au niveau national. La supervision "accès et hébergements" étant assurée, elle à Paris.

Ce service est d'ailleurs en grève totale et reconductible depuis ce jeudi : il est en effet amené à être supprimé et transféré chez un autre partenaire du groupe, au sein de la galaxie Drahi. Une grève totale qui a un impact fort sur le service lyonnais, lui-même en grève partielle mais qui a dû reprendre à la volée les missions assurées à Paris.

"Le service lyonnais de supervision est déjà sous-dimensionné, cette réaffectation provisoire est faite au détriment des interventions non urgentes mais cela ne pourra pas perdurer trop longtemps", s'alarme Philippe Pernot, pointant la nécessité du maintien de la qualité du service rendu aux usagers, notamment dans le cadre des activités vitales (hôpitaux, appels d'urgence etc).

Ce service lyonnais de supervision et ses quelque 80 salariés, contrairement à la supervision parisienne, ne seraient pas concernés par le plan de réduction des effectifs.

En revanche, les services gravitant autour oui. Par exemple :  l'équipe "support câble" (10 personnes), ex Numéricable, serait complètement supprimée.

"Les experts fibres vont également disparaitre", pointe encore Philippe Pernot, pour l'intersyndicale. "Nous avons de moins en moins de moyens pour assurer nos missions. Nos effectifs ont beaucoup diminué. Pourtant, notre travail est stratégique : déploiement de la fibre optique, 5G etc. Ce manque de moyens commence à poser de sérieux problèmes localement", regrette le représentant syndical, faisant allusion notamment au conflit opposant l'opérateur aux villes de Meyzieu et Saint-Priest notamment.

Ces deux municipalités ont saisi, la semaine dernière, l'ARCEP, en raison de dysfonctionnements importants sur le réseau fibre optique. Le Grand Lyon avait signé une convention avec SFR en 2013, pour le déploiement de la fibre sur 13 zones dites moyennement denses.

Des candidats aux régionales aux abonnés absents

Pour les épauler dans leur démarche, les syndicats lyonnais de SFR avaient convié ce jeudi matin les trois candidats encore en lice à la présidence de la Région à une rencontre, afin de leur exposer les enjeux en termes d'emplois pour la région mais aussi, plus globalement, en matière de déploiement de la 5G, de la fibre etc.

Une initiative qui n'a trouvé aucun écho auprès des trois candidats, Laurent Wauquiez (LR), Fabienne Grébert (Union de la gauche) et Andrea Kotarac (RN), puisqu'aucun d'entre eux n'a répondu présent à l'invitation.

Ou n'a répondu tout court d'ailleurs, excepté Laurent Wauquiez qui s'est fendu d'une réponse négative.

"Nous sommes déçus, c'est certain. Ils n'ont pas compris les enjeux régionaux", constate Philippe Pernot, qui espère une avancée positive des négociations dans les prochaines semaines, éventuellement grâce à une médiation du Ministère du Travail.

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