Nantes flirte avec Montréal

Au même titre que Londres et Hambourg, Montréal est devenu une ville cible pour le développement international de la métropole nantaise. En vue du prochain "Printemps numérique" de Montréal, les Nantais tissent des liens avec la prometteuse Amérique du Nord.
(Crédits : iStock)

"Quelles que soient les tailles de nos villes, nous sommes confrontés aux mêmes enjeux mondiaux de transformation digitale", estime Mehdi Benboubakeur, directeur général du Printemps numérique de Montréal, venu signer une convention de partenariat avec le pays de Jules Verne, lors de la dernière Digital Week, à Nantes.

Si la métropole nantaise, trois fois plus petite, ne joue pas dans la même cour que ce hub mondial de l'intelligence artificielle, troisième pôle mondial pour les jeux vidéo (Assassin's Creed...) et quatrième pour la fabrication de blockbusters (XFiles, Avengers, Game Of Thrones, Star War...), les deux cités se reconnaissent de vraies similitudes.

"La créativité, l'égalité des femmes, la mixité, les minorités, le développement durable, la ville intelligente, la nature en ville... Certes, Montréal est une ville monde, mais, comme Nantes, c'est une métropole nouvellement dirigée par une femme de 40 ans - Valérie Plante - dont on partage les valeurs", observe Francky Trichet, adjoint au maire et conseiller métropolitain chargé du numérique et de l'innovation, qui a initié le rapprochement des deux villes, au lendemain d'une mission d'observation menée au printemps dernier avec une délégation de l'agence économique Nantes-Saint-Nazaire Développement.

"Nantes est une ville chaleureuse et audacieuse où les levées de fonds de l'écosystème numérique ont augmenté de façon exponentielle en passant de 7 millions à 100 millions d'euros en trois ans", ajoute Mehdi Benboubakeur, patron du Printemps numérique, fondé il y a cinq ans pour animer et favoriser la transversalité entre les différents écosystèmes montréalais.

"Notre stratégie de développement passe maintenant par des partenariats avec des écosystèmes à travers le monde et avec les villes qui nous ressemblent. Dans une économie mondialisée, nous croyons beaucoup à ces formes de collaboration".

Après Bruxelles et Munich, Nantes a grillé la politesse à Hambourg et Barcelone.

Les femmes d'abord

Si la convention porte sur les échanges de contenus, le maillage des réseaux, le business entre entreprises et startups, la culture..., les partenaires ont choisi de concentrer leur première action sur les femmes.

Ainsi, les trois lauréates du Prix des Femmes du Digital organisé pendant la Digital Week 2018 - Léonie Ferreira, pour Womenwalk, Sophie Comte pour Makidoo et la designer Nina Missir - seront invitées au Printemps numérique à Montréal en avril prochain.

"Nous allons les mettre sur le devant de la scène pour qu'elles puissent tirer profit de cet échange", explique Mehdi Benboubakeur qui, à son tour, organisera un Prix avec l'association Femmes Alpha, dont les heureuses élues seront accueillies à Nantes pour la Digital Week à l'automne 2019.

"La question de la présence des femmes dans les organisations numériques est un vrai sujet pour Montréal et le Québec en général, où les femmes comptent pour 10 % à 20 %. Or, plus nous aurons un écosystème diversifié plus la créativité sera forte", affirme-t-il.

De son côté, l'écosystème nantais, soutenu par un volontariat international en entreprise (VIE) recruté par la Métropole, la CCI et Nantes-Saint-Nazaire Développement, peaufine sa venue sur le territoire canadien. Le Quartier de la Création nantais prépare trois opérations croisées à destination des quartiers des Spectacles et de l'Innovation à Montréal.

Deux appels à projets sont en cours d'études pour accueillir des startups québécoises et pour expérimenter l'usage d'un mobilier urbain connecté. Un autre partenariat serait engagé entre le quartier de la Création nantais et le pôle de créativité Mosaic d'HEC Montréal pour former des managers experts en innovation face à la disruption de l'environnement économique.

Des américains qui parlent français

Jusque-là surtout prisé par les prestataires de l'industrie aéronautique et de l'automobile de l'ouest de la France, le marché nord-américain, considéré comme une porte d'entrée vers les États-Unis, commence à séduire l'écosystème numérique.

Lire aussi : "Tout entrepreneur doit sortir de la zone francophone" (Isabelle Hudon, ambassadrice du Canada en France)

Outre les liens universitaires sur l'IA, notamment, l'école de design Nantes-Atlantique, l'école de graphisme Pivaud viennent d'y implanter des satellites. Très tôt tourné vers l'international (Chine, Amérique du Nord...), l'éditeur nantais de logiciels libres de modélisation Obeo y est allé par étapes. D'abord, avec l'implantation d'un VIE à Montréal pour consolider les liens commerciaux existant avec l'Agence spatiale canadienne et son partenariat avec le chef de file de l'open source Savoir-Faire Linux. Ensuite, avec la création d'une filiale à Vancouver au printemps dernier. Cofondateur d'Obeo, Stéphane Lacrampe y est venu en famille pour mener ce projet.

"Une décision personnelle où la dimension immigration n'est pas simple. Même à Montréal où, si nous parlons la même langue, nous n'avons pas la même culture. Ici, tout va beaucoup plus vite. Mais les gens sont très ouverts", observe-t-il.

Pour Nicolas Tronchon, fondateur de Transway, éditeur de solutions intelligentes pour des déplacements urbains doux ou alternatifs, le constat est identique. Lui vient de signer ses deux premiers contrats sur le territoire nord-américain, à Montréal et à Sherbrooke.

Les Québécois, ce sont des Américains qui parlent français. Et, ici, le premier adage, c'est "take a chance !" Lorsque vous présentez un projet en France on vous dit : quels sont les risques ? Ici, une fois les questions de lobbying évacuées, ils se demandent : qu'est-ce qui est intéressant pour moi ? Ils sont pragmatiques et plus simples à aborder", dit-il, persuadé que les territoires nantais et montréalais ont des perspectives de développements communes.

"Au-delà des tailles, leurs approches sont similaires sur l'innovation et le monde du digital. Des deux côtés, les idées foisonnent, les expérimentations sont nombreuses et l'on est vraiment dans le partage des bonnes pratiques", explique le fondateur de Transway, dont les logiciels, fondés sur le principe de la récompense, permettent aux utilisateurs de la ligne d'autocars Orléans Express entre Montréal et Québec et aux habitants de Sherbrooke de gagner des points ou des cadeaux s'ils optent pour le vélo, le bus ou le covoiturage, plutôt que pour leur propre véhicule. "Mais les abonnements téléphoniques sont tellement coûteux ici que, pour être adoptées, les applis doivent pouvoir fonctionner off line ou en wifi. Travailler dans ces pays nous ouvre énormément de solutions...", se félicite-t-il

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